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Toplar vs Topless
Dire de ce Supernichons contre mafia, qu'il est inclassable tient de l'euphémisme. Véritable film de série Z, voire Z', c'est un affreux pastiche qui mêle espionnage, trafic de drogue et seins affichés en dépit du bon sens, le tout en étant mal cadré avec deux mains gauches et monté avec ses pieds (et l'on vous passe la pauvreté des dialogues). Comme tout bon nanar, le voir une fois peut s'entendre, le voir deux sûrement pas. De là à l'imaginer comme un film culte il y a deux pas à franchir que je m'empresserai de retarder. Le titre anglais - Double Agent 73 - est de loin le plus intéressant car l'on comprend mieux le jeu de mot sur cet agent double féminin qui porte une paire de loches affolante (il faudra m'expliquer le pourquoi du comment du fantasme masculin des années 1970 sur les femmes aux très gros seins qui tombent et tombent mal gravité oblige). En revanche, il est regrettable de ne pas avoir joué sur sa durée - il fait soixante-neuf minutes ! - pour multiplier des scènes sexuelles à l'époque transgressives (on aura le doit simplement à des poitrines, des poitrines et des poitrines, voire à une embrassade sur la joue de deux jeunes femmes sages, bigre !).
Au début du film, on retrouve Jane Tennay (Chesty Morgan a jamais connu pour ses cent quatre-vingt-trois centimètres de tour de poitrine flasque) qui profite de vacances bien méritées au soleil et en collants noirs. Hélas pour elle, son patron des services secrets la rappelle car elle seule est à même de démasquer Toplar, le chef d'un gang de trafiquants de drogue. Le seul témoignage que l'on a provient des mots d'un agent en train de mourir : il porte une cicatrice. Voilà notre agent secrète sur une table d'opération non pas pour une liposuccion (qui serait bien esthétiquement compréhensible), mais pour l'implantation d'un appareil photographique dernier cri dans son sein gauche. L'atypique de la situation amène une foule de questions. Tout d'abord, l'implantation laisse une jolie cicatrice, les clichés sont effectués à partir d'une jolie pression de la main sur le sein (très gracieux, très distingué), mais on ne voit jamais l'objectif. Est-il sur le téton ? Nous ne le saurons jamais (elle aurait pu entamer une collection de photos fort intéressante). Ensuite, il y a la question de la pellicule. Elle semble infinie vue le nombre de clichés pris. A-t-on réellement pensé à tout ça chez le Q d'opérette qui a eu cette idée saugrenue ? Enfin, ce n'est guère pratique car dès que l'agent secrète se retrouve à vouloir prendre une photo, elle est obligée de se désaper. Et à la vue de son physique et de ses manières gauches, ce n'est pas chose aisée...
Les plus optimistes diront du scénario qu'il est minimaliste. Les plus objectifs s'indigneront de sa vacuité. Toujours est-il que - n'en déplaise à Serge Gainsbourg - seuls les téléphones sont en bakélite, et ils servent de fil conducteur à la recherche du vil mafieux. Jane Tennay remonte inlassablement une piste en multipliant les morts (c'est une adepte de la strangulation et des gadgets en tous genres qui en remontreraient à la moindre James Bond Girl) et en se pavanant tel un top model des années 1970 : ses nombreuses paires de chaussures, ses habits dépareillés qui sont une agression visuelle de première, ses déshabillés malheureusement lâches et transparents (sans oublier le maquillage de circonstance)... Autant de vintage qui ferait aujourd'hui fureur lors d'une unique soirée tendance. La femme (jugée fatale par ses rencontres masculines d'infortune) tombe évidemment amoureuse du mauvais numéro (l'épisode du documentaire animalier dans un zoo met alors en avant les "grandes" qualité de réalisatrice de Doris Wishman), mais elle sait mener à bien une mission et surtout se venger. Vous l'aurez compris, ce film se voit au débotté entre amis, et c'est à peu près tout. Au mieux, vous aurez apprécié l'hommage à Alfred Hitchcock et à Psychose : un tueur psychopathe armé d'un couteau trucide sous la douche la seule véritable beauté nue de ce film, qui ne fait qu'une apparition ténue. Le passage est plutôt bien réussi, et - il faudrait pour cela revoir le film du réalisateur américain pour s'en assurer - le pastiche est plutôt bien fait avec tous les plans intéressants. Comme quoi, ce Supernichons contre mafia peut bien cacher son jeu !
Supernichons contre mafia (69 min.), réalisé par Doris Wishman sur un scénario de Judy J. Kushner et Doris Wishman. Avec : Chesty Morgan, Saul Meth, Frank Silvano, Jill Harris...
Bonus. "Le Fabuleux destin de Doris Wishman", par Marc Toullec (23 min.). "Patrick Brion et Christophe Carrière contre Supernichons" 33 min.).
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Je me suis occupée d'elle, elle ne sera plus un problème.