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vendredi 22 novembre

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L’estru corsu du Polar corse : la granitula (IV).

MAJ vendredi 22 novembre

L’estru corsu du Polar corse : la granitula (IV).
© D. R.

11 mai 2009 - L'identité corse – et sa langue – est un processus. Le corse, croit-on savoir, est une langue qui n'a pas achevé son unité linguistique. Retour à Joyce. Entre l'irlandais moderne, l'anglais et le gaélique, quelle langue parle-t-il donc ? Celle dont son Ulysse garantit le procès, finalement. Une langue en procès. Pareil pour le corse et l'identité corse, dont rend parfaitement compte le rituel de la granitula, cette procession en spirale, "comme une vis sans fin qui ne fixe rien ou ne se fixe que sur son mouvement perpétuel", conclue Jean-Pierre Santini, entaillant dans le peuple corse la question de son identité comme une béance qui ne sera jamais refermée, qui ne peut pas se refermer, qui ne doit pas vouloir se refermer. Inconfortable ? Soit. Mais il y a dans ce mouvement quelque chose de proprement salutaire. Imaginez : cette procession en spirale qui s'enroule sur elle-même, puis se désenroule pour former un cercle qui se défait lentement, permettant à chacun de retourner à sa singularité. N'est-ce pas le mouvement même de toute langue et de toute identité ? Tout comme celui du récit policier, tournant en spirale autour du meurtre qui le fonde pour enrouler avec lui, avant de les dérouler, tous les protagonistes qu'un tel ballant engendre.

Avec Nimu, ce roman presque picaresque qui emprunte aux genres sans les enfermer dans leurs normes, Jean-Pierre Santini semble avoir écrit une sorte de roman de fin de siècle. De notre siècle. Prenant acte de ce que plus rien n'ait tenu dans ce qui fondait notre relation au monde ou à nous-même. Au centre de ce mouvement, le cadavre du monde. Ses valeurs, ses règles, ses usages. Tout cela mort. Défait. S'enroulant sur lui-même. S'accroupissant dans une posture fœtale. Il nous faudra bientôt dérouler à nouveau les peuples, les personnes, les langues. Et la littérature, pour que ça vive et non survive simplement. Car en fin de compte, qu'est-ce qui justifie l'écriture ?

La Corse édite donc. Selon un schéma connu : désertification rurale, migration vers les grands centres urbains. Ainsi, Ajaccio et Bastia, les métropoles, abritent-elles la quasi totalité des éditeurs actuels. Albiana, Alain Piazzola, DCL, Lettres Sud, La Marge (naguère du moins), Matina Latina, Mediterranea, Anima Corsa, Patrice Marzocchi. Ailleurs ? Rien, sinon les éditions Le Signet, établies à Corte, l'ancienne capitale historique, les éditions Colonna.

La Corse édite. Du noir. Beaucoup. Voyez l'entretien avec Jean-Paul Ceccaldi pour en être convaincu. Avec les éditions Albiana par exemple, qui travaillent une voix corse empreinte d'un blues magistral, ou avec la naissance de ce personnage, le flicorse, qui, mieux qu'aucun autre, porte en lui toute l'ambiguïté du débat corse. Ou bien encore avec les éditions Colonna (La Nuit s'achève), moins patrimoniales qu'il n'y paraît, défrichant, là encore, cette voix corse surprenante, ou bien enfin avec A Fiori di Carta, maison d'édition des plus singulières, œuvre de Jean-Pierre Santini, ouvrant magistralement à la poésie contemporaine. Alors ne formalisons rien : découvrons !
Liens : Jean-Paul Ceccaldi | Jean-Pierre Santini | La Nuit s'achève | Nimu | Tamo ! Samo ! | | 15 2009 Par Joël Jégouzo

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