Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
Frelon contre Chauve souris.
Si vous ne connaissez pas le réalisateur Michel Gondry, vous vous attendez probablement à voir une énième machinerie américaine bruyante qui surfera une fois de trop sur les superhéros Marvel et DC Comics. Mais l'on est surpris de découvrir ici un film hybride, empreint à la fois de la vision d'un authentique réalisateur de cinéma indépendant et des stigmates du film de genre.
À l'origine, The Green Hornet est un feuilleton radiophonique américain de 1936, ce qui marque à tout jamais le look de son héros et lui donne jusqu'à aujourd'hui encore l'aspect anachronique d'un justicier détective en costume trois-pièces, en chapeau de feutre avec le haut du visage simplement masqué d'un loup vert. Mais ce que l'on retient le plus de l'épopée du Frelon vert, outre son passage radiophonique originel, c'est la célèbre série télé jumelle de la série "Batman" dans les années 1960. Le seul intérêt de cette version télé kitchissime du Frelon vert est la présence de Bruce Lee dans le rôle de Kato, faire valoir, chauffeur et homme à tout faire du héros.
L'histoire transposée à notre époque par le film de Michel Gondry, est celle de Britt Reid (Seth Rogen), fils unique d'un richissime magnat de la presse. Enfant mal aimé par son père il grandit dans l'oisiveté et le luxe pour devenir un adulte capricieux et immature. Britt Reid se lie d'amitié avec Kato (Jay Chou), serviteur et chauffeur de la maison, alors même que son père vient de décéder. Ils forment alors ensemble un couple d'apprentis justiciers plus soucieux de jouer aux superhéros avec leurs coûteux gadgets que de rendre une justice impartiale ; le Frelon vert, alias Britt Reid, est né. Un tiers personnage, Lenore Case, interprété par Cameron Diaz, la sexy secrétaire particulière de Britt, tient le rôle de l'adulte responsable et, à son insu, celui du cerveau de la bande. La confirmation finale de son association à l'équipe de justiciers suggère comme il se doit un Green Hornet 2.
Mais le casting serait incomplet si l'on omettait de citer le super véhicule inhérent à tout superhéros, Black Beauty, la Batmobile du Frelon vert, voiture bourrée de gadgets bondesques et premier jouet grandeur nature de nos deux grands gamins justiciers. Force est de constater que, dès l'époque de ces séries télé, ces simples accessoires deviennent sous la forme de jouets mytiques (produits par les fabricants de jouets Corgy Toys ou Dinky Toys) les super ambassadeurs de ces histoires fantastiques auprès des enfants, et un véritable transport de nos souvenirs de jeux.
C'est en partie l'interprétation que fait le réalisateur Michel Gondry de ce super véhicule symbolique et la façon dont il traite généralement l'objet dans son film (autres exemples, la super machine à café de Kato, le pistolet du super vilain qu'on croirait sorti d'une pochette surprise) qui font la différence avec les autres productions du genre.
Bande annonce de The Green Hornet
Christophe Nolan avec son Batman Begins (2004) s'efforce de tirer l'histoire d'origine vers un monde réaliste et adulte. La Batmobile des année 1960 perd ses atouts ludiques pour devenir un véhicule militaire amélioré. Michel Gondry ramène notre regard à la hauteur de nos yeux d'enfant en multipliant les symboles liés à la thématique du jouet.
Ce n'est pas un hasard si l'ouverture de son film nous montre le héros en culotte courte tenant dans les mains une poupée de Superman. On retrouve tout au long de The Green Hornet ce rapport ludique à l'objet et une volonté de nous immerger dans le monde de l'enfance.
La volonté du réalisateur, qui traduit toutes les situations de cette histoire par le jeu et l'absurde, va toujours dans ce sens, à l'instar de ses deux protagonistes qui par leurs comportements immatures refusent d'entrer dans le monde des adultes. Pour preuve, la scène de dispute entre Britt Reid et Kato, un hommage en abime rendu au film de Blake Edwards, Quand la panthère rose s'emmêle - le serviteur de l'inspecteur Clouseau ne s'appelle-t-il pas Kato ?
Malgré la présence des stigmates incontournables du genre, budgets et acteurs de studio, cascades et effets spéciaux, le film ne trahit pas la sensibilité du réalisateur.
Comme ses personnages de Soyez sympas rembobinez (2007), on a l'impression pour notre plus grand plaisir, que Gondry revisite un film plus par le prisme de ses souvenirs que par la volonté de restituer l'exact original. Le réalisateur se retrouve finalement dans la même position que les deux protagonistes de The Green Hornet, soit à jouer au Frelon vert avec ses jouets même si ici la Corgy Toy est grandeur nature et a coûté quatre-vingt-dix millions de dollars (budget du film, source IMDb).
Fidèle aux personnages de sa filmographie et en particulier à ceux de La Science des rêves (2006), Michel Gondry nous offre avec cette nouvelle version du Frelon vert, son regard d'adulte qui ne veut pas grandir. On regrette tout de même, une fois de plus, l'utilisation artificielle de la 3D, efficace uniquement sur le très graphique générique du film.
The Green Hornet : 117 min. Avec Seth Rogen, Cameron Diaz, Jay Chou...
Citation
On a foutu en l'air notre potentiel. La ville a besoin de nous. On a l'étoffe de héros !