Contenu
L'Homme de la loi
Grand format
Réédition
Tout public
Patrick Brion (présentation)
Paris : Sidonis, mai 2014
19 x 14 cm
Coll. "Western de légende"
Respect de la loi
Un soir, sept cow-boys avinés qui travaillent pour Vincent Bronson, un riche éleveur de la ville de Sabbath, tuent par mégarde un fermier dans une autre localité où ils étaient de passage. Le marshall Jered Maddox se lance à leur poursuite avec une idée bien précise de la justice. Inflexible, il n'est pas de ceux que l'on peut acheter, mais sait bien dans le même temps qu'il n'en est pas de même pour les juges. Maddox, c'est Burt Lancaster, grand fier et droit au regard pénétrant. C'est surtout un tireur émérite qui a beaucoup vécu et donc beaucoup tué en état de légitime défense. Et quand il débarque à Sabbath, seul un autre vieux shérif est à même de le comprendre, Cotton Ryan, autrement dit le très mesuré Robert Ryan aux cheveux plus que grisonnants, et trop fatigué pour ne pas se laisser acheter. Voilà donc une paire d'acteurs brillants qui donnent un relief particulier à la fois à ce western crépusculaire classique et au casting de choix puisque l'on dénombre quatre-cinq acteurs au jeu et au palmarès impressionnants plus quelques belles gueules pour jouer les seconds couteaux.
L'Homme de la loi, dirigé par Michael Winner alors quasi-débutant, est un très bon film au budget conséquent. Les dialogues sont précis et meurtriers, les plans sont propres et nets, la musique composée par Jerry Fielding accompagne joliment le tout avec ses plages de repos qui s'intercalent avec des tonalité dramatiques quand l'intensité devient angoissante. On est très loin de la série B. et pourtant le western est méconnu. Ce serait une erreur de passer à côté car le scénario particulièrement bien ficelé nous permet d'échapper au justicier qui élimine un à un les sept hommes qu'il est venu chercher. Il y a certes des coïncidences qui permettent à Maddox de retrouver un amour de jeunesse marié à l'un des hommes qu'il pourchasse, mais il y a surtout ce portrait très sombre d'un homme qui vient brouiller une vision manichéenne du genre en apportant une aura clair-obscur. Fataliste, Maddox sait que par fierté les hommes qu'il recherche ne se rendront pas. Il sait, en qualité d'as de la gâchette, que certains vont vouloir se mesurer à lui et donc mourir. Il comprend que la ville a besoin de justiciers pour faire régner l'ordre, mais que dans le même temps ses habitants le haïssent exactement parce qu'il est ce pour quoi il a été élu. La complexité des rapports et des sentiments est particulièrement bien mise en avant. Mais le film prend réellement un tournant dramatique lorsque vaincu moralement, Maddox décide de se retirer. Les faits ne se dérouleront pas comme prévu dans ce huis-clos urbain oppressant. Si tout se termine dans un bain de sang, l'un des tirs de Maddox s'avère être bien gratuit conduisant un père effondré au suicide (Lee J. Cobb, impeccable dans son rôle de ranchero désabusé devant l'avancée d'un nouveau monde). Anti-héros, aux antipodes du héros messianique cher au genre, le personnage de Burt Lancaster tourne le dos à l'horreur d'une réalité sordide crue, comme s'il refusait de se regarder en face. Le Grand Ouest américain est maintenant prêt à vivre de façon "civilisée".
L'Homme de la loi (99 min.) : réalisé par Michael Winner sur un scénario de Gerald Wilson. Avec : Burt Lancaster, Robert Duvall, Lee J. Cobb, Robert Ryan, Sheree North, Joseph Wiseman, Albert Salmi, Ralph Waite...
Bonus. Présentation de Patrick Brion. Documentaire sur Burt Lancaster (50 min.). Bande-annonce. Galerie photos.
Citation
- Marc était bon tireur.
- C'était une grande gueule qui croyait bon tireur. Entre les deux, il y a une tombe.