Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
220 p. ; 20 x 10 cm
ISBN 978-2-490426-33-1
Coll. "La Tangente"
Passé à la lessiveuse
Trois courts romans ou trois longues nouvelles, au choix, qui sont également trois façons de raconter le noir et de lui donner sa touche personnelle par David Sillani, un auteur discret, mais aux textes qui éclatent comme des grenades.
Dans Les Nerfs, le premier de ces textes, c'est une policière qui, suite à une affaire où elle a failli y laisser la peau, "pète les plombs". Le texte qui démarre sur les chapeaux de roue ne s'arrête pas une seule seconde, éprouvant les nerfs du personnage central autant que ceux du lecteur. On a l'impression de revivre un texte noir polar poisseux des années 1970, lorsque l'enjeu était de se révolter, de détruire le monde. Il y a dans Les Nerfs comme un hymne punk, comme une course-poursuite forte et folle, emportant tout sur son passage, avec force. Et le texte fonctionne. Dans le cube, deuxième intrigue, tout est raconté à la première personne par un jeune homme qui se destine à être boucher, qui aimerait vivre mais se trouve coincé par la vie, par les amours, par des coups foireux. Peu armé, il ne sait pas parler, répond par des coups de poing, et se démène pour s'en sortir, mais chaque pas, chaque action est souvent une façon de se faire piéger par des ennemis, parfois par des amis, qui possèdent plus la langue, les relations, le monde que lui. Itinéraire d'un enfant perdu, d'un rebelle sans cause, remis en ordre de marche dans notre société actuelle. Le récit restitue avec soin la façon dont le personnage se bat, se cogne sans cesse contre les murs et ne peut aller que vers une fin noire. Enfin, Bevernaz (du nom du narrateur qui décline sa vie) s'axe sur le personnage, un gars tranquille qui passe une partie de son temps à boire et l'autre à promener son chien. Mais quand une femme vient pour lui demander quelque chose, part avant d'avoir dit deux phrases, et qu'un gars bizarre, qui se promène avec un revolver, le cherche également, Bevernaz se demande ce qui se passe. Et plus le texte avance, plus tout se déglingue et part à vau-l'eau, sans qu'il ne puisse y comprendre quoi que ce soit. Servi par le style, un phrasé oral qui reconstitue les méandres de sa pensée, entre des plages d'oubli, des passages imbibés et une vie sentimentale chaotique, le lecteur ne peut sortir du récit, suivant les péripéties comme embarqué dans un méandre littéraire.
Avec ces trois nouvelles un peu longues (ou ces très courts romans, comme l'on voudra et comme on l'a dit en préambule), qui se répondent par des ambiances noires et glauques, par des cauchemars éveillés et des moments sanglants, l'on comprend bien que cette Commotion protocolaire est à la fois ce qui arrive aux personnages et également ce que ressent le lecteur. On entre dans le récit, et on se retrouve comme dans une machine à laver. Ça tourne, virevolte, on prend des coups, on a la tête qui chavire, mais on ne peut que suivre le mouvement et espérer que ça s'arrêtera, un peu à la manière dont on avait pris le Doberman de Joël Houssin il y a quelques années. David Sillanoli est un auteur qu'il faut suivre.
NdR - Le recueil comporte les novellas suivantes : "Les Nerfs", "Dans le cube" & "Bevernaz".
Citation
Pierre-Marie Janvier, dit la Guibole, s'est pris au moins sept balles, il est là, rien à faire, en train de crever dans pas mal de sang, un trou noir et luisant au milieu du visage, comme à les fixer tous d'un œil unique et profond comme le vide.