Caïn Le premier meurtre

Jamais le palais du Luxembourg n'avait connu une telle effervescence. Habituées aux duels feutrés entre collègues, les sénateurs semblaient découvrir d'un coup la violence et la brutalité de la politique contemporaine. Depuis que la présidente du Sénat avait transformé les lieux en bastion de l'opposition, la fébrilité gagnait tous les bureaux, et plus particulièrement ceux du Petit Luxembourg.
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Roman - Insolite

Caïn Le premier meurtre

Social - Religieux - Vengeance MAJ mardi 03 novembre 2009

Note accordée au livre: 2 sur 5

Poche
Inédit

À partir de 10 ans

Prix: 5,25 €

Marie-Thérèse Davidson
Paris : Nathan, août 2009
116 p. ; Bibliographie - Lexique - 19 x 13 cm
ISBN 978-2092524206
Coll. "Histoire de la Bible", 1

"L’œil était dans la tombe et regardait Caïn" (Légende des siècles, 1859, Hugo Victor)

Caïn aide son père aux travaux des champs. Sur le retour, chargé de ses ballots, il tombe. "Tu n'es qu'un maladroit !" Dur au labeur, le fils aîné de la famille Adam ne peut trouver qu'injuste l'invective de son père. D'autant qu'à la maison, ses parents ne jurent que par le dernier né, Abel, l'enfant gracieux pourvu de tous les dons, objet de toutes les attentions. Plus tard Abel, l'adolescent affable, unanimement respecté et aimé, se voit très entouré des siens tandis que Caïn doit s'échiner, se battre contre la terre aride avant de prendre femme et d'être enfin autorisé à louer son Seigneur et seul Maître en lui confiant son offrande. Offrande rassemblée à la hâte quand Abel présente, lui, sa meilleure bête, prélevée avec un soin jaloux parmi les plus belles de son troupeau. Or voici que Dieu agrée l'offrande d'Abel mais pas celle de Caïn. Humilié, ce dernier finit par tuer son frère, dans un geste maladroit tout d'abord, porté presque par mégarde, avant de le redoubler d'une fureur soudaine, battant convulsivement à mort Abel. Fuir dès lors, pour n'avoir pas à reconnaître son crime. Loin. Et décisivement : en rompant avec son passé d'agriculteur pour créer la première ville, lieu farouche et menaçant, rupture radicale du monde post-édénique.
Marie-Thérèse Davidson, dans ce roman de la collection qu'elle dirige chez Nathan, a typiquement pris un parti daté dans le monde de l'interprétation biblique : celui des lectures du siècle des Lumières, faisant de Caïn la victime d'une économie du Salut injuste. Dans cette perspective, c'est Dieu le coupable. À la suite des Lumières et des lectures romantiques, tout le XXe siècle s'engouffrera dans cette perspective, réhabilitant Caïn pour en faire le type du mal-aimé. Ce faisant, on passe à côté de beaucoup d'autres lectures avec ce commentaire réducteur. On passe par exemple à côté de perspectives plus complexes sur la question de la violence, à ignorer que Caïn, nécessairement, se constitue par son geste comme rempart à la violence sociale. Ou bien des interprétations psychanalytiques analysant Abel comme le premier homme à avoir véritablement fait l'expérience de la violence nécessaire dans la séparation, quant Caïn est resté, lui, ancré, par sa jalousie et son désir d'appropriation dans un espace œdipien. Cela dit, le roman est accompagné d'un para-texte soigné qui ouvre à ses interrogations avec intelligence.

Citation

Il se bat contre la terre, puisqu'elle ne veut plus rien leur accorder.

Rédacteur: Joël Jégouzo dimanche 01 novembre 2009
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