Joblard : l'hygiène de la vermine

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Roman - Noir

Joblard : l'hygiène de la vermine

Humoristique - Social - Tueur en série MAJ mardi 12 mai 2015

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 17,5 €

Jean-Marc Royon
Marseille : Aaarg!, avril 2015
274 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-37031-022-4
Coll. "Canaille"

Et en route pour la joie...

Jean-Louis Neuheur a toujours décidé de ne jamais être un perdant comme son père : lui sera un ouinneur parti pour ze top, avec bien sûr des rêves de Staïtes où, forcément, son génie sera reconnu à sa très juste valeur. En attendant, avec l'aide de l'héritage paternel, il ouvre Rapid'zza, une pizzeria de République, juste en face de Pôle Emploi, réservoir de conquêtes féminines inévitables pour un ouinneur de son calibre. Seulement voilà, il y a les SDF qui campent dans le coin... Qu'à cela ne tienne, quelques pizzas empoisonnées en viendront bien à bout. C'est compter sans un clodo du nom de Joblard, toujours à stagner entre deux bistrots...
L'humour français, puisque celui-ci est différent pour chaque pays où l'on ne rit pas des mêmes choses, est toujours vivace - il suffit de voir l'œuvre du trop méconnu Philippe Colin-Olivier (et non, malgré l'affection que k-libre éprouve pour Nadine Monfils, nous ne la citeront pas, son humour étant définitivement imprégné de belgitude !). Jean-Marc Royon entre sans problème dans la tradition et peut sans démériter citer San-Antonio, même si sa série fait penser à l'également trop méconnu Brindezingue de Pascal Delahais. L'intrigue policière est certes simpliste, mais la vérité est ailleurs : surtout dans les personnages résolument actuels, de Joblard, le clodo (mais pas SDF), poivrot lunaire au désespoir tranquille pour qui chaque matin est le début d'un jour de plus en moins, et son contrepoint, ce beauf aux prétentions et à l'ego démesurés, évoquant un personnage de L'Appât de Bertrand Tavernier, finissant par devenir le plus improbable des tueurs en série — mais aussi par générer une certaine pitié face à l'humanité, certes décrépite, de ses ennemis et son propre nihilisme sous-jacent explosant dans un finale doux-amer : en cela, tout autant que Joblard et sa cour des miracles, il rejoint la figure emblématique du loser. Il y a également la langue, d'une truculence digne d'un Michel Audiard réincarné sans jamais forcer ses effets. Pourtant, comme dans la plupart des bonnes comédies, le fond est grave, voire déprimant, mais la suprême élégance n'est-elle pas de rire face à l'adversité ? C'est là, sur cette corde raide entre le noir absolu et la gaudriole, que le texte trouve son équilibre, là où moins talentueux ou moins sensible tomberaient à plat. Décidément, selon la phrase consacrée, ce roman devrait être remboursé par la sécurité sociale. Qui plus est, le livre en lui-même est un bel objet, bien fini, que l'on a plaisir à mettre dans sa bibliothèque — ou à offrir... Il fallait le dire !

Citation

Avec sa tête de moineau déplumé vissée sur sa poitrine d'anchois et ses cannes de serin, je me demande toujours comment il fait pour tenir en l'air. L'énergie du désespoir peut-être.

Rédacteur: Thomas Bauduret jeudi 07 mai 2015
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