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Les autres, autrement dit mon voisin, moi-même et tous les Richards qui ont la générosité de nourrir des parasites comme moi, nous nous pavanons sur de larges bancs de pierre garnis de coussins à glands, qu'ombragent des dais marqués des sceaux des familles les plus riches de l'île : Zackenberg-Alcméonide, Dusk-Pisistratide, Bates-Agiade, HUhan-Bouzyge, etc.
Jean-François Paillard - Heropolis
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jeudi 21 novembre

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Ma vie des autres (106)

Ma vie des autres (106) Courts récits de 1000 signes. 106 : la femme au lasso. Je bécote June. Je lui pelote un sein à la rambarde du pont des Catalans. Les mouettes s'en fichent, comme la femme qui s'arrête à proximité, un drôle de lasso au bras pour attraper les poissons du fleuve. On s'en fiche qu'ils s'en fichent. Nous, on a qu'une envie, c'est de se bécoter, même si June se montre plus passive que moi. L'arrivée de la femme la distrait. Elle rigole en douce. J'essaie de la remettre dans le bon chemin en glissant mes doigts sous la ceinture de son pantalon. D'autres gens passent sur la voie piétonne du pont, chacun dans sa bulle ou communicant avec un interlocuteur invisible. À mon tour, je suis gêné par le manège de la femme. Elle gâche notre relation amoureuse en restant si près. Je voudrais lui dire de partir. Elle noue à la rambarde la corde qu'elle a amenée. June repousse mes mains. Le mieux pour nous serait de changer de place. On pourrait aller à la Prairie des Filtres, au bord de l'eau, et se coucher sur le gazon. D'une manière surprenante, la femme se met la corde autour du cou et enjambe le parapet. June comme moi, nous poussons un cri qui accompagne la chute de la femme dans le vide. Je vois nettement le corps décapité et la tête se séparer, puis disparaître dans les flots saumâtres. La corde reste seule à pendouiller. Je dégueule sur l'épaule de June. Ensuite, il s'avère difficile de reprendre là où on en était.

Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.

Jan Thirion
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Par La Rédaction



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