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Inédit
Tout public
Traduit du par Terje Sinding
Paris : Presses de la Cité, mai 2015
620 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-258-11041-0
Adultes ados et ados adultes
Stavanger, haut-lieu du pétrole norvégien, du 25 au 30 septembre (quelle année ?). Pål Fagerland, quarante ans, que sa femme a quitté, vit avec ses filles adolescentes, Malene (gymnaste émérite) et Tiril (la cadette, un peu rebelle), et Zithia, sa chienne. Joueur compulsif, il est couvert de dettes et fait appel à Rudi, ancien copain de jeunesse qui vit depuis vingt-sept ans avec Cecilie Haraldsen (sœur de Jani, chef de bande grassouillet) et l'a jadis dépucelé. Il y a aussi Daniel William Moi, dix-huit ans, qui va de famille d'accueil en famille d'accueil, coqueluche des filles et obsédé sexuel, qui fantasme sur Sandra Vikadal, quinze ans, collègue de magasin de Tiril, mais est lui-même l'objet du désir de Veronika, la fille de sa mère d'accueil (aïe, conflit avec Sandra en perspective, avec de graves conséquences). Et puis Tong, Coréen norvégisé, condamné pour avoir couché avec une mineure et peut-être père de l'enfant que porte Cecilie, qui sort de prison décidé à s'affranchir de la tutelle de Jani. C'est un peu compliqué (les adultes se comportant comme des ados attardés) mais on s'y retrouve. Et la bande monte un plan d'escroquerie à l'assurance pour renflouer Pål. L'intrigue avance lentement, avec bien des retours en arrière, l'accent étant mis sur la peinture du milieu et des personnages, et il y a une centaine de pages de trop. Tout cela nous donne-t-il un polar ? Il y a bien deux morts, mais l'un est tué devant nos yeux et l'autre victime d'un accident. Quant à la police, elle brille par son absence et n'y voit de toute façon que du feu. Le danger viendrait plutôt d'ailleurs. Alors...
Le livre est construit de façon efficace sur l'alternance systématique des points de vue au moyen de courts chapitres (il y en a cent six) et il est porté par un dialogue vigoureux, mais sombre dans l'anglomanie caricaturale, avec des centaines de noms de groupes musicaux, titres et textes de chansons – sans compter feuilletons anglo-saxons et films gore, ni le fait que les personnages pensent et dialoguent au moyen de bribes d'expressions américaines toutes faites (f..., bien sûr, what else?), il est difficile de faire mieux dans le snobisme –, comme si la littérature avait besoin d'une excuse pour exister. Cela rend la lecture pénible pour qui n'est pas incollable sur toutes les chapelles du heavy metal (c'est aussi subtil que la physique quantique). Seul avantage, cela allège d'environ dix pour cent le travail du traducteur (qui s'en tire par ailleurs fort bien, même s'il aurait dû opter pour le "on" plutôt que le "nous" dans les dialogues). Mais peut-être est-ce aussi pour équilibrer les nombreuses citations de la Bible. Les voies du Seigneur... Au total, on peut surtout se demander comment il se fait que l'auteur ait choisi un milieu géographique et social aussi proche de celui de Gunnar Staalesen, au risque d'une comparaison qui ne pouvait guère être qu'à son désavantage ? C'est dommage, car il n'est pas sans talent. Mais peut-être effectuera-t-il de meilleurs choix la prochaine fois. Et imaginera-t-il un meilleur titre : le français (dont il n'est pas responsable) est grotesque, mais le norvégien (À demain) n'est pas d'une folle ingéniosité.
Citation
Vous avez quelque chose que je veux, dit-il. Et j'ai quelque chose dont vous ne voulez pas.