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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (Irlande) par Jacques Martinache
Paris : Presses de la Cité, avril 2013
494 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-258-10107-4
Coll. "Sang d'encre"
Convois d'anges dangereux
On commence à connaître le style Connolly, ce mélange du polar le plus noir et de fantastique, de violence extrême et de poésie. Le point de départ rappelle Un plan simple : deux chasseurs tombent sur un avion écrasé en pleine forêt sans personne alentour - pas la moindre trace de pilote ou de passagers. Il n'y a qu'une mallette pleine d'argent, qu'ils s'approprient aussitôt. Sauf que ce n'est pas l'argent qui compte, mais une mystérieuse liste de noms, tous liés à des morts violentes. Et de vieilles connaissances de Charlie Parker, qui a vent de cette histoire par hasard, sont en quête de la liste : le Collectionneur, exécuteur des basses œuvres d'une puissance supérieure, et Brightwell, l'ange déchu qui, bien que tué par Parker, n'est pas tout à fait mort. On le voit, la liste est avant tout un "McGuffin" cher à Alfred Hitchcock autour duquel s'articule tout un jeu de massacre parfois proche de l'horreur pure.
Et c'est là que le lecteur a intérêt à être attentif ! D'abord, il vaut mieux bien connaître l'œuvre de John Connolly pour s'y retrouver, tant il lui arrive de limiter l'exposition des nombreux personnages récurrents et des centrales d'énergie qui s'en servent de bras armé : il faut bien suivre qui est qui et à quelle époque par rapport à l'action ! Les connaisseurs de l'auteur balaieront d'un revers de la main ces considérations, mais les nouveaux venus risquent d'être largués. De plus, à force de céder à l'allusif, John Connolly n'échappe parfois pas au procédé un peu facile pour pimenter le tout (de nombreuses fois, les personnages sentent une "présence maléfique" qui ne se matérialise jamais). Le tout jusqu'à une conclusion un brin précipitée par rapport à ce qui l'y a amenée, avec quelques légères invraisemblances, mais ménageant un passage d'épouvante pure digne d'un film d'angoisse japonais. Comme toujours, là où Connolly excelle, c'est dans le style à la fois "dur à cuire" et littéraire, et cette atmosphère pesante au fantastique diffus, que ce soit pour décrire la grande ville ou la forêt où se passe une partie de l'action. Un sentiment de malaise sous-jacent et de corruption lente qui se permet des traits d'humour bien sentis (la visite à un "bar à nichons" particulièrement déprimant...). Précisons également que la traduction de Jacques Martinache est irréprochable - surtout que rendre le style de John Connolly ne doit pas être évident ! Et espérons que l'auteur, qui a fini par imposer sa voix si particulière, parviendra à se renouveler...
Citation
Comme tant d'autres qui proclamaient leur 'respect de la vie', Tate ne respectait que la vie recroquevillée dans le ventre d'une femme. Si elle sortait de ce ventre et commettait plus tard un crime, il était tout à fait justifié de l'éliminer avec une seringue.