L'Infinie comédie

Depuis quelques années j'ai constaté chez moi un certain changement : faussé par le désir, plutôt que de juger, je voulais moi-même commettre un crime. Désir comparable, peut-être, à l'effort de l'artiste pour s'extérioriser...
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mardi 23 avril

Contenu

Roman - Noir

L'Infinie comédie

Anticipation - Géopolitique - Drogue - Complot MAJ mardi 15 décembre 2015

Note accordée au livre: 6 sur 5

Grand format
Inédit

Public connaisseur

Prix: 27,5 €

David Foster Wallace
Infinite Jest - 1996
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Francis Kerline, Charles Recoursé
Paris : L'Olivier, août 2015
1486 p. ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-87929-982-2

Actualités

  • 21/03 Festival: L'Escale du livre 2016 et ses noires habitudes
    Du 1er au 3 avril 2016 se déroulera la 14e édition de L'Escale du Livre à Bordeaux. Une manifestation littéraire d'ampleur en plein quartier Sainte Croix qui va errer ici et là vers les mauvais genres que nous affectionnons et pas seulement parce que la présence de Boualem Sansal est annoncée. On retrouve parmi les auteurs invités Ron Carlson, Étienne Davodeau, Erwan Larher, Thomas B. Reverdy, Santiago Roncagliolo et Dominique Sigaud sans compter les auteurs jeunesse que sont Malika Ferdjoukh et Thomas Scotto. La programmation très dense et de qualité (nous semble-t-il) propose une lecture de L'Infinie comédie, le roman dantesque de David Foster Wallace en clôture des représentations. Les éditions Gallmeister célèbreront leur dixième anniversaire en compagnie de Ron Carlson. Et le romancier Didier Daeninckx parlera poésie. Ce que c'est que la porosité des frontières des genres...

    Samedi 2 avril :
    - 14 heures : Didier Daeninckx à l'Agora (durée : 1 heure). Didier Daeninckx, dans Caché dans la maison des fous (Bruno Doucey), nous entraîne aux confins de la "normalité", là où surgit l'art brut et où la parole des "fous" garantit celle des poètes. Avec le soutien du MOTif, Observatoire du livre et de l'écrit.

    Dimanche 3 avril :
    - 8 h 30 : Lecture de clôture / L'Infinie comédie, de David Foster Wallace à la Salle Vauthier, TnBA (durée : 45 min.). L'Amérique, dans un futur proche. Les U.S.A., le Canada et le Mexique ont formé une fédération surpuissante, et la Société du Spectacle a gagné : les habitants ne vivent plus qu'à travers la télévision, les médicaments, l'ultra-consommation et le culte de l'excellence. Parmi eux, la famille Incandenza, avec les parents James et Avril et leurs trois fils. De dangereux séparatistes québécois, en lutte contre la fédération, traquent cette famille singulière pour mettre la main sur une arme redoutable : L'Infinie Comédie, une vidéo réalisée par James Incandenza, qui suscite chez ceux qui la regardent une addiction mortelle... Édité en France aux éditions de l'Olivier, L'Infinie comédie, texte prophétique de David Foster Wallace, est considéré comme l'un des cent meilleurs romans du XXe siècle. Il a également publié deux recueils de nouvelles ainsi que de courts essais sur la littérature, la musique, la télévision et le tennis. En 2008, il se suicide et laisse derrière lui un roman inachevé, Le Roi pâle, finaliste du prix Pulitzer. Lecture à deux voix avec Laurent Laffargue, comédien, metteur en scène de la Cie Le Soleil bleu, qu'il a créée en 1992 et la comédienne Céline Sallette, qui a notamment joué dans Géronimo de Tony Gatlif, dans La French de Cédric Jimenez et dans la série Les Revenants. Tarif unique : 5 €. Réservation indispensable : reservation@escaledulivre.com / 06.38 .26.94.69.15.
    - 14 heures : Rencontre James Kelman au Café Pompier (durée : 1 heure). Glasgow, dimanche matin, Sammy émerge de deux jours de beuverie sans aucuns souvenirs de ce qui a pu se passer. À la suite d'une altercation qui dégénère avec la police, il se retrouve aveugle mais ses soucis ne font que commencer. L'auteur plonge dans le flot de pensées de son protagoniste dans une expérience sensorielle déstabilisante. Si tard, il était si tard de James Kelman a reçu le Booker Prize 1994. Rencontre présentée par Marc Bertin, rédacteur en chef de Junkpage.
    - 16 h 30 : Les 10 ans des éditions Gallmeister avec la venue exceptionnelle de Ron Carlson au Salon littéraire (durée : 1 heure). Oliver Gallmeister, fondateur de cette toute jeune maison d'édition vient fêter ses dix ans et reviendra sur son parcours d'éditeur. Ron Carlson vient de publier son dernier ouvrage, Retour à Oakpine. Rencontre présentée par Marc Bertin, rédacteur en chef Junkpage.
    Liens : Ron Carlson |Didier Daeninckx |Malika Ferdjoukh |Erwan Larher

