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jeudi 21 novembre

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Ma vie des autres (190)

Ma vie des autres (190) Courts récits de 1000 signes. 190 : teuf au bahut. J'ai l'air d'avoir un balai dans le cul avec mes talons hauts. C'est la première fois que je les mets. À chaque mouvement, j'ai peur de me casser la gueule. Je danse avec le prof de maths. Pas pu refuser. Je n'ai pas l'air con. Au moins, je me tiens à lui et je ne tombe pas. C'est une sale teigne qui n'arrête pas de gueuler pendant ses cours. Depuis le début du slow, il reste correct. Il garde la tête de biais et ne me balance pas dans les narines son haleine de vieux. Il n'en profite pas pour me tripoter. J'en connais d'autres qui n'hésiteraient pas. Dans ma robe longue de poufiasse, je me sens toute boudinée. C'est ma mère qui l'a faite. Les sixièmes se marrent en me voyant dans les bras de Médor qui n'aboie pas ce soir dans le réfectoire transformé en salle de bal. Pas de trigonométrie au programme de la fête de l'École. À la niche, Médor, à la niche, comme on dit à chacune de ses apparitions dans l'établissement. S'il ne m'avait pas invitée à danser, j'aurais continué à faire tapisserie. Mes copines de la troisième B ont toutes leur mec attitré. Malgré la tonne de maquillage et une coiffure qui me vaudrait le prix international du plus beau caniche, je reste moche. Je suis née moche. C'est comme ça. Il n'y a rien à dire. Je me suis entraînée à danser chez moi. Encore trois minutes à tourner, puis je retourne à mon trou, si j'arrive à ne pas tomber.

Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.

Jan Thirion
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Par La Rédaction



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