Le Cortège de la mort

Le remords dans les yeux de la sœur ne se voit pas. Les yeux sont froids, presque vides. Des yeux éteints. Le serpent en elle. Seules quelques légères contractions musculaires de la paupière gauche trahissent l'émotion restante, résiduelle.
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samedi 23 novembre

Contenu

Roman - Policier

Le Cortège de la mort

Disparition - Faits divers MAJ vendredi 30 novembre 2012

Note accordée au livre: 5 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 9,8 €

Elizabeth George
This body of death - 2010
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Anouk Neuhoff
Paris : Pocket, novembre 2011
1013 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-266-21521-3
Coll. "Policier", 14707

Actualités

  • 18/11 Édition: Parutions de la semaine - 18 novembre
  • 08/10 Édition: Parutions de la semaine - 8 octobre
    Semaine très chargée qui propose un choix vaste. Entre le grand retour de Roger Jon Ellory, l'apparition de James Carol Oates, Alain Wagneur et son Djoliba, difficile d'élire. Peut-être James Carol Oates, sûrement pas Harlan Coben dont on nous propose un de ses premiers romans qui avait été refusé par à peu près tous les éditeurs de la terre (si si si ! Même en Tchétchénie et au Grand Dûché du Luxembourg...) à juste titre, n'en doutons pas. Depuis, le Maître du thriller ésotérique est devenu bankable alors... Passons outre Harlan Coben et attardons-nous un petit peu sur les autres publications grand format ou poche :

    Grand format
    L'Évangile des ténèbres, de Jean-Luc Bizien (Le Toucan, "Toucan noir")
    Mémoires gelées, de Camilla Cedar (Jean-Claude Lattès)
    Sans un adieu, de Harlan Coben (Belfond, "Belfond noir")
    Le Valet de cœur, de Paul Colize (Krakoen, "Forcément noir")
    Les Anonymes, de Roger Jon Ellory (Sonatine)
    Tu ne te souviendras pas, de Sebastian Fitzek (Archipel)
    Le Cortège de la mort, d'Elizabeth George (Presses de la Cité, "Sang d'encre")
    Nocturne, de Martha Grimes (City)
    Les Disparus du Laogaï, de Michel Imbert (Le Rouergue)
    Nouméa mangrove, de Claudine Jacques (Au vent des îles, "Noir Pacifique")
    Crimes et sentiments, de René Le Gal (Nuits blanches, "Policier")
    Promenades en zone rouge, d'Alain Le Grand (Archipel)
    Mon lieutenant : roman rose et noir, de Philippe Lucas (La Compagnie littéraire-Brédys)
    Tu ne l'attraperas pas, de Jennifer McMahon (Belfond, "Belfond noir")
    Le Grand précipice, de Walter Mosley (Jacqueline Chambon)
    Petite sœur, mon amour, de Joyce Carol Oates (Philippe Rey)
    De soie et de sang, d'Anne Perry (10-18)
    Un monde sous surveillance, de Peter Temple (Rivages, "Thriller")
    Code 1879, de Dan Waddell (Le Rouergue)
    Djoliba, fleuve de sang, d'Alain Wagneur (Actes sud, "Actes noirs")
    La Terreur de vivre, de Urban Waite (Actes sud, "Actes noirs")

    Poche
    Un œil bleu pâle, de Louis Bayard (Pocket, "Best")
    Camping sauvage, d'Antoine Blocier (Krakoen, "Forcément noir")
    Le Trésor du toréro : une enquête à Perpignan, de Dani Boissé (Les Presses littéraires, "Crimes et Châtiments")
    Il ne faut pas vendre la peau de l'URSS, de Patrice Dard (Vauvenargues, "Les Aventures d'Alix Karol")
    Rictus, de Jean-Pierre Ferrière (Plon, "Noir rétro")
    Teddy est revenu, de Gilbert Gallerne (City)
    Course-poursuite fatale, de Linda Howard (J'ai lu, "J'ai lu pour elle. Suspense")
    Brouillage, de Jón Hallur Stefánsson (Babel, "Noir")
    Les Fantôme du vieil hôtel, de Cornelius Lehane (Rivages, "Noir")
    Les Cathédrales du vide, de Henri Lœvenbruck (J'ai lu, "Thriller")
    Une intime obsession, d'Elizabeth McGregor (Archipoche)
    L'Énigme du second prince, d'Ingrid J. Parker (10-18, "Grands détectives)
    Hécatombe mexicaine, de Don Pendleton (Vauvenargues, "L'Exécuteur")
    L'Œil de Diderot, de Hubert Prolongeau (Le Masque)
    Meurtres sur le Palatin, de Cristina Rodriguez (Le Masque, "Labyrinthes")
    Les Enquêtes de Mallory Russo 3, Acts of mercy, de Mariah Stewart (J'ai lu, "Frissons")
    Le Choix du mendiant, de Patricia Wentworth (10-18, "Grands détectives")
    Liens : Jean-Luc Bizien |Paul Colize |Patrice Dard |Martha Grimes |Henri Lœvenbruck |I. J. Parker |Anne Perry |Alain Wagneur |Elizabeth George

Le poids du passé

L'amitié est un sentiment très fort qui unit deux êtres d'un lien étrange et complexe. Elle peut grandir tout au long de la vie en se nourrissant des instants heureux mais aussi en se renforçant dans des moments plus délicats. Il arrive cependant que tout vole en éclats du jour au lendemain, sans véritable raison. Tout semble cassé à jamais et des amis intimes reprennent brutalement leurs distances pour s'ignorer du jour au lendemain et redevenir de parfaits inconnus. Meredith en a fait l'amer constat. Elle connaissait Jemina depuis l'enfance passée dans la région de New Forest dans le Hampshire. Grandissant ensemble, elles étaient devenues les meilleures amies du monde. Mais leur histoire a brutalement volé en éclats au moment où Jemina est tombée sous le charme d'un homme, Gordon Jossie. Meredith a tout de suite eu des doutes sur lui. Une impression confuse lui disait que son amie devait à tout prix se méfier de lui et ne pas lui accorder sa confiance. Mais l'amour a été le plus fort, Jemina n'a pas voulu l'écouter et a préféré couper les ponts brutalement.

