Une plaie ouverte

Pour lui, K. Street n'était pas une rue banale et élégante de Washington, non, c'était un fleuve. Un fleuve qui prenait sa source dans ces immeubles à l'architecture massive et néo-classique et qui charriait une eau trouble, puissante et parfois dévastatrice. Celle du pouvoir. Ou plutôt de ce qui précédait le pouvoir : l'influence.
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Roman - Noir

Une plaie ouverte

Énigme - Complot - Artistique MAJ dimanche 13 septembre 2015

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 16,9 €

Patrick Pécherot
Paris : Gallimard, septembre 2015
270 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-07-014871-4
Coll. "Série noire"

Actualités

Paris surréaliste

Toutes les guerres civiles laissent des plaies ouvertes, et celles de la Commune ont eu du mal à cicatriser. Le roman de Patrick Pécherot plonge sans retenue dans un Paris tout juste remis du siège des Prussiens, mais en pleine insurrection. Il s'attarde sur une bande d'amis exaltés, mais absolument pas anonymes car ils ont pour noms Vallès, Verlaine et Courbet pour les plus connus d'entre eux, et Gill, Marceau, Manon et Dana pour les autres. C'est le Temps des cerises mais c'est aussi le temps des règlements de compte. Alors, rue Haxo, on massacre sans peine et sans joie des otages. Dana confondu comme l'un des terroristes assassins sera condamné par contumace. Il s'enfuira vraisemblablement aux États-Unis où il fera la connaissance d'une Calamity Jane ivrogne avec laquelle il tirera les quatre cents coups dans d'obscurs westerns, autant de premiers films d'un genre nouveau qui envahit le monde, l'ancien continent et la France d'un certain Pathé. C'est le visionnage d'un de ses films qui (re)mettra Marceau sur la piste de son compère. Pour le convaincre que l'acteur et Dana n'en font qu'un, il y aura ces petits détails qui tuent : l'acteur ne laisse par le caméraman filmer son visage, mais il a la silhouette reconnaissable. Patrick Pécherot nous embarque bien plus dans une quête que dans une enquête. D'ailleurs, sa résolution ne manque pas de semer le trouble comme si le lecteur avait lui-même ingéré du laudanum que l'auteur réserve à son personnage principal. Le premier chapitre est quasiment une fausse piste car il donne l'impression au lecteur d'embarquer dans un western. Puis on se retrouve dans une espèce de roman choral et l'on se dit que l'on va revoir la frimousse ravagée de Calamity Jane dans le Wild West Show de Bill Cody très rapidement. Et pourtant non. On plonge dans le Paris qui sied si bien à la plume du grand romancier français. Il sème la confusion à l'instar de celle qui est omniprésente encore des années après la Commune dans la Capitale. On a l'impression que Marceau, son héros démobilisé, est sans cesse en proie à des visions. Qu'il est exténué et exacerbé. Il traine sa carcasse et sa mauvaise santé. Il est surtout l'objet d'une curiosité malsaine de la police. Il cherche une réponse qui s'ingénie à lui échapper. L'œuvre de Patrick Pécherot est toute empreinte de surréalisme. Il aime cette époque Patrick Pécherot. Il aime ces gens - célèbres et anonymes. C'est un homme d'idées, un illuminé, un rêveur. C'est surtout une fine plume. Le roman, j'en veux pour preuve l'extrait choisi, est une longue poésie furieuse, une ode au voyage historique, un retour à une idéologie qui va aux confins de l'anarchisme. Il y a du Verlaine et du Rimbaud. Il y a surtout du Patrick Pécherot. Et c'est tant mieux...


On en parle : L'Indic n°23

Citation

Cette nuit-là, la laudanum fit voyager Marceau à bord de cargos interlopes. Le grincement des coques, le tumulte du vent, les appels des matelots, le chahut des flots, le ronflement des machines... Sa torpeur grondait d'un vacarme marin. Aspergé d'embruns, ses vêtements gorgés de flotte, il arpentait des ponts glissants, des dunettes détrempées. Il s'accrochait à des bastingages poisseux. Les vagues, brisées, mauvaises, lançaient des bouillons d'écume et des paquets de mer.

Rédacteur: Julien Védrenne vendredi 11 septembre 2015
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