Le Grand soir

Je lâche la main de ma Jeanne. Elle retombe sur le lit. Lourde et morte. Je sors de notre alcôve d'amour qu'elle avait décoré de tous les endroits où nous avions voyagé. Je chiale. Je n'arrête pas de pleurer. J'ai peur. Je suis effrayé, terrorisé.
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jeudi 21 novembre

Contenu

Roman - Noir

Le Grand soir

Historique - Social - Disparition MAJ mardi 29 novembre 2022

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20,9 €

Gwenaël Bulteau
Paris : La Manufacture de livres, octobre 2022
282 p. ; 20 x 14 cm
ISBN 978-2-35887-913-2

Changer le monde

Au début de l'année 1905, la ville de Paris est en proie à l'ébullition car Louise Michel, l'égérie de la Commune, vient de mourir. Un gigantesque regroupement est prévu pour son enterrement, mais la police n'a pas trop confiance dans le calme possible des manifestants et les troupes sont prêtes à l'intervention. Dans les mouvements de foule qui vont suivre, une jeune femme, Jeanne Desroselles, de bonne famille mais proche des milieux gauchistes, va disparaître. Sa cousine Lucie ne peut admettre cette disparition et va essayer d'en savoir plus. Mais la recherche est ardue. Une année a passé. L'agitation ouvrière continue. Une révolutionnaire, surnommée Sorgue, agite les campagnes et tente de réveiller la conscience des femmes ouvrières dans les usines et autres caves où se fabrique le Roquefort. Née dans une bonne famille, Sorgue a un garde du corps qui est en même temps un indicateur de la police. À proximité se trouve Madeleine Pelletier, l'une des premières femmes médecins, liée elle aussi aux milieux gauchistes. Or, ces deux femmes, de par leur vie, ont attiré l'attention sur elles, et Jeanne est venue leur demander des conseils. Et si elles savaient aussi quelque chose sur cette disparition ? Quant au garde du corps, il commence à se poser des questions sur ses propres actions.

À travers une enquête assez lâche sur la disparition de Jeanne Desroselles (mais tout sera expliqué et de manière extrêmement logique et de manière juste pour la période historique) Gwenaël Bulteau en profite pour dessiner une intrigue captivante avec un savant mélange entre des personnages historiques réels (Madeleine Pelletier, Sorgue, Georges Clemenceau, Louise Michel) et des acteurs fictifs qui pourraient être l'incarnation d'un ou plusieurs types de l'époque. L'auteur parvient à la fois à reconstituer la période, les mentalités des gens, les événements, à mixer le destin individuel d'un personnage et les éléments historiques qui font évoluer l'intrigue (ici, des mouvements sociaux, des grèves ouvrières et l'approche d'une tentative révolutionnaire, l'espoir du grand soir). L'ensemble est construit avec soin, chaque scène décrit parfaitement la vie réelle (du moins ce que nous pouvons en savoir) et mélange la petite et la grande histoire pour présenter à la fois un récit noir et policier intéressant et intelligemment mené et une description qui apparait comme réussie de la vie en ce début de XXe siècle. Entamée avec La République des faibles - qui montrait déjà une facilité à construire une intrigue intéressante sur une description historique de qualité -, voici donc un deuxième roman qui confirme tout le bien que l'on pouvait penser de Gwenaël Bulteau.

Nominations :
Le Noir de l'Histoire 2023

Citation

Des balcons de leurs immeubles haussmanniens, les bourgeois contemplaient less événements, friands de détails qu'ils observaient à l'aide de leurs petites jumelles. Ils montraient du doigt des échauffourées, hélaient les gendarmes pour dénoncer les ouvriers réfugiés derrière des portes cochères et applaudissaient quand une escouade poussait devant elle une poignée de prisonniers.

Rédacteur: Laurent Greusard mardi 29 novembre 2022
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