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Réédition
Tout public
The Lost Patrol - 1934
Serge Bromberg (présentation)
Paris : Montparnasse, septembre 2003
Coll. "RKO", 19
Les Dix petits Anglais
La Patrouille perdue est considéré comme le meilleur film de l'année 1934. Surfant sur les dunes de la Mésopotamie en pleine Première Guerre mondiale, le film de John Ford n'est pas sans rappeler le combat mené par Lawrence d'Arabie (jamais nommé) avec des relents de colonialisme tels que prisés par Rudyard Kipling (qui est lui expressément nommé) sur la trame d'un roman de Philip McDonald avec des bribes autobiographiques. Dans La Patrouille perdue, John Ford met en scène quelques soldats britanniques aux prises avec des Arabes invisibles (ils n'apparaitront qu'à la toute fin du film, mettant un arrêt à la menace omniprésente que leur absence de l'écran reflète) qui ont tué leur officier, seul homme à savoir leur exacte destination.
Premier film de John Ford pour la RKO mais aussi première des douze collaborations entre le réalisateur et Victor McLaglen, magnifiquement épaulé par un Boris Karloff plus illuminé que jamais, il nous plonge dans un désert de sable où la petite troupe galère et avance à la queue leu leu tenant ses chevaux par la bride en direction d'une oasis abritant le vestige d'une mosquée et surtout un point d'eau et des dattiers. Ces soldats vont un à un se faire éliminer - parfois de façon ridicule - par des tueurs arabes isolés. John Ford filme alors la folie et la détresse qui s'emparent de ces hommes débraillés et démobilisés en attente d'une colonne salvatrice qui tarde à venir à leur rencontre.
En à peine plus d'une heure, tourné dans une unité de lieu qui s'assortit de l'absence encore plus remarquée des femmes, John Ford, qui n'est pas effrayé par certaines incohérences scénaristiques - un seul soldat fait le guet la nuit ; un avion arrive à atterrir entre des dunes hostiles -, et qui réussit à faire du Paradis terrestre selon la Bible un véritable Enfer sartrien - doit-on répéter à satiété que décidément "L'Enfer c'est les autres" ? - réalise un petit chef d'œuvre de film de guerre. Boris Karloff est monstrueux en personnage dostoïevskien, et Victor McLaglen se mue en Rambo des nouveaux temps - il faut le voir aller à la rencontre des Arabes tenant entre ses mains une mitrailleuse récupérée sur la carcasse d'un avion, la rage au ventre et la haine aux yeux - pour faire de ce film psychologique de guerre une décalque d'un film d'horreur en maison close où un à un les protagonistes courent vers une mort certaine.
La Patrouille perdue : 66 min. réalisé par John Ford d'après un scénario de Dudley Nichols & Garrett Fort adapté du roman Patrol de Philip MacDonald. Avec Victor McLaglen, Boris Karloff, Wallace Ford, Reginald Denny, J. M. Kerrigan, Alan Hale, Brandon Hurst...
Citation
Ce à quoi je crois ? Ça vous intéresse ? En un tas de choses... Un bon cheval, un bon bifteck, des rognons en sauce... En un certain George Brown, à la stupidité de cette guerre... Je crois qu'il faut être soûl pour être courageux et courageux pour être soûl. Je crois à la beauté de l'océan, à la saveur du vin, à l'attirance des femmes, à l'indicible joie de tuer des ennemis, à l'odeur de l'encens et du bacon, à la vigueur d'une poing, à des vieilles savates, aux maux de dents...