Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais par Stéphane Carn
Paris : Le Seuil, mai 2012
416 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-02-107591-5
Coll. "Policiers"
Flic et ripou
Chrissie Hynde chantait il a quelques années que la ligne (autrement dit le fil du rasoir) était mince entre l'amour et la haine. Depuis quelques décennies, les romanciers noirs anglais appliquent le même principe avec les forces de police. Côtoyer les malfrats de la pire espèce est peut-être le meilleur moyen de ne plus trop visualiser la ligne que l'on ne doit pas franchir.
Nick Belsey, policier à la brigade criminelle de Hampstead Heath est dans la panade la plus totale. Divorcé, il s'est endetté au delà du raisonnable et cherche à oublier ses déboires dans des cuites violentes. À ce titre, toute la longue scène d'ouverture où le policier se réveille après une jolie biture, et découvre qu'il vient de détruire un véhicule de fonction est rendue avec la force de quelqu'un qui connait de près les réveils alcoolisés.
Appelé pour enquêter sur la disparition d'un oligarque russe qui vivait reclus, Nick Belsey y voit l'occasion de refaire sa vie en pillant la maison du disparu. Mais en agissant ainsi, il se retrouve dans le collimateur de ceux qui ont fait disparaitre le Russe et il est alors contraint d'enquêter pour s'en sortir. Tout se complique lorsqu'il découvre le cadavre du Russe, qu'on lui tire dessus, et que tout son plan part dans les limbes... car, après tout, il n'est qu'un apprenti escroc dans un monde de requins.
Tout la force de Sur le fil du rasoir réside dans cette fuite en avant que le lecteur suit avec attention. Nick Belsey semble pris dans des marais mouvants. Chaque fois qu'il commet une action pour s'en sortir, il replonge au plus profond de la fange. Oscillant sans cesse entre sa grandeur de policier malgré tout et ses obligations de ripou pour s'en sortir, Nick Belsey est servi par un auteur qui ne juge jamais - on sent d'ailleurs qu'Oliver Harris a une certaine une tendresse pour son personnage -, et qui le regarde se démener comme un beau diable. En serrant son intrigue sur Londres, quasiment uniquement en intérieur, Oliver Harris renforce l'impression d'étouffement et de gangrène. Lorsque Nick Belsey pour les besoins de l'enquête va se trouver confronté à d'autres policiers, il découvrira que, finalement, il est assez honnête, dans son genre. Le final, sans le dévoiler, nous renvoie une dernière fois à une image de funambule, sans filet, avec Nick Belsey heureux errant ivre dans la nuit, aucun de ses problèmes n'étant résolus. Un désabusement profondément ancré dans la littérature noire.
Citation
Tu savais toi que les premiers coroners étaient envoyés sur les lieux de naufrage pour évaluer la part de la cargaison qui pouvait être récupérée par la Couronne ? Des pilleurs d'épave. C'était leur première mission.