Voyage au centre de la folie

Écrit en 1996, il aura fallu attendre presque vingt ans pour que ce roman, entretemps élevé au rang de légende, soit enfin traduit en français. L'occasion de saluer le travail des deux traducteurs (Francis Kerline pour le corps même du roman et Charles Recoursé pour les notes) pour ce travail de titan.

L'Infinie comédie est un livre sur l'addiction, l'exclusion et la solitude. Tous autant qu'ils sont, les personnages sont en souffrance, en marge de ce monde qui les a exclus ou dont ils se sont exclus. Et au milieu coule le divertissement à travers un programme dont les spectateurs ne peuvent se défaire : une étrange vidéo qui ne doit pas tomber entre toutes les mains car ceux qui la regardent ne peuvent la quitter des yeux et finissent par mourir. Cette infinie comédie est le cœur du livre : certains veulent la détruire, d'autres la conquérir pour en faire une arme terroriste. Il faut dire que David Foster Wallace nous plonge dans un futur proche où les États-Unis, le Mexique et le Canada ne forment plus qu'un seul État contre lequel luttent des séparatistes québécois. L'auteur se concentre particulièrement sur un centre d'entraînement de jeunes tennismen, des associations d'alcooliques anonymes, un centre de désintoxication...
Parmi tous les personnages du roman, il semble qu'il n'y en ait pas un qui ne souffre pas de névrose, le genre de personnage sur lequel l'auteur aurait pu fixer le reste de l'édifice. Et c'est une sacrée gageure de bâtir un tel monument littéraire sur des bases aussi dingues. Il est en effet impossible de parler du livre sans évoquer tous ces personnages qui en font le sel : du tennisman qui joue tous ses matchs en braquant un flingue sur sa propre tempe en menaçant d'appuyer sur la gâchette s'il perd, le jeune joueur dont le front reste collé à la vitre après qu'il s'y soit malencontreusement appuyé un peu trop longtemps, celui qui passe son temps les yeux bandés persuadé qu'il arrivera à mieux sentir les coups de ses adversaires sans les voir, l'inspecteur du BSS (Bureau des services non spécifiques) obligé de se travestir pour mener son enquête...
Au sommet de la pyramide de ces personnages, la famille Incandenza, placée sous l'ombre omniprésente de James, surnommé Sois-même, suicidé en mettant sa tête dans un micro-ondes. Il est le fondateur de l'école de tennis et cinéaste expérimental qui ne fait jamais appel à des pros à l'exemption de ce comédien dont le plus grand rôle "fut celui de la Glande dansante dans une série de spots pour une chaîne de cliniques d'endocrinologie de la côte Est."

David Foster Wallace entremêle les histoires, les intrigues et les styles narratifs. Se plonger dans ce livre c'est accepter de ne pas le comprendre dès le début, de se demander où l'on va et où l'auteur nous amène, voire même de se poser la question : nous amène-t-il quelque part ? Certains y trouveront des longueurs, d'autres sauteront des passages et liront certaines pages en diagonale. Cette lecture est une expérience comme il nous est peu donné l'occasion d'en vivre. Le plaisir que l'on prend à s'y perdre (à la fois dans le corps du texte que dans les notes) est en soi une expérience de la drogue : on ne comprend pas très bien ce qu'il se passe, mais on doit admettre qu'on est dans un drôle d'état dans un drôle d'endroit qui a quelque chose à voir avec la jouissance. Bref, L'Infinie comédie fait définitivement partie de ces livres dont la lecture est une expérience en soi.

Citation

Il avait l'expression sinistre et affairée d'un type qui ramasse soigneusement des bris de verre sur la route après un accident ayant provoqué l'empalement de sa femme décapitée sur le volant.

Rédacteur: Gilles Marchand dimanche 29 novembre 2015
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