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La Grande bouffe
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Réédition
Tout public
La crème du crime
Philippe Noiret, Jean Rochefort, Jean-Pierre Cassel et Jacques Balutin qui donnent la réplique en anglais dans le texte à Jacqueline Bisset, et dirigés par Ted Kotcheff, le réalisateur de Rambo, dans une comédie policière où l'on assassine et assaisonne de grands chefs européens, ça intrigue forcément. Justement, l'intrigue, elle, est savoureuse et se joue des canons du genre : un critique fin gourmet dans un corps monstrueux a fait paraître dans un grand magazine gastronomique le repas idéal composé, de l'entrée au dessert, par quatre grands chefs. Ce repas a même été proposé à la Reine d'Angleterre. Seulement voilà, peu de temps après, le premier est assassiné de la manière dont il prépare son meilleur plat, bientôt suivi du deuxième puis du troisième selon le même mode opératoire. Natasha O'Brian (Jacqueline Bisset ex-femme trahie et totalement ingénue) qui a réalisé le gâteau s'inquiète et on la comprend. Les coupables sont nombreux, et les polices d'Europe sur les dents.
Il faut ajouter un industriel américain qui entend promouvoir la mal-bouffe, ancien mari de Natasha qu'il a trompée avec la secrétaire, des chefs de second plan (dont Jean Rochefort qui propose un simulacre d'assassinat en chambre froide) qui sont jaloux de la menace qui pèse sur leurs valeureux confrères, et d'autres personnages de seconds rôles coriaces à souhaits qui se fondent admirablement dans le scénario. Robert Morley, dont on apprend dans l'entretien avec Ted Kotcheff, qu'ensemble ils ont réalisé des publicités pour la télévision jouissives qui ont eu un énorme retentissement, est formidable dans son rôle de critique tyrannique engoncé dans un statut bourgeois anglais victorien loin de sa personnalité de socialiste convaincu manifestant contre l'Apartheid. Il impose à cette histoire son physique à faire frémir le moindre diététicien et surtout sa verve britannique avec un humour pince-sans-rire anglais. Les dialogues sont cruellement jouissifs, et la brochette d'acteurs - dont nombre font preuve d'un joli accent français - est au diapason. L'éclairage naturel des grandes salles de restauration et les scènes de cuisine grandioses ajoutent à cette comédie réalisée de main de maître par un Ted Kotcheff inspiré, bien loin des cadrages sages de New York Unité Spéciale. La fin, elle est digne d'un film noir, assez proche de celle d'Un cadavre au dessert, avec en point d'ogre (!) un suicide pantagruélique qui aurait fait plaisir à Rabelais et à Marco Ferrari. Un régal !
La Grande cuisine ou l'art et la manière d'assaisonner les chefs (108 min.) : réalisé par Ted Kotcheff sur un scénario de Peter Stone. Avec : George Segal, Jacqueline Bisset, Robert Morley, Philippe Noiret, Jean Rochefort, Jean-Pierre Cassel, Jacques Balutin...
Bonus. "Le Cinéma gastronomique de Ted Kotcheff : les 100 recettes de La Grande cuisine" (2011 - 60 min.) par Robert Fischer.
Citation
- Mais enfin, je donne aux gens ce qu'ils veulent !
- Pas du tout. Vous leur donnez du nitrate, du phosphate et du glutamate de sodium. Vous empoisonnez l'ouvrier.