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Grand format
Inédit
Tout public
524 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-7436-2726-3
Coll. "Thriller"
Actualités
- 19/07 Prix littéraire: Finalistes 2015 des Balais d'or
- 04/07 Librairie: Sélections de l'été 2015 de la librairie Compagnie
- 12/06 Prix littéraire: Sélections 2015 des Trophées 813
- 22/05 Édition: Parutions de la semaine - 22 mai
- 27/11 Prix littéraire: Les 20 meilleurs livres de 2014 selon Lire
Mercredi 26 novembre, au Grand Palais, le magazine Lire délivrait son palmarès des ouvrages de l'année selon des genres et des catégories nombreuses, hétérociltes et quelque peu oublieuses. Si l'on peut se réjouir du Meilleur livre attribué au Royaume, d'Emmanuel Carrère, tant le roman a fait parler de lui et tant il a su se faire oublier à son corps défendant des grands prix littéraires, on peut avoir des avis circonspects sur la nomenclature. Pourquoi différencier polar et roman noir, et décerner le premier à un roman noir et le second à un roman qui ne l'est pas ? Pourquoi deux catégories pour la littérature policière et aucune pour les littératures de l'imaginaire ? Et l'on pourra toujours regretter que la jeunesse se trouve restreinte aux romans (quand on voit la quantité de très beaux albums), et que les beaux livres se retrouvent hors compétition. Quoi qu'il en soit, les lauréats et nombre de finalistes sont très k-librés, de la révélation étrangère avec Le Fils, de Philipp Meyer, au récit pour Tristesse de la nuit, d'Éric Vuillard, en passant la biographie (Fouché : les silences de la pieuvre, d'Émmanuel de Waresquiel) et l'enquête (Extra pure : voyage dans l'économie de la cocaïne, de Roberto Saviano).
Palmarès :
Meilleur livre :
Lauréat : Le Royaume, d'Emmanuel Carrère (P.O.L.).
Meilleur roman étranger :
Lauréat : Et rien d'autre, de James Salter (L'Olivier).
Finalistes : Les Réputations, de Juan Gabriel Vásquez (Le Seuil) & Le Chardonneret, de Donna Tartt (Plon).
Meilleur roman français :
Lauréats : Réparer les vivants, de Maylis de Kerangal (Vertical) & L'Amour et les forêts, d'Éric Reinhardt (Galimard).
Finalistes : La Petite communiste qui ne souriait jamais, de Lola Lafon (Actes Sud) & En finir avec Eddy Bellegueule, d'Édouard Louis (Le Seuil).
Révélation étrangère :
Lauréat : Le Fils, de Philipp Meyer (Albin Michel).
Finalistes : Entre les jours, d'Andrew Porter (L'Olivier) & Le Tabac Tresniek, de Robert Seethaler (Sabine Wespieser).
Révélation française :
Lauréat : Les Rands, de Sylvain Prudhomme (Gallimard).
Finalistes : Si le froid est rude, d'Olivier Benyahya & La Condition pavillonnaire, de Sophie Divry (Noir sur Blancc/Notabilia).
Premier roman français :
Lauréat : Debout-payé, de Gauz (Le Nouvel Attila).
Finalistes : Dans le jardin de l'ogre, de Leïla Slimani (Gallimard) et Tram 83, de Fiston Mwanza Mujila (Métailié).
Premier roman étranger :
Lauréat : Notre quelque part, de Nii Ayikwei Parkes (Zulma).
Finalistes : Le Ravissement des innocents, de Taiye Selasi (Gallimard) & Le Complexe d'Éden Bellwether, de Benjamin Wood (Zulma).
Récit :
Lauréat : Tristesse de la terre, d'Éric Vuillard (Actes Sud).
Finalistes : Le Météorologue, d'Olivier Rolin (Le Seuil) & Amour de pierre, de Grazyna Jagielska (Les Équateurs).
Polar :
Lauréat : Après la guerre, de Hervé Le Corre (Rivages).
Finalistes : Ombres et Soleil, de Dominique Sylvain (Viviane Hamy) & Un vent de cendres, de Sandrine Collette (Denoël).
Roman noir :
Lauréat : Une terre d'ombre, de Ron Rash (Le Seuil).
Finalistes : 911, de Shannon Burke (Sonatine) & Ne reste que la violence, de Malcolm Mackay (Liana Levi).
Enquête :
Lauréat : Extra pure : voyage dans l'économie de la cocaïne, de Roberto Saviano (Gallimard).
Finalistes : Smart : enquête sur les Internets, de Frédéric Martel (Stock) & Une si jolie petite fille, de Gitta Sereny (Plein Jour).
