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Courts récits de 1000 signes (50). Impossible de dormir. Il n'arrête pas de gigoter et de me parler. J'ai beau lui dire que je suis crevée et que je n'en peux plus, il continue de me harceler. Il répète sans cesse les mêmes choses. Il ressasse. J'essaie de lui échapper. Je me bouche les oreilles. Je le repousse. Il a beau prendre ses médicaments, ça ne le calme pas. Bien sûr, il est moins énervé, moins véhément que dans la journée, il ne me rabaisse pas, mais au moins, dans la journée, je ne reste pas à la maison. J'ai mon boulot. Je décompresse au travail. Depuis qu'il est retraité, il est infect avec tout le monde. Un rien le met hors de lui. Il se croit atteint de toutes les maladies, alors qu'il n'a que le cerveau de dérangé. À ses yeux, nos enfants qu'on voit de moins en moins sont tous des tarés, des minables. La vérité, c'est qu'ils ont tous un travail et qu'ils se débrouillent bien, sauf la cadette encore au lycée. Il ne supporte pas que sa fille ait un petit ami. Il est jaloux. Depuis qu'il le sait, ça l'obsède du soir au matin. Il me dit qu'il va enfiler une cagoule et tuer le petit copain avec un fusil qu'il ira chercher chez des amis de son ancienne femme. Sans vouloir être méchante, j'aimerais qu'il fasse cette connerie, sans blesser le gosse, mais qu'on le mette en prison. Je voudrais tellement avoir la paix dans mon lit.

Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.

Jan Thirion
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