Tout tout de suite

Jamais le palais du Luxembourg n'avait connu une telle effervescence. Habituées aux duels feutrés entre collègues, les sénateurs semblaient découvrir d'un coup la violence et la brutalité de la politique contemporaine. Depuis que la présidente du Sénat avait transformé les lieux en bastion de l'opposition, la fébrilité gagnait tous les bureaux, et plus particulièrement ceux du Petit Luxembourg.
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Roman - Noir

Tout tout de suite

Social - Faits divers MAJ mardi 22 novembre 2011

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20,9 €

Morgan Sportes
Paris : Fayard, août 2011
378 p. ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-213-63434-0
Coll. "Romans"

Rien à jamais

On ne part pas tout à fait de rien lorsqu'on commence la lecture de Tout tout de suite. On se souvient du fait divers, de ce jeune homme "appâté" par une bimbo de banlieue puis séquestré de longues semaines dans une cave, on se souvient des pages de Paris Match, de l'interview d'I Télé à Abidjan où le fameux "cerveau" avait trouvé refuge... On se souvient du moment où on a convoqué nos idées sur la banlieue, des idées plus ou moins vraies, plus ou moins fausses à quoi répond l'histoire froide et documentée de Morgan Sportes.
C'est un récit captivant nourri des minutes du procès, d'une enquête de terrain qui remet : protagonistes, victimes, lecteurs, dans le contexte de l'affaire et révèle une histoire où les idées reçues peuvent tuer, où les préjugés font office de vérité et où réfléchir par soi-même est moins rassurant que de partager en groupe la même vacuité.
Des préjugés, il y en a partout dans cette histoire. Les médias puis le public interprétant l'enlèvement comme un acte politique et donnant à l'affaire un écho national alors que tout au départ est purement crapuleux. Du côté des protagonistes ensuite qui pour la plupart désœuvrés aux pieds des tours sont prêts à suivre le premier type qui se pose en chef, venant rompre la monotonie à partir d'une réputation jamais vérifiée. Un chef de gang qui s'imagine que le kidnapping d'un Juif reste en France la façon la plus à sa portée pour faire de l'argent.
Et puis il y a le passage à l'acte, aidé par la fonction "pédagogique" de la série télé du dimanche : on "conditionne l'otage", on tente d'enlever les traces d'ADN pouvant permettre d'identifier où il a été séquestré... Jusqu'à sa mort de plusieurs coups de couteau et la tentative de crémation du corps. Comme une fulgurance historique.
Il se dégage de l'histoire décrite dans Tout tout de suite, un parfum entêtant, une image de troupeau le nez au sol, orienté au minimum, décérébré le plus possible, mou exploité, velléitaire et se dirigeant vers le pire comme pour que, finalement, il se passe enfin quelque chose.

Citation

Au premier procès, en 2009, Yacef, comprenant instinctivement le fonctionnement primitif des médias (une primitivité en rejoignant une autre), semble découvrir que, en tuant un jeune marchand de téléphone juif désargenté, il a simultanément liquidé le petit voyou qu'il était...

Rédacteur: Olivier Nouvel lundi 21 novembre 2011
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