Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
180 p. ; 20 x 14 cm
ISBN 978-2-35887-941-5
Prison Break
Militante féministe, Pauline Hillier est arrêtée suite à une manifestation à Tunis. Incarcérée à la Manouba, la prison des femmes, elle intègre un monde à part entière, avec ses règles et ses conflits. Enfermée en compagnie de vingt-huit autres femmes dans une cellule de trente mètres carrés, avec pour seule possession un exemplaire des Contemplations de Victor Hugo et un stylo, elle va peu à peu découvrir les limites de son nouvel univers et, grâce à un petit talent de chiromancie, se faire une place parmi les autres, les pousser à se raconter. Pauline devient alors La Voyante, dépositaire des histoires de ces femmes, meurtrières ou innocentes, mais toutes coupables, aux yeux d'une justice faite par et pour les hommes.
Les Contemplées, c'est d'abord l'histoire du choc, violent, entre une jeune féministe européenne (membre des Femen, Pauline Hillier a été arrêtée pour avoir manifesté seins nus en soutien à une activiste tunisienne incarcérée) et le monde de la prison, qui se referme sur elle avec violence. Sans prendre de gants, l'auteure raconte l'insalubrité de la prison, le dénuement des prisonnières, le manque d'hygiène, les privations, les brutalités de la part des gardiennes et du système tout entier occupé à l'écrasement de ces femmes. Mais elle relate aussi l'étonnante sororité qui se crée avec ses compagnes d'infortune dont elle reconstitue patiemment l'histoire, comme un puzzle fait de révélations et de mensonges. Elle raconte Fuite, l'adolescente condamnée pour avoir triché au bac, Hafida qui a dérapé de sa vie bourgeoise en dépensant plus que de raison, la Cabrane qui a assassiné tous les hommes qui l'avaient fait souffrir, mais aussi Warda, violée, battue et condamnée, à tort, évidemment à tort. De fil en fil, de récit en récit, Pauline Hillier est comme une Shéhérazade de Mille et une noires nuits, qui dans une écriture riche, évocatrice, ne s'interdit jamais de faire de la littérature et pas du simple "carnet de prison" à mesure qu'elle évoque ces destins brisées, ces vies (dont la sienne) irrémédiablement marquées par leur passage à la Manouba. Enfermés avec elle dans sa cellule, au point qu'on ne saura pas l'étendue réelle de la prison, trop vaste sans doute pour être appréhendée, on se prend d'affection pour ces femmes solidaires, fortes et résilientes malgré les circonstances. On savoure les moments de joie, de rébellion presque enfantine, on fronce le nez face aux odeurs, à la saleté et à la promiscuité forcée, et lorsque les grilles s'ouvrent, on s'autorise enfin à respirer. Mais on ne sort jamais totalement de la prison, et si Pauline Hillier en est sortie, La Voyante (ou Bolona, son autre nom de prison) est restée là-bas, aux côtés de toutes ces femmes, dont on ne connaîtra jamais le sort, et de toutes celles qui les ont rejointes durant les dix années qui se sont écoulées depuis son arrestation, enfermées pour tout et rien, pour le seul tort souvent d'avoir voulu exister.
Citation
De ma rencontre avec la Manouba, je me souviens de tout. Il faut dire que la mangeuse de femmes est charismatique et fait tout de suite forte impression. Quand on m'extrait du fourgon, je suis déjà dans le ventre de la bête.