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Inédit
Tout public
La croisière ne s'amuse pas
Guitariste de son état, de préférence de blues, Abel Diaz continue de courir le cacheton avec Linda, sa fidèle guitare qui n'a pas sa langue dans sa poche, même s'il est le seul à l'entendre. Il trouve un cachet pour rejoindre l'orchestre d'une croisière transatlantique Lisbonne-New York où se tient le séminaire d'une compagnie pharmaceutique en présence de son P.D.-G., le sémillant Léon Tusk. Ils ont pour atout d'avoir au chant Marge Montgomery, fille du second guitariste du groupe, Orville Montgomery. Sauf que tout dérape très vite : Abel réussit à peine à repousser les avances de Tusk que surgit un membre du personnel bien décidé à l'assassiner pour être indirectement responsable de la mort de sa famille... Le pauvre bougre est maîtrisé, mais ce n'est pas la fin de ses avanies. En plus de devoir jouer des scies consensuelles à son nouveau public, Abel trouve Orville mort. Il se trouve que celui-ci souffrait d'une allergie rare, peu compatible avec les macarons qu'il a mangés. Peut-on l'avoir assassiné ? Mais qui pourrait vouloir tuer un musicien vieillissant, moins sur le retour que jamais vraiment parti ? Et quel rapport peut-on y voir avec un tueur de prostituées qui met la crim' sur les dents ?
Voici donc le deuxième roman d'une série mettant en scène Abel Diaz le guitariste sans envergure par Sylvain Gillet, un auteur dont le profil (scénariste, réalisateur) aide grandement sauf qu'il ne cède pas aux charmes du thriller industriel cynique. Prendre un musicien comme protagoniste de polar semble être une idée si évidente que l'on se demande pourquoi elle n'est pas plus souvent employée (à moins de s'en tenir au vieux cliché que tous les auteurs de polar carburent au jazz...). Mais plus que son intrigue, c'est le style qui intéresse Sylvain Gillet : humoristique, ne cessant de glisser des jeux de mots, brisant avec allégresse le quatrième mur, parfois proche de ce style "dur-à-cuir" si difficile à maîtriser, il ne tombe pourtant pas dans l'hénaurme san-antonien (ou sa fille spirituelle Nadine Monfils, du moins avant qu'elle ne passe à autre chose) puisque situations et personnages restent ancrés dans le réel. Un exercice de style que l'on ne peut que saluer, même si on resserrerait volontiers le tout (air connu...). Et pour un roman qui joue surtout sur l'écriture, la résolution s'avère particulièrement réussie, originale et bien sentie. Un roman et surtout un auteur qui développe sa petite musique loin des modes. Il ne reste plus qu'à y être sensible !
Citation
Le bassiste grand dadais s'appelle Karol Johnson. Patronyme à caractère étrange si l'on oublie ses origines. Mère polonaise, père australien, il s'est fait tout seul comme on dit. Mais manifestement, il s'est raté. Une tête à se faire buter avant la fin du film.