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Grand format
Inédit
Tout public
402 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-07-294696-7
Coll. "Série noire"
La dernière gorgée de bière
À Paris, une adolescente nigériane échappe à ses proxénètes et se réfugie auprès d'une journaliste du Monde. Elle veut témoigner, raconter le parcours de toutes ces jeunes femmes conduites à la prostitution dans les grandes villes d'Europe. Pour comprendre, son interlocutrice devra aller à la source, à Lagos, à la rencontre des Free Queens, une association luttant contre les violences faites aux femmes. Mais dans le nord du pays, deux corps de jeunes femmes sont découverts, jetés en vrac sur un tas d'ordures, anonymes jusqu'à ce qu'un ex-policier décide de résoudre leur meurtre. Et si, au milieu de tout cela, se jouait la politique commerciale ultra-agressive d'un brasseur décidé à imposer sa marque de bière à tout le pays ? La bière peut-elle avoir le goût du sang ?
Quoi de plus innocent qu'une bière ? Alcool léger, convivial, il s'est imposé partout comme une boisson populaire et chaque pays développe ses propres variétés. Mais au Nigeria, la bière est une institution, et pour gagner des parts de marché dans un secteur de plus en plus concurrentiel, MB Nigeria Inc est prêt à tout pour imposer ses couleurs et sa marque, la bière First. Sponsoring à tout va, mais aussi opérations coups de poing, prostitution et même meurtre. La bière doit couler, quoi qu'il arrive. Cela peut sembler excessif, peu crédible, et pourtant Marin Ledun, comme il en a l'habitude se base sur des faits réels, extrêmement documentés, allant jusqu'à reprendre des phrases entières de protagonistes réels de la guerre de la bière qui a frappé le Nigeria en 2020. Comme il l'avait fait pour son dernier roman Leur âme au diable, dans lequel il auscultait les travers et les magouilles de l'industrie du tabac, il multiplie dans Free Queens les points de vue pour rendre la complexité d'un pays où une femme sur quatre est victime de violences sexuelles et où des militantes féministes comme ces Free Queens luttent au quotidien contre des traditions qui les emprisonnent. Du paysage contrasté de Lagos, entre gratte-ciels et bidonvilles, opulence et misère noire, au Nord du pays, plus pauvre, oublié des institutions locales et sous la menace de Boko Haram, Marin Ledun entrecroise réalité et fiction, dessine de beaux portraits de femmes fortes et courageuses, de vrais salopards et de flics rincés, et dresse un constat désabusé de la corruption des élites africaines, tout en nous offrant un roman d'une terrifiante noirceur où de brèves trouées d'espoir viennent se fracasser contre le mur du réel. Essentiel, comme son prédécesseur, Free Queens témoigne de ce que le roman noir ne devrait jamais cesser d'être : un miroir tendu sur les aberrations du monde contemporain. Et tant pis (ou tant mieux) si ce qu'on y voit n'est guère reluisant.
Citation
Deux jeunes femmes, la vingtaine, peut-être moins. Étranglées et jetées au milieu des poubelles comme de vulgaires déchets. Pas de vêtements, pas de bijoux, aucun papier. Rien que leur jeunesse anonyme.