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Ma vie des autres (183)
Courts récits de 1000 signes. 183 : Vatican plage. Je ne veux pas être pape. Je n'ai pas l'étoffe d'un chef. Je n'ai pas de charisme. Je ne suis qu'un humble pêcheur parmi les hommes. Ils se tournent vers moi parce qu'ils n'arrivent pas à choisir entre leurs deux meilleurs candidats. Chacun des deux rivaux serait un chef idéal pour notre Église, mais pour leur plus grand malheur et notre malheur à tous, ils sont deux, deux du même âge, avec un parcours similaire et des ambitions semblables dans leurs programmes. Dans la chapelle Sixteen où sont réunis les électeurs, leurs partisans sont du même nombre. Aucune majorité n'arrive à se dégager. Il n'y a pas de compromis possible. C'est donc vers moi que les regards se portent. Moi qui ne demande rien. Sinon à prier, prier, prier et surtout à avoir la paix. Je suis la cinquième roue de la charrette, l'ultime recours, disent-ils, afin que le Vatican ne sombre pas dans la bouffonnerie après des mois de tractations et de marchandages. Le pire, c'est que je suis incapable de dire non. Je vais être pape jusqu'à la fin de ma vie et je devrais porter un nom qui n'est pas le mien, moi qui espérais me retirer dans l'ermitage que j'ai créé dans un lagon de Zanzibar.
Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.
Jan Thirion
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