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Grand format
Réédition
Tout public
Pamiers : Wild Side, janvier 2012
19 x 14 cm
Coll. "Vintage Classics", 6
Au bout de l'angoisse
En 1953, la RKO permet à l'actrice Ida Lupino (High sierra, de Raoul Walsh en 1941, et plus tard, en 1956, La Cinquième victime, de Fritz Lang) d'être la première femme à réaliser un film noir, qui plus est basé sur un réel fait divers, celui de la cavale de Billy Cook.
Avec un fond musical très typé fin des années 1940 composé par Leith Stevens (vingt-cinq musiques de film en cinq ans...), le film dépeint pendant plus de soixante-dix minutes un huis-clos allié à un road-movie lorsque deux hommes en voiture prennent un auto-stoppeur qui vient de s'évader de prison. C'est William Talman (qui domine de la tête et des épaules le film, quitte à rendre terne les deux autres acteurs de ce drame à trois) à qui il incombe de récupérer le rôle du tueur à l'œil gauche paralysé (ce qui rajoute à la dramatique, surtout lorsque ce tueur, Emmett Myers, se repose : on ne sait alors pas quand il dort ou fait semblant car il conserve un œil toujours ouvert). Il pousse la caricature du tueur à l'extrême. Dès le début, on sait que l'on a affaire au tueur. Il fait de l'auto-stop sur le bas de la route, et la caméra filme ses chaussures et le bas de son pantalon flottant dans les bourrasques de vent, donnant ainsi une impression désagréable. Pris en stop par deux hommes qui ont abandonné leurs femmes l'espace d'un week-end pour aller pêcher dans la montagne mais qui finalement on décidé d'aller faire la bringue au Mexique, assis à l'arrière de la voiture, il ne tarde pas à pointer son arme, le visage baignant dans l'obscurité du fond de la voiture. Le film noir est lancé.Il a déjà assassiné les occupants d'une voiture précédente tombée en rade. Il assassinera les deux hommes. La seule question est : quand ? La piste qui mène au débarcadère d'un ferry sera longue, parsemée de troubles et d'embûche, en même temps que l'étau autour du tueur va se resserrer, alors que lui va avoir les nerfs à vif, devenir de plus en plus irascible.
Extrait du début du film.
Le scénario de ce film écrit à quatre, est là pour nous rappeler que nous sommes en pleine période maccarthyste. En effet, Daniel Mainwaring ne sera pas crédité car listé par le sénateur américain. Du coup, ce film peut-être regardé différemment. L'assassin écoute fréquemment les informations à la radio. La police délivre de fausses informations, et le spectateur d'accepter pour la bonne cause que les auditeurs soient victimes d'une désinformation. Mais ce serait prendre les choses simplement au premier degré, car il y a un événement bien plus important, et qui se révèle profondément antimaccarthyste dans le scénario. C'est l'instant où le tueur reproche à ses deux otages d'être des mous et surtout d'être bêtement solidaires l'un de l'autre, car s'ils n'avaient pensé qu'à eux, l'un se sortirait vivant de ce traquenard morbide. C'est une incitation à se désolidariser les uns des autres, à la collaboration, sauf que le final du film leur donnera raison. Les dialogues du film sont réduits au plus strict minimum. À cela, il faut rajouter que le tueur ne parle pas espagnol et qu'il interdit à ses otages de parler autrement que par signes avec les Mexicains, qu'il y a une jolie scène mobide à la carabine version Guillaume Tell revisité, et qu'à la fin, le tueur s'en prend plein la tronche. Joli essai pour Ida Lupino qui n'aura pas souvent l'occasion de diriger des acteurs. On se demande bien pourquoi...
Le Voyage de la peur : 71 min. réalisé par Ida Lupino sur un scénario de Robert L. Joseph, Ida Lupino, Daniel Mainwaring & Collier Young avec Edmond O'Brien, Frank Lovejoy, William Talman, José Torvay, Sam Hayes, Wendell Niles, Jean Del Val, Clark Howat, Natividad Vacio...
Citation
Je sais à quoi tu penses. Laisse tomber. Vous allez mourir, c'est tout. Reste à savoir quand.