Admiration funeste

Ce putain de monde est une putain de souricière destinée à remplir leurs putains compte en banque .
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samedi 20 avril

Contenu

Roman - Policier

Admiration funeste

Enquête littéraire - Assassinat - Whodunit MAJ jeudi 11 mai 2023

Note accordée au livre: 4 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 14,9 €

Miranda James
The Silence of the Library - 2014
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Émilie Terrao
Paris : J'ai lu, avril 2023
320 p. ; 19 x 13 cm
ISBN 978-2-290-37808-3
Le chat du bibliothécaire, 5

Ce qu'il faut savoir sur la série

Charles Harris, natif d'Athena, dans le Mississippi, revient s'installer dans sa ville natale après avoir mené sa carrière de bibliothécaire à Houston. Veuf, père de deux enfants adultes, Sean et Laura, il vient s'y installer après le décès prématuré de son épouse Jackie et occupe la maison dont il a hérité de sa tante Dottie... avec Azalea, la gouvernante au caractère bien trempé qui pour rien au monde n'aurait laissé Charlie livré à lui-même. La demeure est assez grande pour qu'il puisse louer une chambre à un étudiant...et y héberger son chat Diesel, un maine coon qu'il a recueilli chaton et qui, dans le premier volet de la série, est âgé d'environ 2 ans.
Charlie est employé à temps partiel à la bibliothèque de l'université, et assure deux fois par semaine des fonctions bénévoles à la bibliothèque municipale. Confronté à diverses affaires criminelles - ce qui l'amène à avoir affaire à l'agente Kanesha Berry, adjointe au bureau du shérif, qui n'est autre que la fille d'Azalea - il est le narrateur de ses propres aventures.

Souvenirs, souvenirs...

Bientôt à Athena sera organisée une exposition centrée sur les séries policières pour la jeunesse. À cette occasion, Charlie Harris explore la riche bibliothèque que feue sa tante Dottie a laissée – celle-là même où il a découvert ces romans dont il allait vite devenir un fervent lecteur, comme sa chère tante l'avait été dans son enfance. Tandis qu'il cherche quelques éditions originales susceptibles d'enrichir l'exposition, un volume retient sa main. Il s'en empare et s'y plonge... Le Secret du manoir de Spellwood ! C'est par lui que tout avait commencé : son engouement pour la série des "Aventures de Veronica Thane", puis, de là, pour d'autres séries analogues. Une initiation enfantine qui a peut-être motivé son orientation professionnelle et, plus sûrement, son inclination d'adulte pour les romans policiers. Telle une de ces "synchronicités" qui ne laissent pas de surprendre quand on y est attentif, un coup de fil interrompt Charlie dans sa lecture : la directrice de la bibliothèque, Teresa Farmer, lui apprend que la créatrice de Veronica Thane, Electra Barnes Cartwright, est encore de ce monde, sur le point de fêter son centième anniversaire. Et aussi qu'elle réside tout près d'Athena.

Dès lors, la préparation de l'exposition prend un tout autre tour : on va tâcher de persuader la vielle auteure, encore en forme malgré son grand âge, de venir à Athena pour rencontrer ses admirateurs et leur accorder une séance de dédicace. Sitôt son accord obtenu, la grande nouvelle est diffusée – Mme Cartwright sera présente pendant la Semaine nationale des bibliothèques ! Mais à peine le communiqué court-il sur la Toile que d'envahissants personnages débarquent à Athena : Carrie Taylor, la présidente du fan-club d'Electra Barnes Cartwright, deux collectionneurs acharnés prêts à tout, un petit éditeur appâté par la perspective de publier des manuscrits inédits... Tous aussi extravagants et fauteurs de trouble les uns que les autres. Cette formidable pagaille tourne au drame quand Carrie Taylor est trouvée morte chez elle.

