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Ma vie des autres (259)
Courts récits de 1000 signes. 259 : un matin presque normal. Jacotte et les enfants dorment encore. Même le chien ne bouge pas dehors. De la fenêtre de la cuisine j'aperçois son museau qui sort de sa niche. Il commence à faire jour et la journée promet d'être belle. J'attends sereinement les résultats de mes dernières analyses sanguines. Je vais mieux, je me sens bien, j'ai recommencé à reprendre mes activités habituelles. En buvant mon café sur le perron, je m'aperçois de la présence anormale d'un objet volumineux dans la pente gravillonnée qui mène au portail. Curieux de découvrir ce que c'est, je dévale l'escalier en chaussons. Tout d'abord, je pense à un bac à fleurs que Jacotte aurait déplacé, ou a un jouet des gosses, mais la forme rectangulaire de la chose ne me dit rien du tout. Je me retrouve devant une valise. Pixel vient me rejoindre. Il n'aboie pas, mais ne remue pas la queue, signe qu'il demeure sur ses gardes. Je ne comprends pas d'où vient cette valise. Je ne l'ai jamais vue. Elle ne nous appartient pas. Je n'ose pas l'ouvrir et j'hésite à la monter chez nous. Par-dessus le portail, je jette un coup d'œil dans la rue et j'ai un choc en constatant que devant chacune des cinq autres maisons du hameau est posée également une valise.
Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.
Jan Thirion
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