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Trente-six chandelles
Avec Jeunesses de France, Mathieu Blard nous propose un premier roman qui s'intéresse à deux trajectoires similaires de deux jeunes couples qui vont finir par se percuter avec beaucoup de fracas et beaucoup de pertes.
Le premier s'appelle Bisbar. C'est un boxeur qui a eu le malheur de commettre un braquage et surtout de se faire prendre. Bilan : sept ans de prison et un retour timide à la vie ordinaire d'un plus tout jeune gars de banlieue avide de prendre sa revanche. Le second s'appelle Billy. Lui, ne boxe pas dans la même catégorie. C'est un journaliste tendance gauchiste, qui pleure un amour et des illusions perdus, et qui voit son avenir dans le mur. Dans le roman de Mathieu Blard, on se doute qu'ils vont être amenés à se croiser. Que ce sera à la toute fin et que ce sera explosif. Dans l'intervalle, les deux "Bi" vont mener une drôle de vie faite d'idéaux trahis et d'espérances vaines à travers des rencontres. Pour l'un et pour l'autre il y aura une nouvelle histoire d'amour du genre fusionnelle. Pour l'un, ce sera un amour de jeunesse, Jasmine. Pour l'autre ce sera une rencontre au sein d'un groupuscule identitaire, Julia. Mathieu Blard nous propose une intrigue mûrement réfléchie à la symétrie parfaite. Les trajectoires de ses deux héros, les initiales de leurs prénoms, celles de leurs copines, tout concorde, et l'on peut se poser la question de savoir si ce n'est pas inconscient. Mais il prend le contre-pied symétrique concernant le rôle de chacun dans le couple. Jasmine, c'est celle qui va sauver Bisbar, alors que Billy est celui qui peut faire renaître Julia. L'auteur fait preuve d'un joli style encore perfectible, mais déjà là. On peut juste lui reprocher l'abus du langage de banlieue au début de son intrigue qui va clairsemant à mesure qu'elle avance, un peu comme s'il n'avait pas repris son texte depuis le début une fois fini pour mieux se l'approprier. À partir de chapitres alternés au style propre on suit deux nouveaux chapitres dans la vie de Bisbar et de Billy. Bisbar ne veut pas répéter certaines erreurs de jeunesse, mais veut aussi s'en sortir. Il trouvera d'abord de l'aide auprès d'un chef de gang, puis reprendra du service dans une salle de boxe comme homme à tout faire avant d'entamer une série de combats qui devrait le mener au championnat de France. Billy se fait licencier de son journal et propose à un ami journaliste comme lui d'infiltrer un groupuscule d'extrême droite pour révéler leurs actions et comment ils fonctionnent de l'intérieur. Ce qu'il fait avec talent, un peu trop peut-être, un peu comme ces flics en immersion qui traversent une frontière et ont perdu tout sens d'orientation. Un premier roman prometteur sur des portraits singuliers et une chute que l'on espère ne jamais arriver.
Citation
Les jours suivants, Billy passe quasiment tout son temps avec les NI. Il joue le jeu, déblatère les bonnes conneries au bon moment, se rend sympathique, participe aux événements. Pour se rassurer du plaisir qu'il ne peut pas s'empêcher de prendre avec eux, il se dit que le jeu en vaut la chandelle. Il s'imagine être le représentant contemporain du gonzo journalisme, quelque part entre Hunter Thompson et Élise Lucet. Et chaque soir, il écrit pour garder la tête froide.