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Je me retiens de lui en coller une. C'est ça le monde du travail : côtoyer des gens que tu n'as pas choisi et te retenir de les trucider.
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jeudi 21 novembre

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Ma vie des autres (206)

Ma vie des autres (206) Courts récits de 1000 signes. 206 : un rien qui fait tout. Toute ma vie, j'ai eu du mal à accepter de n'être qu'un élément à peine perceptible perdu dans la multitude, autant dire invisible. Alors que j'ai un ego normal, j'ai de l'estime pour moi, heureusement, et je ne pense pas être interchangeable avec le premier venu. Je vaux plus qu'un zéro, mais me le répéter ne m'empêchait pas de me morfondre de ne susciter que de l'indifférence autour de moi, à me rendre malade. Se sentir inutile n'engendre que du désespoir et j'étais bien parti pour aller noyer mon chagrin dans le suicide, lorsque l'idée qui allait me sauver la mise m'est tombée dessus. Je savais qu'en nous sortant de l'anonymat, la célébrité était source de bonheur, et qu'est-ce qui distingue quelqu'un de célèbre du tout venant ? Qu'on l'admire ou qu'on le moque, il est imité. On le copie en permanence et on le parodie, on le caricature. Son image se répète ainsi à l'infini et on ne l'oublie jamais. On ne se lasse pas de sa présence. J'ai donc décidé de sauter une étape et d'aller directement à ce qui fait désormais de moi un homme heureux. Je m'imite. Je n'arrête pas de m'imiter. Je m'imite à la perfection. Du matin au soir, je donne une représentation de moi-même qui bluffe tellement les autres qu'ils ne s'en aperçoivent pas. La plupart du temps, je n'ai pas besoin d'y penser, tellement mes paroles et mes gestes sont naturels. Célèbre à mes yeux, je suis vraiment bien dans ma peau.

Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.

Jan Thirion
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Par La Rédaction



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