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Et chaque fois, mourir un peu. 1, Blast
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Inédit
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Quand l'humanitaire rend fou
Grégory est infirmier, marié et père d'une fille, et surtout il pourrait être heureux. Mais il songe à des missions internationales, un espace où il semble vraiment vivre de manière intense. Et bien souvent, il y retrouve Paul, un chirurgien suisse avec lequel il va se lier d'amitié. Nous allons donc suivre Grégory au fil de ses missions, où parfois il s'oppose à sa hiérarchie, où il sauve des vies, essaie de faire au mieux et se trouve confronté à la barbarie humaine, aux meurtres de masse. Les opérations commencent en juillet 1992 et s'achèvent, pour ce volume, en 2010, avec sa disparition aux mains des talibans afghans. Entre, il côtoie les différents territoires de guerre du monde, notamment l'Afrique et la Yougoslavie. Peu à peu, son univers mental se dégrade devant la dureté du monde, le perte de sa femme et de sa fille dans un accident alors qu'il est en mission. Peu à peu, d'ailleurs, son propre degré de violence augmente. Il fait peur aux gens de son village quand il y retourne. Les psychologues des associations humanitaires qui l'emploient le laissent parfois se reposer, ne sachant trop s'il est capable de retourner dans une zone de combat. Karine Giebel décrit même des scènes de folie où il voit et parle à sa famille morte, leur demandant des appréciations ou des conseils sur ses activités. Au cours d'une opération, il doit rentrer pour s'occuper des dépouille de sa femme et de sa fille, mais il retourne vite sur le terrain. Lors d'une mission, il va rencontrer un jeune garçon, puis sa mère, deux Serbes coincés dans la guerre fratricide du tournant du siècle. Il les ramène avec lui, épouse la jeune femme et essaie d'aider le fils, mutique depuis qu'il a assisté à des horreurs. En grandissant, son caractère s'affirme mais aussi sa violence et sa sauvagerie. Sa mère et Grégory sont de plus en plus ennuyés et ne savent plus comment faire pour arriver à exorciser cette violence. Mais tandis que la mère la nie, Grégory, lui, ne pense qu'à repartir...
Voici un roman annoncé comme le début de ce qui ressemble au moins à un diptyque. Karine Giebel est une auteure de polar reconnue et qui connait son métier. Entre les deux portraits particuliers qu'elle dresse, on aperçoit l'arrière-plan qui est montré avec force, au fil des guerres qui reviennent en mémoire des lecteurs plus âgés. Pour le reste la folie, vécue presque (et racontée) comme une donnée "normale", conjoncturelle, individuelle et collective ressemble à une balle de ping-pong que l'on se renvoie inlassablement. À noter plus spécifiquement le portrait d'un médecin suisse qui semble traverser les événements en gardant la distance ironique nécessaire pour un roman qui maintient le suspense et l'envie de savoir la fin (même s'il faudra attendre la suite) au sein d'une intrigue qui alterne des scènes liées à la vie des humanitaires dans des conditions assez horribles et le retour au calme villageois qui peu à peu devient aussi fou que le monde.
Citation
L'infirmier retient sa respiration. Il songe à Anton, à Zina. Il songe à sa mère. À Séverine et Charlène. À tous ceux qu'il aime et qui ne le reverront peut-être jamais. Les images défilent dans sa tête, tandis qu'il fixe le canon de l'arme pointée sur lui.