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Chabrol ou la dernière fugue
© Paul Maugendre
14 septembre 2010 -
Il était fort, Chabrol. Je sais c'est facile, et on a dû la lui faire à moult reprises. Mais il ne s'agit pas d'une ironie de ma part, mais d'un hommage à quelqu'un qui a marqué le cinéma, qui vivait pour son art, et pour les spectateurs et cinéphiles et non pour les critiques. Claude Chabrol, je ne l'ai vu en chair et en os qu'une fois, lors d'un festival polar à Grenoble en 1989 à moins que ce fut en 1987, mais j'en garde l'impression d'un homme affable. Nous avons échangé quelques mots, du genre "J'aime bien ce que vous faites" (fayot !) mais n'étant pas cinéphile, pas à l'aide à l'époque avec les célébrités sauf les auteurs de polars que j'avais déjà rencontrés à Reims, cela n'était pas allé plus loin. Et puis d'autres que moi étaient sur la brèche, attendant de pouvoir discuter avec le maître (ils avaient du grain à moudre, eux, et je les enviais !).
Mais Chabrol restait souriant sous l'avalanche populacière qui se pressait autour de lui, ses yeux cachés derrière ses grosses lunettes pétillaient de malice, de joie de vivre, d'ingénuité aussi, et avec des sourires qui n'étaient pas factices, il répondait aux moult sollicitations avec amabilité, pertinence, patience, n'hésitant pas à placer un bon mot, une rigolade, quelqu'un de naturel quoi, qui n'avait pas la grosse tête. Du moins c'est ce que j'ai éprouvé alors, et cette impression je la garde par devers moi, avec toutefois ce regret de ne pas avoir anticipé sur mes activités actuelles. Tenir un blog.
Mais oserais-je aujourd'hui l'aborder dans un salon, sauf si je suis accompagné par quelqu'un qui pourrait poser à ma place des questions pertinentes que j'enregistrerais fiévreusement. Pour moi qui ne suis pas cinéphile, je l'ai déjà écrit, Claude chabrol restera attaché à des œuvres adaptées de Simenon comme Betty ou encore Les Fantômes du Chapelier, à La Demoiselle d'honneur qui est l'adaptation de L'Analphabète de Ruth Rendell, mais surtout de Poulet au vinaigre et L'Inspecteur Lavardin d'après Dominique Roulet qui en a d'ailleurs cosigné les scénarios et offraient à Jean Poiret un rôle mettant en valeur son élégance, son ironie. Et puis que dire du Beau Serge, qui était devenue une blague, un collègue se prénommant ainsi, ou du Docteur Popaul, surnom qui me colla à la peau un certain temps.
D'autres écriront mieux que moi l'hommage rendu à Claude Chabrol, avec plus de chaleur, plus de grandiloquence, plus de trémolos dans la plume (il y en a qui sont payés pour rédiger les nécrologies), plus de sympathie, plus d'anecdotes, lui trouvant des qualités dont ils ne soupçonnaient pas l'existence de son vivant. Je n'apporte juste qu'une petite pierre à l'édifice, et peut-être n'est-elle même pas utile. Juste l'impression d'un passant lambda à qui l'on demande son avis afin de minimiser ou mettre en valeur les propos des spécialistes.
Au revoir Monsieur Chabrol, et comme tous les artistes, les écrivains, les peintres, les musiciens, votre œuvre vous survivra.
Paul Maugendre
Blog Mystère Jazz
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Par La Rédaction