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En dehors des clous
Celui qui perd ses parents est orphelin. Celui qui perd sa compagne est veuf. Mais il n'existe pas de mot pour désigner celui qui perd son enfant, parce que la chose est si insupportable, qu'un mot ne peut la contenir. Comment traduire cet indicible est pourtant ce à quoi s'attaque Pierre Hanot dans Les Clous du fakir.
Sur fond de petits trafics et de rock'n roll, le narrateur nous dévoile peu à peu comment il a laissé filer ce à quoi il tenait le plus, et la vengeance qu'il fomente, comme si celle-ci pouvait rétablir le monde sinon dans l'état dans lequel il se trouvait avant l'effondrement, du moins dans un état supportable. En une écriture dense, tendue, musclée, l'auteur, par touches successives, parce que sans doute appréhender la situation dans son ensemble est inhumain, en des allers et retours entre son passé et son présent, peint sa vision macabre de la perte d'un enfant. Il en résulte un tableau qui ne peut se regarder qu'à distance, qui ne prend sens qu'avec le recul. De près, dans l'instant, il faut se contenter d'admirer les coups de pinceau, les taches de couleurs dont il ressort quelques moments de pure poésie rock'n roll.
Les Clous du fakir est un roman noir atypique. Pierre Hanot a su trouver un style original dans un genre aux codes parfois trop figés. Il s'en dédouane, sort des clous, et cette liberté, si elle éveille en nous la curiosité, demande toutefois une certaine ouverture, une envie d'être bousculé dans ses habitudes de lecteur. Les Clous du fakir est aussi un texte douloureux dans son propos mais on en sort touché d'avoir accompli avec le narrateur, père déchiré entre la rage d'aimer et celle de tuer, l'exploit de les avoir supportés un à un, ces clous, piquant la chair, révélant toutes les partie du corps pour mieux intégrer celui-ci dans le monde qui l'entoure, le monde tel qu'il est et que l'on ne peut plus changer. À moins peut-être d'accomplir cette vengeance ? Rien n'est moins sûr.
Récompenses :
Prix Erckmann-Chatrian 2009
Nominations :
Prix des lecteurs Ancres noires 2010
Prix Polar Michel Lebrun Lycéen 2010
Citation
Non, Julia, ta venue au monde ne m'a rien appris de la mienne