Une fois de plus voilà Charlie mêlé à un meurtre – à cela près que cette fois le contact direct avec le cadavre lui est épargné. De témoin-clé par son rôle dans l'organisation de l'exposition à la bibliothèque d'Athena, il se mue assez vite en enquêteur – cette fois sans s'attirer de trop désagréables rebuffades de la part de l'agente Kanesha Berry –, convaincu que des éléments décisifs pour la résolution de l'affaire sont à dénicher dans les innombrables documents que sa tante Dottie avait patiemment réunis autour d'Electra Barnes Cartwright et de son intrépide héroïne. Parmi lesquels les toutes premières infolettres écrites par Carrie Taylor. En même temps qu'il investigue, raisonne, fouille dans les précieuses archives de "Mlle Dottie", Charlie se ressource en relisant, jusqu'au bout, Le Secret du manoir de Spellwood.
Et le récit principal de s'interrompre de place en place pour céder le pas aux passages du roman d'enfance au fur et à mesure que Charlie en tourne les pages. Ainsi le lecteur se trouve-t-il lui aussi, en même temps que le personnage-narrateur, "pris" par l'aventure de Veronica Thane. Qui sans être un récit parallèle ou enchâssé – plutôt une succession d'intermèdes auxquels Charlie accroche ses souvenirs – n'en reste pas moins une petite complexité de construction dont on ne peut s'empêcher de penser qu'elle est une sorte d'exercice de style pour Miranda James qui, à l'intérieur de son propre roman, s'improvise romancière pour la jeunesse. Savoureux, de la part d'un auteur qui déjà se joue des genres pour signer cette série…

N'étaient les deux volets qui séparent celui-ci d'Inventaire fatal, on jurerait que les deux romans se suivent et fonctionnent en diptyque, chacun fondé sur un aspect particulier de la bibliophilie, donnant prétexte d'une part à évoquer les habitus d'une catégorie donnée de collectionneurs – ceux qui courent les livres anciens, les premières éditions, les tirages de tête et autres exemplaires à dédicaces autographes et ceux qui orientent leur collection de manière monographique, ne s'intéressant qu'à une série, un auteur, voire une seule œuvre dont ils vont rechercher toutes les déclinaisons –, d'autre part à feuilleter quelques pages d'histoire littéraire et éditoriale. Après avoir découvert, au travers de la collection de James Delacorte, le premier livre imprimé en Amérique, nous voici plongés dans l'univers des publications pour enfants, restreint à la galaxie des séries policières où l'on voit se mêler, en un habile entrelacs au gré de diverses évocations, un couple auteure/héroïne fictif et des romancières bien réelles appariées avec leurs séries respectives. À qui, d'ailleurs, Miranda James dédie son roman : Nancy Drew (connue en France sous le nom d'Alice Roy, et l'on regrettera que la traductrice ait alterné les deux noms tout au long des évocations, entretenant l'idée erronée qu'Alice et Nancy sont deux personnages distincts), Judy Bolton, Trixie Belden qui doivent l'existence à Mildred Wirt Benson, Margaret Sutton, Julie Campbell Tarham... Cette dédicace montre assez que l'auteur et son personnage dégustent les mêmes madeleines, et sans doute beaucoup de lecteurs reconnaîtront-ils là le paysage livresque de leur enfance qui aura décidé de leurs inclinations d'adulte pour les polars. Beaucoup de romanciers aussi, qui savent devoir leur vocation qui à Fantômette, qui au Club des Cinq ou à Alice avant de pouvoir se réclamer d'Arthur Conan Doyle, Agatha Christie ou Maurice Leblanc...

Outre le charme particulier des senteurs d'enfance, Admiration funeste déploie agréablement ce qui apparaît comme les marqueurs de la série : une construction classique parfaitement maîtrisée, un suspense tenu sans faille jusqu'au dénouement, une brochette de figures pittoresques mais dont les extravagances ne sont jamais poussées jusqu'à l'invraisemblable, des personnages récurrents qui évoluent au fil des romans auxquels on s'attache... Un cinquième volet qui conforte "Le Chat du bibliothécaire" dans son statut de série réconfortante d'excellente facture – et dont je suis sûre qu'elle s'apprécie même lorsque l'on n'est pas félinophile.

Citation

Les mots avaient flotté dans mon dos tandis que je m'enfuyais. C'est bizarre comme certains souvenirs vous hantent.

Rédacteur: Isabelle Roche lundi 01 mai 2023
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