Passés par la case prison

L'hôpital l'impressionnait toujours. Il cogitait sur ce lieu à la fois de vie et de mort. Lieu magique où le pouvoir était détenu par les médecins et sans doute quelques directions.
Patrice Borjon - Le Primitif
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vendredi 29 mars

Contenu

Essai - Policier

Passés par la case prison

Prison MAJ mardi 30 juin 2015

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 17 €

Observatoire international des prisons
Avec la collaboration de Nancy Huston, Virginie Despentes, Mohamed Kacimi, Gérard Mordillat, Olivier Brunhes, Philippe Claudel, Marie Darrieussecq & Pierre Lemaitre
Préface de Robert Badinter
Dorothy-Shoes (illustrateur)
Philippe Castetbon (illustrateur)
Paris : La Découverte, décembre 2014
222 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-7071-8328-6
Coll. "Hors collection Social"

Actualités

  • 28/03 Librairie: Deux rencontres "Polar" à La Machine à lire (33)
    La Machine à lire ne remonte malheureusement pas le temps, mais le Diable sait que la plupart des protagonistes des deux ouvrages qui vont être prochainement présentés dans la librairie bordelaise le souhaiteraient ! Le romancier américain Jake Hinkson est l'un de ceux choisis par les éditions Gallmeister pour lancer la nouvelle collection classieuse "Néo Noir". Son Enfer de Church Street est bien écrit avec un personnage retors et faussement naïf qui se raconte le temps d'un périple en voiture. L'histoire ne manque pas d'originalité, et le rendu nous permet de découvrir un "chasseur" pathétique qui a beaucoup à voir avec celui de La Nuit du chasseur. Et l'on pense à Robert Mitchum. Vous pourrez rencontrer Jake Hinkson le mardi 31 mars à partir de 18 h 30. À noter que Bernard Daguerre officiera comme maitre de cérémonie.
    Le 2 avril à 18 h 30 aura lieu la présentation de l'ouvrage collectif Passés par la case prison. Loin du Monopoly et de son ambiance ludique, cet ouvrage joue sur la notion de passé (de résilience ?) et est publié à La Découverte par l'Observatoire international des prisons. Outre une préface de Robert Badinter, le collectif héberge des auteurs de qualité. Jugez plutôt : Olivier Brunhes, Philippe Claudel, Marie Darrieusecq, Virginie Despentes, Nancy Huston, Mohamed Kacimi, Pierre Lemaitre et Gérard Mordillat. Pour l'occasion, seront présents Olivier Brunhes, Christophe de La Condamine et Gérard Mordillat. S'il y a bien un nom que vous ne devez pas connaitre, alors c'est celui de Christophe de La Condamine. Ex-détenu pour braquage, l'homme a été un temps bibliothécaire en prison, et a écrit Journal de taule (L'Harmattan, 2012). Notons que la rencontre sera animée par Christian Jacquot.

    La Machine à lire
    8, place du Parlement
    33000 Bordeaux
    Tél. : 05.56.48.03.87
    Fax : 05.56.48.16.83
    Liens : L'Enfer de Church Street |Virginie Despentes |Pierre Lemaitre

  • 02/01 Édition: Parutions de la semaine - 2 janvier

L'attente démolie

Huit anciens détenus racontent leur histoire. Deux photographes, des militants de l'Observatoire International des Prisons, huit écrivains les rencontrent, les écoutent et surtout dialoguent. Huit trajectoires banales – les délinquants nous ressemblent plus qu'on ne l'imagine. Huit vies brisées, frappées d'une double peine tant l'empreinte de la prison se fait prégnante, des années encore après l'avoir quittée. Huit témoins d'une société absurde, cruelle, vaine, qui, alors que la délinquance n'a cessé de diminuer en France depuis vingt ans, laisse croître vertigineusement les incarcérations. La plupart du temps pour des délits mineurs. La prison est-elle un lieu d'expiation ? Certainement, avec la souffrance jusqu'à plus soif ! Lieu immonde que ces prisons françaises épinglées année après année par l'UE, sans qu'aucune volonté politique ne se manifeste pour mettre fin à cette privation calculée de tous les droits humains, même les plus élémentaires, qui y est la règle. On le voit bien à lire ces témoignages, cette perte totale de l'intimité par exemple, qui grève la dignité des taulards et contamine la probité des mâtons.

