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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Maxime Berrée
Paris : Inculte, mai 2021
300 p. ; 19 x 14 cm
Coll. "Noir"
Un été en queer
New York, 2017. Pendant un été caniculaire, Maggie Terry sort de désintox et s'apprête à commencer un nouveau travail dans une étude d'avocats. Pour l'ancienne flic du NYPD qui, à force d'abus de narcotiques et d'alcool a tout perdu, son travail, son épouse et leur fille, sa dignité même, cette place représente la dernière des dernières chances. L'assassinat d'une jeune comédienne sur laquelle elle doit enquêter pourrait être son retour à une vie normale... mais encore faudrait-il en être capable.
Essayiste, romancière et militante LGBT depuis le milieu des années 1980, Sarah Schulman n'est que peu connue en France, où seuls un essai et deux polars ont été traduits. Dans Maggie Terry, elle revient au roman pour un récit ramassé sur cinq jours dans une métropole assommée par les provocations de Trump. Récit, et pas enquête car, avec ce roman, la partie polar est réduite à la portion congrue : on suit Maggie dans ses innombrables réunions des AA, on la voit trébucher sans cesse sur ses addictions, rabâcher sa douleur d'avoir perdu sa compagne, sa fille et sa vie et, franchement, on se prend à espérer qu'elle replonge, juste pour rompre la lancinante routine qui s'installe page après page. Simple prétexte traité par dessus la jambe, le meurtre n'est clairement pas ce qui intéresse Sarah Schulman (et ce dès le prémisse plutôt absurde d'une enquête criminelle confiée à un cabinet d'avocats d'affaires), qui préfère disserter sur la gentrification de New York (un autre de ses chevaux de bataille en tant qu'essayiste), la dangerosité de Trump, les mouvements LGBT et queer et les violences policières. Entre de meilleures mains, et porté par des personnages vraiment incarnés, ce canevas aurait pu donner un récit puissant, noir et social à la fois. Mais dans Maggie Terry, il se limite à une suite de lieux communs politiquement corrects (oui, Trump est très méchant, oui, les gays ont les mêmes droits que les autres, oui, les drogués sont des personnes) où des personnages dégoulinant de bienveillance se pressent au comptoir pour affirmer haut et fort leur schématisme. Pourtant, s'il n'y a pas grand-chose à retenir de cette "intrigue" anémique, force est de reconnaître que l'auteure écrit plutôt bien, et que son style fluide rend par moments presque agréable cette balade dans un New York disparu, effacé par la bourgeoisie blanche. C'est déjà ça, mais ça ne suffit pas à en faire un roman à la hauteur de ses grandes ambitions.
Citation
C'est l'addiction qui avait fait voler en éclats quatre décennies de confiance en soi insouciante. Comme le lever du soleil, l'addiction est une réalité banale, prévisible, superflue et fiable. Et pourtant, il y a toujours des révélations.