Biographie :
Lauréat : Fouché : les silences de la pieuvre, d'Émmanuel de Waresquiel (Tallandier/Fayard).
Finalistes : Jules Ferry, de Mona Ozouf (Gallimard) & Notre Chanel, de Jean Lebrun (Bleu autour).
Histoire :
Lauréat : Le Feu aux poudres : qui a déclenché la guerre en 1914 ?, de Gerd Krumeich (Belin).
Finalistes : La Chute de Rome, de Bryan Ward-Perkins (Alma) & Dictionnaire amoureux de la Résistance, de Gilles Perrault (Plon/Fayard).
Autobiographie :
Lauréat : Et dans l'éternité je ne m'ennuierai pas, de Paul Veyne (Albin Michel).
Finalistes : Un homme amoureux, de Karl Ove Knausgaard (Denoël) & Les Feux de Saint-Elme, de Daniel Cordier (Gallimard).
Sciences :
Lauréat : Le Code de la conscience, de Stanislas Dehaene (Odile Jacob).
Finalistes : Plaidoyer pour la forêt tropicale, de Francis Hallé (Actes Sud) & Pasteur et Koch, de Annick Perrot & Maxime Schwartz (Odile Jacob).
Voyage :
Lauréat : Les Oies des neiges, de William Fiennes (Hoëbeke).
Finalistes : Pô, le roman d'un fleuve, de Paolo Rumiz (Hoëbeke) & L'Oural en plein cœur, d'Astrid Wendlandt (Albin Michel).
Bande dessinée :
Lauréat : La Technique du périnée, de Ruppert & Mulot (Dupuis/Aire Libre).
Finalistes : L'Arabe du futur, de Riad Sattouf (Allary Editions) & Moi, assassin, d'Antonio Altarriba & Keko (Denoël Graphic).
Jeunesse :
Lauréat : Adam et Thomas, d'Aharon Appelfeld (L'École des loisirs).
Finalistes : Humains, de Matt Haig (Hélium) & Le Livre de Perle, de Timothée de Fombelle (Gallimard jeunesse).
Livre audio :
Lauréat : Éloge de l'ombre, de Junichirô Tanizaki, lu par Angelin Preljocaj (Naïve).
Finalistes : L'IInsoutenable légèreté de l'être, de Milan Kundera, lu par Raphaël Enthoven (Gallimard) & Une femme aimée, d'Andreï Makine, lu par Bertrand Suarez-Pazos (Thélème).
Liens : Moi, assassin |Tristesse de la terre : une histoire de Buffalo Bill Cody |Le Chardonneret |Un vent de cendres |Une terre d'ombre |911 |Une si jolie petite fille : les crimes de Mary Bell |Maylis de Kerangal |Hervé Le Corre |Dominique Sylvain |Ron Rash |Lire - 29/08 Prix littéraire: Sélection 2014 du Prix des lecteurs de Villeneuve lez Avignon
- 28/07 Prix littéraire: Sélection 2014 du Prix polar Michel Lebrun
- 28/05 Exposition: Günther Vicente - Hervé Le Corre
- 14/03 Édition: Parutions de la semaine - 14 mars
La glaire des guerres
Hervé Le Corre est un romancier discret qui prend le temps d'écrire ses romans à un rythme quinquennal. La trame de ce nouveau récit repose sur un héritage douloureux, celui de la collaboration pendant la Seconde Guerre mondiale avec son lot de mesquineries (au mieux) et de trahisons (au pire). En filigranes, le rôle de la police, accusée souvent d'avoir fait qu'obéir aux ordres. Mais cette intrigue va bien plus loin que chercher les origines d'une vengeance dans les tréfonds d'un conflit abominable. Elle va également puiser dans les conflits qui ont suivi, de la guerre d'Indochine à celle d'Algérie (au sujet de laquelle de plus en plus de romanciers prennent la plume) afin d'amplifier un fond humaniste et sociétal. Et Hervé Le Corre de mettre en avant la bêtise humaine, cette incapacité que l'on peut avoir à se souvenir, en décrivant pendant cette guerre d'Algérie qui a forcé beaucoup d'appelés à se murer dans un silence oppressant, des tortures et des massacres commis avant tout par des Français qui semblent avoir perdu de vue que ces mêmes tortures et massacres, ils en ont été victimes moins de vingt ans plus tôt...