Le temps est passé, mais les regrets de Meredith restent grands. Elle a décidé de renouer et profite de leur anniversaire commun pour tenter un rapprochement. Elle se lance dans la fabrication d'un gâteau au chocolat, fermement décidée à lui apporter en signe de message de paix. Sauf que Jemina n'est plus là, elle a tout quitté du jour au lendemain pour s'enfuir à Londres. C'est un nouveau choc pour Meredith qui ne comprend pas le brutal changement de comportement de son ancienne amie. Les réponses du frère de Jemina ne parviennent pas à la rassurer. Son départ précipité reste incompréhensible, un peu comme une fuite en avant en abandonnant tout son passé. Le mystérieux Gordon porte peut-être une part de responsabilité. Meredith ne peut s'empêcher d'avoir des doutes sur lui, d'autant plus qu'elle découvre, à la place, une autre femme vivant avec lui. Meredith décide de se lancer à la recherche de Jemina et de comprendre ce qui a pu la pousser à s'enfuir.

Pourtant Londres n'était peut-être pas le refuge idéal. Le corps ensanglanté de Jemina est découvert sur le sol d'une chapelle d'un cimetière. Une violente hémorragie semble être la cause de son décès, la conséquence directe de la blessure profonde sur sa gorge.
Il reste maintenant à découvrir les raisons de son assassinat. Le mobile, à première vue, n'est pas aussi simple que ça à mettre en évidence. C'est une inspectrice, Isabelle Ardery, qui va se charger de fouiller dans la vie de Jemina. Elle vient tout juste d'être nommée à ce poste, doit faire ses preuves et s'intégrer au sein d'une nouvelle équipe. Pour retrouver le meurtrier, elle va devoir comprendre la nouvelle vie londonienne de Jemina, résidente d'une pension de famille. Mais les réponses à toutes les questions sont peut-être cachées au cœur de New Forest. Isabelle Ardery, face à cette énigme complexe, va aller demander à l'aristocratique inspecteur Linley de reprendre du service et de lui prêter main forte. Il est encore très fragilisé par le décès de son épouse et voulait attendre encore un peu avant de retravailler. Ils forment un duo atypique, la nouvelle génération vive et déterminée accouplée au flegme et à la tradition aristocratique britannique.

Elizabeth George nous embarque dans une longue et méticuleuse enquête. Elle prend vraiment le temps de laisser son histoire s'installer en utilisant des descriptions détaillées. Elle campe parfaitement ses personnages, en dresse des portraits très précis afin de leur donner une vraie profondeur. Tous les protagonistes sont exploités pour leur donner une véritable carrure, une existence. Il en est de même pour l'enquête ressemblant à un vrai travail de fourmi. Toutes les pistes sont exploitées, rien n'est laissé de côté même si les efforts des policiers sont vains. Ce n'est pas une enquête menée à grande vitesse donnant l'impression que tous les indices sont placés là où il faut. Au contraire, Elizabeth George nous fait vivre minutieusement l'ensemble des recherches en nous faisant partager les convictions et les incertitudes des membres de l'équipe. Elle nous fait également rentrer dans leur intimité afin de mieux comprendre leurs personnalités. Toutes ces précisions peuvent être déterminantes pour comprendre les réactions diverses face aux avancés.

Afin de nous emmener doucement à la résolution du meurtre, elle place tout au long du roman de courts chapitres relatant les minutes d'un procès ancien concernant trois jeunes enfants ayant martyrisé un petit garçon enlevé dans une galerie marchande. C'est un fait divers absolument abominable commis par de jeunes êtres irresponsables dont il est très délicat de mesurer le degré de véritable culpabilité sans avoir un sentiment de gêne. Petit à petit, au fil des pages, le lien entre les deux affaires va se mettre en place. Les marques du passé vont ressurgir pour frapper le présent. Il n'y a pas non plus de parti pris dans l'écriture d'Elizabeth George, juste un fabuleux travail de narration au service de son énigme. Le nombre de pages peut rebuter au démarrage mais, une fois cet a priori passé, l'histoire se montre prenante et ne souffre pas de longueurs ou de passages volontairement délayés pour remplir. On pénètre pas à pas dans cet univers british, sans doute encore mieux dépeint par un regard extérieur à l'Angleterre car Elizabeth George est américaine. Cela lui permet de mieux saisir tous les affres de cette société anglaise coincée entre modernité et tradition pour en faire une sorte de roman à l'ancienne qui tire sa force dans chaque détail.

Citation

Il se rendit compte soudain qu'elle était la seule femme à se promener dans ce parc sans être accompagnée. Il en déduisit que l'endroit devait être dangereux, soupçon confirmé lorsque les hommes se retournèrent pour continuer à la regarder. Ils ne la suivirent pas, mais il savait qu'ils en avaient envie. Une femme solitaire, c'était soit une offrande pour un homme, soit une créature en manque de discipline.

Rédacteur: Fabien Maurice lundi 12 novembre 2012
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