Le Gros, le Français et la Souris

C'était le début du mois de décembre, le jour de la Sainte-Barbe pour être précis. Dans mon travail, on doit se rappeler ces choses. Lors des jours qui précèdent la célébration d'un saint une relique de celui-ci vaut deux fois plus qu'à n'importe quel autre moment de l'année. Et la demande en reliques ne cessait de croître, tant les gens avaient besoin d'espoir.
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Roman - Noir

Le Gros, le Français et la Souris

Enlèvement - Assassinat MAJ vendredi 01 juillet 2011

Note accordée au livre: 4 sur 5

Poche

Tout public

Prix: 8 €

Raúl Argemí
El Gordo, el Francés y el Ratón Pérez - 1996
Traduit de l'espagnol (Argentine) par Jean-François Gérault
Paris : Rivages, septembre 2005
203 p. ; 17 x 11 cm
ISBN 978-2-7436-1453-6
Coll. "Noir", 579

Trois hommes et un larcin

S'il n'y avait pas un peu d'humour, il faudrait avoir le cœur bien accroché pour lire les premières pages de ce premier roman d'Argemi. Ou avoir le recul du narrateur qui, après avoir fait dévorer son ancien patron par des fauves en cage, considère qu'il l'a "assassiné avec un brin de justice poétique".
Alors disons-le tout net : de la poésie on en trouve, de l'humour aussi. Quant à la justice... Bon, passons sur la justice, après tout il s'agit d'un récit à la première personne, celle du Gros qui n'en finit plus de maigrir, dopé à la musculation et aux pilules en tous genres. Le Français, lui, est un gourou barbu qui dispose à plaisir de sa chose : la Souris, ancien boxeur qui n'a plus toutes ses dents mais a le mérite d'être corvéable à merci. C'est cette bande de bras cassés ayant en commun un passage par la case prison, qui décide d'enlever la femme du patron du Gros. Celle-ci est donc la victime... Mais pas si innocente que ça. Certes elle est enfermée, certes ses moyens d'action sont limités. Mais il faut reconnaître qu'elle est sacrément roulée. Le Gros n'y a d'ailleurs jamais été insensible et le Français en est bien conscient. Mais le Gros est aussi conscient que le Français le sait et qu'il est prêt à s'en servir, de la même manière qu'il se sert de la Souris. Il ne faut pas faire confiance au Français. Il ne faut faire confiance au Gros. Il ne faut pas faire confiance à la victime. Vous l'aurez compris, il ne faut faire confiance à personne. On le sait dès les premières pages puisque l'histoire commence par la fin de l'histoire, ce moment où toutes les tensions sont palpables, où les fauves dévorent un homme, où les pilules font bouillir le cerveau du Gros.

Tension quasi permanente, humour et second degré, pas de doute : un très bon Argemí. L'Argentin, aujourd'hui installé en Espagne, manie à la perfection ce qu'il fera quelques années plus tard avec Patagonia Tchou-tchou : un crime ambitieux mené par des caïds de seconde zone, une aventure où les losers ont la part belle, raconté sèchement avec causticité. Publié en 1996, Le Gros, le Français et la Souris était une belle promesse d'auteur. La promesse a été tenue depuis.

Citation

En réalité, je regrettai de ne pas avoir une gigantesque presse pour réduire en bouillie des gens aussi moches. Certains jours, comme aujourd'hui, le monde était plein de gens moches, jusqu'à la nausée.

Rédacteur: Gilles Marchand mardi 07 juin 2011
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