Comme souvent chez l'auteur, l'action se déroule principalement à Bordeaux, une préfecture tenue par le tristement célèbre Papon pendant la Seconde Guerre mondiale. Le commissaire Darlac s'en est sorti indemne malgré ses exactions. Ce flic pourri a bouffé à tous les râteliers n'écoutant qu'un ventre lubrique et envieux. Il a trahi ses meilleurs amis, vendu ses ennemis et fait tuer plus que de raison. Mais dans les années 1950, il va croiser Daniel, un jeune idéaliste amoureux de la vie et d'une jolie fille. Un jeune qui a perdu ses parents pendant la guerre, déportés dans des camps, lui ne se sauvant que parce que sa mère l'a fait monter sur les toits où il a attendu de longues heures que l'on vienne le chercher, de la pisse plein le pantalon. Pour l'heure Daniel travaille dans un garage comme apprenti mécanicien en attendant que la guerre d'Algérie l'appelle. Mais c'est bel et bien son père qui débarque avec une moto. Un père qu'évidemment il ne reconnait pas et qui lui cache ses émotions et son identité. Car le père a une mission : se venger de ceux qui ont tué sa femme et cru l'assassiner par procuration nazie. Mais il se doit également de reconquérir l'estime de tous ceux qui l'ont connus. Il faut bien le dire, le portrait de cet homme que dresse Hervé Le Corre n'est pas non plus glorieux : dandy nocturne des beaux quartiers, joueur invétéré qui cocufie sa femme chaque nuit et délaisse son enfant à peine né, flambeur aveugle sûr de ses relations avec la police pour passer à côté des rafles. Sauf que quand les relations ont pour nom Darlac, l'on se doit de se méfier ce que d'une assurance crasse il n'a pas fait. Alors ce père va se venger tout en renouant avec de vieilles connaissances que peu à peu il amadoue. L'étau va se resserrer autour de Darlac. Là encore le portrait n'est pas glorieux. Il est détaillé au vitriol. Darlac est une enflure de la pire espèce. Une enflure professionnelle qui ramène du boulot à la maison. Sa femme, il la viole quand il le veut, c'est-à-dire quand il rentre en colère et bourré, autant dire tous les jours. Elle, a son lot de petits secrets qui la rendent particulièrement émouvante à l'image des autres femmes du roman qui bien souvent sont des victimes.
Hervé Le Corre a le souci des descriptions fines et amplifiées, il aime à nouer de petites histoires à la grande Histoire. Il nous emmène dans une ville bourgeoise avec ses jolies rues qui plongent dans des ruelles plus sombres où des rades cachent une misère sociétale avinée. Qui a déjà été dans Bordeaux se remémore des sensations. Car la ville malgré les années et ce qu'elle a pu voir comme spectacle affligeant est d'une pierre éternelle. Avec Après la guerre (quel titre !), il nous plonge dans l'horreur des guerres à répétition où les victimes se transforment en bourreaux, où d'autres victimes deviennent juges. Mais il se permet également dans ce roman ambitieux où l'on sent que chacun des mots a été pesé puis soupesé avant que d'être employé de dépeindre une société jeune sure de son avenir, sure de faire changer les choses. Ces jeunes étudiants idéalistes qui pour certains décident de ne pas parti à la guerre parce qu'ils se sentent proches des Algériens, peuple oppressé. L'Algérie qui dresse est étonnamment chaleureuse et accueillante. Hervé Le Corre ne fait qu'effleurer la guerre d'Indochine. D'un côté, c'est tant mieux, car le roman fait déjà ses cinq cents pages bien tassées, d'un autre c'est dommage car l'on sent bien qu'il y avait une volonté de l'auteur de l'incorporer à son récit démonstratif. Il n'empêche que Après la guerre est un grand roman avec une bien jolie veine romanesque. Une épopée de gens ordinaires dans un demi-siècle étrange et fou, qui se pare d'une fin appréciée à défaut d'être appréciable. Souhaitons que Hervé Le Corre ne nous fera pas languir jusqu'en 2019 pour nous proposer son prochain récit...
Récompenses :
Prix Polar Michel Lebrun 2014
Prix Landerneau Polar 2014
Trophée 813 du roman francophone 2015
Nominations :
Prix Polar Michel Lebrun
Prix des lecteurs de Villeneuve lez Avignon 2014
Citation
Il ne sait pas bien s'il lui est arrivé quelque chose. Il sait que quelque chose lui manque et il sent ça là, au creux de son ventre, entre sternum et estomac. C'est là comme un trou. Une boule de vide. Des fois ça fait mal, ça se noue, c'est amer et alors il crache ou dégueule quelques glaires. La guerre. Il a peur, soudain. Mais il voudrait aller voir de quoi, en dépit de tout ce qui l'écœure.