Wastburg

Il nous fixait d'un regard ouvertement hostile. Les chiens peu socialisés ont le même genre de regard, pensai-je. Ils n'aboient pas parce qu'ils sont en colère, mais parce qu'ils ont peur.
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Roman - Noir

Wastburg

Fantastique - Urbain - Procédure MAJ mercredi 14 septembre 2022

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Réédition

Tout public

Prix: 20,9 €

Cédric Ferrand
Lyon : ActuSF, mai 2022
474 p. ; illustrations en noir & blanc ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-37686-464-6
Coll. "Collector ActuSF"

Du rififi dans la fantasy

Construite à l'embouchure d'un fleuve entre deux royaumes, Wastburg n'appartient à personne, sauf peut-être aux majeers qui, du haut de leur tour, y font régner l'ordre à coups de sortilèges. Seulement voilà, ça fait un paquet d'années que les sorciers ont disparu et la magie avec eux, laissant la ville aux mains d'un burgmaester, en place depuis tellement longtemps qu'on a oublié qui était son prédécesseur. Et pour les gardes de Wastburg, aussi avides, corrompus, fainéants et pas bien futés que n'importe où, faire respecter la loi n'est pas une mince affaire. Surtout lorsqu'un kidnapping, un attentat, des complots, une grève et un racisme endémique viennent tout faire pour leur rendre la vie impossible...

Initialement paru aux Moutons électriques il y a plus de dix ans, Wastburg revient dans une superbe nouvelle édition augmentée chez ActuSF, ce qui n'est que justice car la cité de Wastburg, véritable héroïne de ce roman choral, fait partie des villes inoubliables de la fantasy, au côté de Lankhmar, Nouvelle-Crobuzon, Laelith ou Ciudula. Pour nous guider dans ses ruelles, ses places et ses tavernes, qui de mieux que ceux qui en arpentent le pavé tous les jours ? Ses gardes mal payés et peu motivés. C'est leurs histoires que Cédric Ferrand décide de raconter, celle des sans-grades, des troufions confrontés à tout un tas de missions plus navrantes les unes que les autres, qu'ils gardent les portes de la ville, récupèrent les cadavres sur le fleuve, fassent la tournée des auberges, subissent des grévistes, officient comme gardien de la Purge, bourreaux ou patrouilleurs dans un cimetière. Autant d'histoires douces-amères, qui finissent généralement plutôt mal, que Cédric Ferrand traite ouvertement sur le mode du polar, plus précisément du polar français des années 1950, à travers un style qui évoque largement plus Albert Simonin ou Michel Audiard que Tolkien ou Leiber. Construisant peu à peu son récit au fil de vignettes qui se croisent ou se frottent, il nous entraîne dans la boue des rues, dans la misère des maisons, au travers de personnages à la fois réalistes et truculents, et d'anecdotes hilarantes (la porchaison, la bouscotte...). Plus qu'une intrigue, Wastburg propose une immersion dans une ville grouillante de vie et de moyens de la perdre, et il n'est pas surprenant que la cité soit devenue le cadre d'un jeu de rôles, tant on aimerait l'explorer plus avant que ne le fait ici Cédric Ferrand, en apprendre plus sur tout cet extraordinaire défilé de gueules.
Parce que les gardoches ont toujours besoin de bras et que les Loritaines sont accortes, rejoignez dès aujourd'hui la fine fleur de Wastburg ! Prestige et avantages garantis.

Citation

De l'avis général, il fallait être grand et costaud pour entrer à la Garde. Les gens avaient en tête l'image du soldat baraqué qui en imposait quand il faisait sa ronde, dépassant d'une tête la foule agitée du marché. Il était vrai que quiconque avait goûté un jour aux méthodes de maintien de la paix des gardes savait qu'à Wastburg, la loi avait une bonne droite. Si bien qu'on attendait du gardoche moyen qu'il ait du chien.

Rédacteur: Jean-François Micard mercredi 14 septembre 2022
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