Le Jardin du diable

Après vérification, les policiers ont dû s'incliner. Sans connaître parfaitement l'œuvre de Brecht, ils conviennent avec lui qu'on n'oppose rien de sérieux à la vérité, du moins pas éternellement.
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jeudi 21 novembre

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Roman - Policier

Le Jardin du diable

Historique - Faits divers MAJ vendredi 23 décembre 2011

Note accordée au livre: 3 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 21,5 €

Ace Atkins
Devil's Garden - 2009
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Christophe Mercier
Paris : Le Masque, janvier 2011
458 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-7024-3465-9
Coll. "Grands formats"

Actualités

  • 12/05 Radio: Bandits, bandits... et autres romans
    La mise en ligne de l'épisode 13 de la saison 11 des Ondes Noires (autrement écrit, celui du 4 mai 2011) nous donne l'occasion de reparler de "l'émission polar la plus rock de la bande FM" qui, pour n'avoir plus été mentionnée ici depuis quelque temps n'en a pas moins continué de rouler ses noirs tumultes entre les oreilles de ses fidèle auditeurs. Fort heureusement, les différents épisodes d'une saison sont réunis à la file sur la même page web, aussi sera-t-il facile aux internautes de combler les silences de k-libre et d'écouter à leur guise toutes les émissions diffusées - et téléchargeables.
    Dans leur treizième épisode donc - dédié à François Chassagnite, trompettiste de jazz récemment disparu - Jacques et Corinne, infatigables Noir'rôdeurs, nous offrent un numéro "tout chroniques" avec, pour pauses musicales, "Météores" de Giovanni Ceccarelli et "The Whale Has Swallow Me" de Hugh Laurie.
    Quelques mots sur l'émission
    Les deux livres mis à l'honneur dans la première partie de l'émission ont en commun d'avoir pour personnage principal un bandit. Et ces deux livres sont, chacun à sa façon, des "outsiders". Le premier parce qu'il ramène sous les feux de l'actualité un texte écrit en 1837. C'est rien moins que le premier roman d'un certain... Alexandre Dumas, publié d'abord en feuilleton et qui était demeuré inédit sous sa forme romanesque depuis une centaine d'années. C'est à l'éditeur La Fosse aux ours que l'on doit cette judicieuse exhumation - un travail éditorial salué par Jacques qui, au passage, conseille de lire la préface... comme une postface car son auteur y dévoile la totalité de l'intrigue. Mais comme elle contient par ailleurs de précieuses informations il serait dommage de l'ignorer.
    Le second ouvrage, pour lequel Corinne a craqué - L'Homme à la carabine de Patrick Pécherot - est atypique par sa forme. S'il est bien question de la vie d'un brigand anarchiste du début du XXe siècle il serait, nous dit Corinne, injuste de désigner ce livre comme une biographie. C'est véritablement un roman, avec tout ce que cela suppose de savoir-faire narratif et de savoir-écrire. D'ailleurs, précise-t-elle encore, le livre est publié dans la collection "Blanche" gallimardienne, et non dans la "Série noire".
    La seconde partie de l'émission offre un petit florilège de trois romans, des coups de c&oelih;ur sans thème semble-t-il. Le troisième volet des enquêtes de Walt Longmire (le héros créé par le romancier américain Craig Johnson), L'Indien blanc en français, a été perçu par Corinne comme "une belle déclaration d'amour au genre humain". Pour incliner au noir elle doit aimer rire car elle s'est beaucoup amusée du dernier polar de Nadine Monfils, Les Vacances d'un serial killer, et donne furieusement envie de s'amuser à son tour de l'odyssée des Destrooper, que Corinne rebaptise "les Dupont-Lajoie belges". Jacques quant à lui attire l'attention sur un roman signé Ace Atkins, Le Jardin du Diable en français, qui a la particularité de mêler très habilement fiction et réalité dans une intrigue où l'accusé est le comédien Fatty Arbuckle, et l'enquêteur... un Dashiell Hammett qui n'est pas encore romancier.

