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Grand format
Inédit
Tout public
302 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-7436-5225-8
Coll. "Noir"
Dans l'œil du cyclone de la guerre civile
Depuis quelques années, avec des hauts et des bas dans l'information, le "problème" syrien est au cœur de nos préoccupations. Jean-Pierre Perrin est un journaliste qui a travaillé dans ce pays, y a vécu et a rendu compte de la situation dans des reportages dont certains ont obtenu des prix journalistiques importants. Il avait dès 1995 attiré l'attention des lecteurs de polars avec Chemin des loups, un premier roman qui annonçait de bonnes prédispositions. Puis il s'était fait plus rare. De son "séjour" en Syrie, de ses rencontres sans doute, il en revient avec un roman documenté, avec des détails sur la vie quotidienne et sur les petits éléments qui rendent réels un livre avec un récit captivant et prenant. Nous allons suivre trois itinéraires. Bien évidemment, ils se recouperont, mais de manière discrète, par des allusions et des croisements. Il y a tout d'abord un romancier-journaliste qui, descendant d'une famille espagnole ayant dû fuir dans les années 1930 leur pays, a été fasciné à la fois par la guerre civile et ses désastres. Il a été enlevé et retenu otage en Syrie, mais sa rançon a été payée et il a pu, difficilement, regagner l'Occident, empli de désarroi car sans avoir réellement trahi, il a le sentiment de ne pas avoir été à la hauteur de l'événement et de ses compagnons de cellule. Il entreprend un voyage en Espagne sur les traces de Federico García Lorca, comme pour se dédouaner. Il y a aussi un diplomate issu d'une vieille famille juive. Les siens ont été déporté par un nazi qui a réussi après la guerre à rejoindre la Syrie où il a mis son expérience de tortionnaire au service du gouvernement. Le diplomate se demande même si lors d'une de ses missions, il ne l'aurait pas croisé dans les couloirs d'un ministère. Pour, lui aussi, essayer de lutter contre ses propres démons, il accepte de retourner dans une des villes assiégées afin d'y obtenir des renseignements utiles pour la France. Il y a enfin un ancien soldat, mercenaire, qui doit se rendre dans ce bourbier, pour y retrouver une jeune femme venue comme humanitaire en Syrie, et qui ne donne plus signe de vie. Il est soutenu en sous-main par des services secrets qui entendent profiter de l'occasion pour une autre mission.
Comme on le voit, nous avons là trois personnages qui permettent de balayer de l'extérieur. Jean-Pierre Perrin ne va pas décrire la façon dont les Syriens vivent le conflit, mais comment les Occidentaux s'y réfèrent, comment ils surnagent dans ce conflit où ils ont des intérêts, où ils peuvent souffrir dans leur chair. Malgré tout, ce n'est pas leur pays (et ils peuvent le quitter plus "tranquillement" que des réfugiés). Leurs trois itinéraires offrent à l'auteur l'occasion de balayer la situation, de décrire le local et d'ouvrir le roman à une forme d'universalisme : ce que nous vivons aujourd'hui en Syrie (et que nous laissons se dérouler), ce dont nous nous offusquons d'une barbarie logique car ce sont des Orientaux sans vraie civilisation, nous avons cependant la même chose avec la guerre d'Espagne, prélude à des déchirements et qu'un historien a nommé "La Guerre civile européenne". Les trois histoires ne se recoupent que partiellement, se répondent cependant, et nous offrent ainsi une vision de la guerre, des forces qui s'opposent, de la vilenie et de l'Humanité, du doute de certains face aux certitudes glacées des autres. Jean-Pierre Perrin, à travers une intrigue forte et prenante, a écrit un très bon roman noir.
Citation
Ce n'était pas le plus cruel des geôliers. C'est pourquoi nous lui avons trouvé un surnom plus gentil, presque charmant, le Ravi du Djihad.