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J'ai barré son nom avec le feutre, c'était réglé. Je me sentais bien. A chaque fois, ce serait comme ça, je me sentirais bien.
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Christophe Dupuis, l'éminence noire

Samedi 19 décembre 2009 - Christophe Dupuis est un touche-à-tout de la littérature noire et policière. Libraire, ancien directeur de collection, éphémère éditeur, créateur d'association et rédacteur en chef d'une revue qui vient de vivre son dernier numéro, celui que l'on peut qualifier après plus de dix années dévouées à une sombre cause d'éminence noire s'apprête à rebondir mais aucunement en endossant le costume d'écrivain Rencontre, donc, avec Christophe Dupuis...
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© D. R.



k-libre : Tu es un homme aux multiples casquettes aux multiples facettes. Comment es-tu tombé dans le roman noir ?
Christophe Dupuis : Eh bien tout simplement par mon père, passionné du genre qui me préparait des piles de livres quand j’allais en vacances chez lui.

Christophe Dupuis tend plutôt vers le roman noir que policier, non ? Et le polar historico-ésotérique ? Vers quoi tu ne tends vraiment pas ?
Pour faire simple, la planète polar est grande et chacun peut y trouver son compte (je n’aime pas toutes ces définitions – polar, roman noir, roman policier – personne n’arrive à en trouver une précise) et dans mes lectures, je suis assez éclectique… De Pagan à Tim Dorsey, par exemple. Je ne tends pas – facile à dire – vers la daube, qui emplit un joli chaudron à la librairie, par ailleurs…

De tes expériences, laquelle te laisse un souvenir particulier ? Ou, dans chacune de tes expériences, quel souvenir te marque ?
Je commence à vieillir, plein de choses me marquent, mon expérience chez Baleine, avoir créé et fait ce que sont la librairie et L’Ours polar (mais n’oublions pas que ce sont des œuvres collectives).
La librairie Entre-deux-Noirs a été créée le 1er avril 2000 (ça ne s’invente pas) – parrainée par JB Pouy – à Saint-Macaire (33). C’était un peu fou (ça l’est toujours) mais l’envie était là, alors allons-y. En janvier 2004 le magasin s’est déplacé à Langon (33), sous-préfecture de Gironde de six mille habitants cernée par une belle ceinture de grandes surfaces. J’ai d’abord repris une marbrerie funéraire (ça ne s’invente pas non plus) avant de me déplacer juste à côté. Aujourd’hui, le magasin fait environ cent mètres carrés avec une double spécificité "polar & jeunesse", la jeunesse étant gérée par Claire Couthenx. Ça fait dix ans que la librairie existe, dix ans qu’on ne vend que ce qu’on aime, qu’on ne s’emmerde pas à mettre de la daube en avant (on a un joli chaudron dans lequel on déverse quelques vilains titres), qu’on ne cherche pas à coller à l’actualité et qu’on se fait plaisir… on est pas plus riches que les autres, mais on fait ce qu’on veut, c’est déjà pas mal. On fait pas mal de rencontres (la dernière avec Gianni Pirozzi, une avec D.O.A. prévue en mars), une multitude de salons, on bosse avec les collectivités, on travaille sur le site internet, bref on ne s’ennuie pas…

Tu as été directeur de collection chez Baleine ("Instantanés de polar"), qu’en as-tu retiré ?
Une immense fortune, la chance d‘avoir rencontré Antoine de Kerversau et la publication de bons textes. Ça c’est pour la version courte, mais visiblement tu ne t’en contenteras pas.
Alors, chez Baleine, j’ai eu la chance de diriger la collection "Instantanés de polar". Ça s’est fait un peu par hasard et je remercie encore Antoine de Kerversau de m’avoir fait confiance. C’était la dernière période Baleine – celle où nous étions au Seuil – et tout n’a pas été facile (euphémisme). Ça m’a permis de voir le fonctionnement et les préoccupations d’une grosse boite (Le Seuil) et de découvrir ce qu’était le travail d’un directeur de collection – chose dont j’avais juste entendu parler avant. J’ai découvert plein de choses et je suis particulièrement fier d’avoir publié Backstage (et d’avoir retrouvé – grâce à Michel Embareck – de la trace de Luc baranger qui à ce moment là vivait au Vanuatu) et Aves Sotavento de Jacques Vettier, un superbe recueil de nouvelles noires. J’avais toute latitude pour publier les titres que je voulais, ADK et l’équipe ont un peu stressé au début car je refusais tout ce que je lisais, mais ensuite, pour la dizaine de titres, tout s’est bien passé. Il y a eu cette fête mémorable pour les quarante ans du Poulpe, bref de beaux souvenirs.

Tu vends la librairie, L’Ours polar (la revue) s’arrête. 2010, c’est un tournant pour toi ? Que va-t-il se passer ? Qu’est-ce que tu continues à faire autour du roman noir ? Tu comptes t’installer au calme dans une lamaserie ?
J’aimerais bien faire une retraite "Zen et arts martiaux" au Japon mais ce n’est pas à l’ordre du jour. Non, je vais juste essayer d’avoir un peu plus de temps pour voir ma fille et continuer, of course, dans le polar avec environ quatre mille projets : assurer des formations et animations, me lancer dans une thèse. J’ai des projets en cours d’essais avec un ami, des documentaires… Bref de quoi faire.
D’un autre côté, je vais peut-être rester libraire à quart de temps (à voir) et je viens de monter une petite structure d’accompagnement auprès des collectivités pour leurs projets d’accompagnement de la librairie indépendante (on est à un tournant crucial avec l’arrivée du numérique).

L’Ours polar s’arrête à son numéro 50. Peux-tu raconter l’histoire de cette revue ? Les scoops dont tu es fier ? Ceux ratés de peu mais qui laissent un goût amer ?
Oh là ! Ça serait long… disons que lorsque j’ai voulu commencer à chroniquer des livres, je ne savais où aller. J’ai croisé Claude Mesplède qui m’a proposé de prendre sa place pour un numéro de la Tête en Noir. J’étais honoré mais angoissé… J’ai envoyé mon texte et le papier a été accepté ; par la suite, Jean-Paul Guéry m’a proposé d’en écrire régulièrement, c’était parti. Mais je ne pouvais écrire que trois chroniques tous les deux mois, et j’en lisais beaucoup plus. Alors, avec femme et amis on a créé la revue, il y a eu plein de gens sympas autour de nous, de multiples collaborations qui en ont fait ce qu’elle est. Des scoops, non, mais disons la fierté d’avoir interviewé autant d’auteurs, d’avoir publié quelques planches de BD et d’avoir œuvré – avec notre faible diffusion – à faire connaître des auteurs pas forcément sous les feux de l’actualité.

Vas-tu continuer à chroniquer des romans ?
Yes !

Maintenant que tu ne fais plus rien (allez avouons-le, après toutes ces années d’hyperactivité, le fait même de ne travailler qu’à mi-temps comme disait Coluche – douze heures par jour – ressemble à de l’inactivité), vas-tu te mettre à écrire ?
Oh non, chacun son truc, moi j’en lis et j’en vends, ça suffit amplement.


Liens : Christophe Dupuis | L'Ours polar | L'Ours polar Propos recueillis par Julien Védrenne

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