Contenu
Poche
Réédition
Tout public
Traduit de l'anglais par Karine Lalechère
Paris : 10-18, janvier 2022
384 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-264-08015-8
Coll. "Domaine policier", 5771
Hurler en meute
Zalie est une jeune femme qui a été découverte morte. Deux inspecteurs, Gary et Ander, le narrateur, sont chargés de l'enquête. Les premiers indices les portent vers l'un des voisins de la victime. C'est un homme à la retraite, ancien professeur, qui mène une vie discrète, et est très érudit, ce qui le classe comme étrange par les habitants de son immeuble. Très vite, pour les chefs de la police, Monsieur Wolphram fait un coupable parfait et les enquêteurs pourraient ainsi clore le dossier. D'autant plus qu'une journaliste influente, Lynne, plus obnubilée par sa carrière que par la vérité, écrit des articles tendancieux, renforçant dans l'esprit du public ladite culpabilité du professeur. Mais Ander est un bon flic en cela qu'il doute. D'une part parce que les indices ne lui semblant pas probants et, d'autre part, parce qu'il a été dans l'école où enseignait le professeur. Une école stricte, old British fashion, où les châtiments corporels et les humiliations, voire les attouchements, étaient monnaie courante. Et il se souvient que Wolphram était un professeur bon, qui s'était plusieurs fois opposé aux agissements pervers du directeur-adjoint, un directeur qui, interrogé par Lynne, a laissé de nombreux sous-entendus évoquant là aussi la culpabilité du professeur. Gary, qui ne comprend pas au départ pourquoi Ander veut poursuivre l'enquête et se moque un peu des problèmes bourgeois d'éducation, va peu à peu se rapprocher de son collègue. En même temps, la rumeur autour de la culpabilité du professeur enfle.
L'ouvrage de Patrick McGuinness est conçu au départ comme un roman policier classique même si son titre renvoie surtout au pouvoir de la presse. Le titre original en anglais évoque des loups et, en France, depuis François Mitterrand, la presse est plus assimilée aux chiens. Mais le limiter à cet aspect (même si le final cynique est un grand moment) serait peu sympathique pour un roman qui joue sur une alternance forte : l'enquête actuelle avec ses avancées et ses atermoiements (jusqu'à la résolution finale), et les flashback concentrés sur l'école traditionnelle et le passé d'Anders. Du coup, le roman oscille entre cette description d'un monde actuel fort et violent et la mélancolie d'Ander, qui se rend compte qu'il a perdu le contact avec son passé et en souffre. Cette mélancolie contrebalance l'aspect strictement polar, mais ne l'annule pas, lui offrant au contraire une sorte d'écrin qui rend Jetez-moi aux chiens superbe et d'une nostalgie sentimentale, sans être sentimentaliste, pour constituer un livre plus qu'intéressant et qui mérite toute sa place dans notre bibliothèque.
Citation
Quand tu retournes dans le là-bas et l'alors, quand tu retournes sur le pont, tu penses qu'il faudrait quelques secondes et une vie entière pour atteindre le limon de l'estuaire, les grains frais et brillants aussi fins que ceux d'un sablier. Peut-être pourrais-tu en profiter pour faire quelques changements la seconde fois ? Faire des corrections.