Contenu
Poche
Réédition
Tout public
Traduit du chinois par Marie-Claude Cantournet-Jacquet
Paris : Points, mai 2013
188 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-7578-3489-3
Coll. "Roman noir", 3047
Enfant du ciel
La Chine est un univers lointain, où l'on imagine des capitalistes débridés se mélangeant à une caste politique qui accepte toutes les déviations qui ne remettent pas en cause leur pouvoir. Lorsque des romans policiers arrivent de derrière la muraille de Chine, ils nous présentent souvent les problèmes que rencontrent les policiers qui doivent composer avec les puissants, et les contradictions d'un monde économique ouvert et d'un système politique plus fermé, avec au centre des contradictions, les classes moyennes.
Mais il existe, à côté de la société civile connue, des éléments à part, les voyous, le lumpen prolétariat chinois, ceux qui refusent de travailler mais veulent vivre sur la bête.
Dans ce premier roman de Ma Xiaoquan, l'homme de main Xialong a été déçu par la Chine. Ses parents ont disparu suite à l'une des trop nombreuses purges politiques que le régime a su mettre en musique, et il a été élevé par Grand-Mère. À la mort de cette dernière, tous ses projets de vie normale s'écroulent et il va choisir ce qui est la seule voie qui lui reste : le banditisme. Il n'a plus aucune morale, ni aucune fidélité. Il a une petite amie avec laquelle il est très lié, mais cela ne l'empêche pas d'avoir des amours de passage.
La description des gangs chinois est saisissante. Ils ressemblent à nos apaches du début du XXe siècle, se faufilant dans les interstices d'un parti omnipotent (après tout ils ne contestent pas le système politique et vivotent à l'écart des grands trafics aux mains des instances supérieures du pays). Ces parias se sont inventé un code d'honneur, un système militaire de partage des risques et des bénéfices. Xialong au fil du récit se constitue même une morale car s'il tue pour son clan, il respecte un code éthique qui lui est propre, et s'offusque lorsque ce sont d'honnêtes gens qui risquent de pâtir de ses actions.
Ma Xiaoquan signe là un premier roman court et dense, reconstruction de l'itinéraire d'un enfant du crime, d'un simple individu qui tente de survivre dans la jungle des villes, mais qui doit composer avec un système qui écrase avec indifférence. Les historiens du genre retrouveront là l'ambiance des textes (ou des films) des années 1930-1950 quand des écrivains comme André Héléna décrivaient avec soin et sympathie les petits truands parisiens, et ce n'est peut-être pas un hasard si la photo de l'auteur au dos du livre le présente avec casquette et chandail, comme un Maurice Biraud chinois. Les amateurs liront ces confessions qui nous parlent de la réalité chinoise, loin des usines à bas salaire, des intrigues de la cour du juge Ti ou des arrières pensées des descendants de Mao avec intérêt et délectation.
Citation
La vie est courte ; la mienne en particulier risque d'être encore plus courte.