    Liste des livres chroniqués
    - Patrick Bruno d'Alexandre Dumas (La Fosse aux ours)
    - L'Homme à la carabine de Patrick Pécherot (Gallimard)
    - L'Indien blanc de Craig Johnson (traduit par Sophie Aslanidès - Gallmeister)
    - Le Jardin du diable, d'Ace Atkins (traduit par Christophe Mercier - Le Masque)
    - Les Vacances d'un serial killer de Nadine Monfils (Belfond)
    Liens : L'Indien blanc |Craig Johnson |Nadine Monfils |Patrick Pécherot |Ace Atkins |La Noir'Rôde

Scénario d'un coup monté

Début des années 1920 sur la côte Ouest des États-Unis, Hollywood est déjà le cœur du cinéma mondial. Ce n'est pas encore l'ère des méga superproductions aux budgets faramineux et aux effets spéciaux délirants. Le septième art va pourtant bientôt connaitre l'apogée du cinéma muet. Les actrices campent des femmes fatales aux gestes maniérés et au maquillage sophistiqué, les hommes incarnent des séducteurs ténébreux ou des personnages tragi-comiques aux physiques particuliers.

Roscoe Arbuckle est un acteur adulé par le public. Son allure obèse et son visage de gros poupon y sont pour beaucoup. Si on ajoute toute la palette de ses facéties burlesques, Roscoe, surnommé Fatty en raison de sa silhouette toute en rondeur, fait partie des stars que l'on qualifierait aujourd'hui de bankable. Au plus fort de son succès il organise à San Francisco une grande soirée dans un hôtel. Les invités sont nombreux, des amis plus ou moins proches, des apprenties comédiennes rêvant de décrocher un premier rôle ; la liste est longue pour être de la fête. L'ambiance s'envole au son de la musique ou sans doute un peu aussi grâce aux nombreuses bouteilles d'alcool interdit car la prohibition est déjà en place. Cette soirée aurait pu rester simplement un bon moment de plaisir dans la vie facile et aisée de Roscoe. Malheureusement un incident va faire brutalement basculer sa carrière des pages cinéma des journaux à celles des faits divers. Une jeune femme va être retrouvée en sale état dans une chambre. Elle est dénudée, un brin hystérique et raconte que Fatty aurait abusé d'elle en la violant avec un objet incongru. L'affaire n'est déjà pas brillante mais elle va encore empirer après le décès de la jeune femme trois jours après. Roscoe, lors de ses assauts sexuels, lui aurait écrasé la vessie à cause de son surpoids. Le scandale lancé, Fatty se retrouve vite au banc des accusés face à l'indignation de ses anciens admirateurs. Il est mis en pâture par la presse qui semble vouloir s'acharner sur lui plus que nécessaire.
Un détective va tenter de démêler le vrai du faux dans cette étrange affaire. Il va recueillir un maximum de témoignages relevant au passage un certain nombre de contradictions, de révélations trafiquées comme par exemple l'autopsie qui semble avoir été pratiquée n'importe comment. Ce privé est pour le moment encore un inconnu. Il travaille pour l'agence réputée Parkinton. Quelques années plus tard il sera un des pionniers du roman noir, changeant au passage son prénom pour devenir le célèbre écrivain Dashiell Hammett.

Le Jardin du diable est tiré de faits réels, ceux relatifs à la chute irrémédiable de Roscoe Arbuckle. C'est une bonne reconstitution du monde incroyable du cinéma du début du vingtième siècle dans une Amérique fascinante mais empêtrée dans ses paradoxes, ses contradictions. Vu de l'extérieur le milieu cinématographique fait rêver tant qu'on ne regarde pas l'envers du décor pour y découvrir le règne de la corruption avec comme leitmotiv le gain d'argent. Cela montre également la dure réalité de la célébrité qui, déjà à l'époque, place des personnes au firmament pour mieux les piétiner l'instant d'après. Dans Le Jardin du diable le coup monté est donné comme une évidence dès le premier chapitre, quelqu'un a voulu la chute de Roscoe. Ace Atkins explore bien toutes les pistes et décortique minutieusement ce mauvais scénario ayant servi à faire plonger cette figure illustre du cinéma muet. Le bémol est que, même si la reconstitution est brillante et très documentée, on demeure juste peut-être un spectateur certes privilégié mais sans en retirer vraiment beaucoup d'émotions et sans voir non plus un sentiment d'attachement grandir pour ce malheureux Fatty pourtant plongé en pleine déconfiture.

Citation

- Peut-être que c'est un type qui sait se tenir, dit Sam. C'est ce que je pense des gens qui ne dénoncent pas leurs amis.
- Et moi, vous savez comment j'appelle un type qui se ficelle lui-même le cul sur la chaise électrique ?
- Dites-le-moi, je vous prie.
- Un imbécile.

Rédacteur: Fabien Maurice lundi 19 décembre 2011
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