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Opération opium
Grand format
Réédition
Tout public
Cannabis radioactif
Opération opium est un film qui doit sortir de l'anonymat dans lequel il est plongé depuis 1966 car on a bien affaire à un chef d'œuvre improbable. Parce que ce film est une commande de l'Onu après une manifestation de jeunes aux cheveux longs fumant des joints à New York au pied de ses locaux. L'idée est avant tout éducative : montrer à ces jeunes écervelés d'où vient le cannabis qu'ils fument avec tous les travers du trafic.
Six téléfilms dans six pays différents vont alors être montés (dont un avec Peter Sellers en Grande-Bretagne). Dans le cas d'Opération opium, le scénario est confié au père littéraire de James Bond, Ian Fleming, et la réalisation à celui qui l'a porté à l'écran pour la première fois, Terence Yong. C'est à ce moment que jaillit l'idée à la fois géniale et coulant de source : faisons-en un film plutôt qu'un téléfilm. Et le casting est à la hauteur ! Yul Brynner et Eli Wallach ou la rencontre entre un salopard et un truand. Au milieu, Rita Hayworth et Trini Lopez (qui chante deux titres dans le film dont bien sûr "La Bamba"). Surprenant ? Attendez ! Vous n'avez pas tout vu ! Stephen Boyd, Marcello Mastroianni, Omar Sharif (aux costumes irréprochables), Grace Kelly... On touche à l'insaisissable. S'y rajoutent Charles Millot (le docteur Hans Muller dans Les Barbouzes) et Harold Sakata (le chinois lanceur du chapeau tueur dans Goldfinger). La liste est bien trop longue. Yul Brynner rapportera à ce sujet que c'est un casting à vingt millions de dollars. Mais c'est aussi une pléiade d'acteurs qui ont accepté de jouer gracieusement !
Bande annonce du film en VF :
L'intrigue est assez basique : deux inspecteurs de l'Onu pistent des trafiquants d'opium depuis l'Iran jusqu'à la France en passant par l'Italie et Monaco, pour mieux saisir les différents rouages. L'occasion de voir le visage déformé de Hugh Griffith en chef de tribu scandalisé par la trahison de ses acheteurs potentiels au motif qu'ils l'ont floué en achetant son opium au rabais. D'aller dans le palais du Shah d'Iran qui a mis également sa garde personnelle au service de Terence Young pour les besoins du film. Les inspecteurs de l'Onu irradient l'opium et suivent sa route à l'aide de compteurs Geiger (avec toute l'importance qui lui est donnée en cette année 1966, ce qui confère à la radioactivité un éclairage somme toute... abstrait !). Les rebondissements s'accumulent dans un film policier léger (les agents jouent leur destinée à "Pierre, papier, ciseaux") aux dialogues décalés et mordants ("Garçon, suivez cet ascenseur") en usant des canons du genre (veuve imaginaire éplorée et itinérante, femmes fatales, chausse-trapes, parties de cache-cache, trahisons, leurres, combat de catch féminin) avec aussi des retours à la réalité d'une noirceur étonnante, et l'utilisation des moyens de transport propices à des huis-clos angoissants (train et bateau).
"La durée de vie d'un homme dépend de ses affaires", nous assène-t-on en plein milieu du film. Et l'on touche ici au discours pro-Onusien d'un film moral où se mêlent des images détonantes dont la plus forte reste assurément celle où l'un des deux héros du film meurt bien avant la fin pour mieux nous plonger dans un récit de campagne anti-drogue réaliste. Un film remarquable, étonnant, qui ressort aujourd'hui de la cave où il était caché. Et c'est franchement tant mieux !
Opération opium, 96 min. réalisé par Terence Young sur une idée originale de Ian Fleming avec E.G. Marshall, Trevor Howard, Stephen Boyd , Yul Brynner, Eli Wallach, Angie Dickinson, Georges Géret, Hugh Griffith, Jack Hawkins, Rita Hayworth, Senta Berger, Trini Lopez, Marcello Mastroianni, Amedeo Nazzari, Jean-Claude Pascal, Anthony Quayle, Gilbert Roland, Omar Sharif...
Bonus. "Opération Onu", 16 min. avec Philippe Lombard. Bande annonce.
Citation
La durée de vie d'un homme dépend de ses affaires.