Car la prison salie tout, et tout le monde autour d'elle. Outre l'attente absolue dans laquelle elle vous plonge, si irrésolue qu'elle referme par avance tout "après", c'est à la misère, la maladie, le suicide qu'elle ouvre. Véronique H. en témoigne, condamnée pour alcoolisme, les yeux battus quand elle reçoit Pierre Lemaître chez elle, dans cet univers de pauvreté tyrannique qu'elle a pourtant réussi à arracher à plus sordide encore : la rue. Le poêle à bois chuinte ses mauvaises cendres à côté d'eux, tandis que Véronique H. tente, en vain, de rassembler ses souvenirs : elle oublie tout. Toujours. Ne reste bientôt pour meubler ses silences qu'une bouteille d'orangeade posée sur la vieille toile cirée qui les sépare et quelques mots qu'elle peine à prononcer. Son dossier ? Il est vide. Pierre Lemaître l'a étudié. Rien. Pas même un accident, une menace pour autrui. Rien, sinon la misère, le chômage et la récidive : dans son cas, elle a cédé à la tentation de boire de trop pour oublier la vie qu'on lui a faite. Le juge a statué en deux minutes. Écrasant d'un coup de marteau leste le commis d'office chargé de (si peu) la défendre.

En prison, on envoie les pauvres (INSEE). Les SDF aussi désormais, les personnes fragiles, les précaires, les chômeurs. La prison française est devenue un immense asile de pauvres, tout comme une sorte d'hospice pour malades mentaux : plus de vingt pour cent des taulards y sont affectés de ces troubles que l'on soignait autrefois dans des hôpitaux. C'est ça la réalité de la prison française. 5,7 % de prisonniers pour homicides. 21,4 % de prévenus attendant leur jugement, 86,8 % de personnes relevant de la correctionnelle. Au total, en janvier 2015, 77 291 individus sous écrou, alors qu'on n'en comptait que 48 594 il y a douze ans... Une immense majorité de courtes peines, alors que toutes les études, dans le monde entier, ont montré que les courtes peines désocialisaient, brisaient à tout jamais, poussaient à la récidive. Mais non, nos politiques continuent de tenir le discours du laxisme de la Justice française, qui de son côté envoie en prison sans discernement tout ce qui passe sous sa main, à l'exception des crapules de la finance et ceux de la classe politique.

Entre 2000 et 2014, les peines inférieures à un an de prison ont été multipliées par deux ! Et dans le même temps, la délinquance ne cessait de décroître... Un véritable choix politique que cette répression aveugle qui frappe les classes populaires. "Matière de l'Humain", énonce Philippe Claudel, parlant de Christophe L., usé, dégraissé, raboté. Au couteau. La gueule cassée comme en 1914-1918. La prison a tout aspiré, ne reste, comme il l'écrit, qu'un être d'occasion. Peu glorieux, ce gâchis national. La prison aggrave les facteurs de délinquance recensés. Toutes les études, dans le monde entier, le démontrent, mais les politiques s'en fichent : ils soignent l'électorat d'extrême droite qui réclame toujours plus de sévérité. La prison met en réseau, vous octroie une identité de sous-citoyen dont vous ne pourrez plus sortir, mais la société s'en fiche. Des études ont montré que la courbe de la délinquance s'infléchissait après trente ans. Mais l'âge moyen des prisonniers français est de trente et un ans.

On aurait pu traiter autrement toute cette jeunesse jetée dans les bras de la récidive. Mais non. Des études ont prouvé que deux facteurs étaient essentiels à l'abandon de la délinquance : l'installation dans une vie à deux et l'obtention d'un emploi stable. Mais d'emplois stables, la société française ne veut plus en proposer. Ils en subissent de plein fouet les conséquences. Et cela se voit : les photos de Dorothy-Shoes et Philippe Castetbon laissent transpirer toute cette souffrance, tout ce gâchis, superbes, terribles, le commencement d'une terreur dont le nom est une infamie nationale.

Citation

L'idée, c'est d'avoir du mépris pour le crime, non pour les gens.

Rédacteur: Joël Jégouzo mardi 19 mai 2015
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