Affaires non résolues : quand le crime reste impuni

Je me suis réveillée une première fois à sept heures moins dix, comme d'habitude. La voix dans ma tête m'ordonnait de me lever, de préparer le petit déjeuner des enfants, qui devait être sur la table à sept heures trente précises. Je me suis tournée vers Kirsten, dont le visage était vaguement éclairé par la lumière du réverbère qui entrait par la fenêtre, au store relevé d'une dizaine de centimètres.
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vendredi 29 mars

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Essai - Policier

Affaires non résolues : quand le crime reste impuni

Procédure - Faits divers MAJ mardi 22 mai 2012

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18,5 €

Cyril Guinet
Paris : First, mai 2012
256 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-7540-3220-9
Coll. "Document"

Bon sang ! Mais c'est pas bien sûr !

Le journaliste Cyril Guinet a été rédacteur en chef de Détective pendant dix ans et a travaillé sur les faits divers pour la chaîne 13e Rue, et pour Jacques Pradel sur Europe 1. Il a écrit aussi des "récits vécus" pour des magazines féminins comme Maxi. Nul doute qu'il sait de quoi il parle. Il met sa plume efficace au service de récits précis, dénués de pathos et de formules littéraires. L'efficacité prime. Il n'y a que les faits, rien que les faits et même si des rapprochements semblent évidents pour le lecteur (mais non pour la justice), il se garde bien d'être péremptoire. Il sait combien la vérité est parfois difficile à cerner, et surtout qu'il ne faut pas tirer de conclusions trop hâtives, notamment au niveau des aveux qui peuvent être prononcés au terme d'une garde-à-vue épuisante. L'auteur a déjà publié aux éditions Scènes de crimes 13 histoires de poison et 13 histoires de dépeceurs. Voilà ce nouveau recueil de treize énigmes chez First éditions.

Loin de se lancer dans un travail d'archives historiques, l'auteur se concentre sur des affaires contemporaines déjà oubliées au bout de quelques d'années. Bien sûr, on a tous à l'esprit la mort du petit Grégory ou les disparitions de petites filles, mais les morts mystérieuses des deux jeunes hommes (un charpentier et un pâtissier) "suicidés" à six mois d'intervalle à partir du belvédère de Pau est stupéfiante. Voilà que les parents prouvent que la chute du belvédère ne peut coïncider avec l'endroit où l'on a retrouvé le cadavre. De plus, il manquait une chaussure aux deux garçons, et chacun avait une feuille de palmier à ses côtés, arbre ne se trouvant pas dans les environs. C'est le même policier qui a prévenu les parents qui vont trouver des similitudes terribles entre les mots employés et les rapports. Tout comme de nombreuses affaires dans ce livre, ce sont les parents qui se démènent pour faire émerger la vérité. Sans doute faut-il y voir l'inclinaison du journaliste habitué à travailler à partir des témoignages des proches. D'où une empathie immédiate. D'où aussi cette impression que la justice est plus un frein qu'une aide. Mais, dans le cas des affaires non résolues, le public sait que les cellules d'enquêtes restent actives pendant très longtemps et que des flics, comme celui qui travaille sur "les Amoureux de Fontainebleau" s'impliquent pendant des années et y laissent leur santé, comme nous l'avons vu pour la traque de Francis Heaulme ou d'Émile Louis.

"Un inconnu dans la tombe" raconte la disparition sur une plage d'un jeune campeur de quinze ans. La police fera tout pour faire signer aux parents la reconnaissance d'un cadavre retrouvé quinze jours plus tard dix kilomètres plus loin. La mère refuse : ce n'est pas son enfant. À force d'obstination, on parviendra à faire signer le père, clôturant ainsi le dossier et forçant les parents à inhumer un inconnu sous le nom de leur fils. Mais deux ans plus tard les parents d'un indépendantiste basque leur téléphonent. Leur fils a disparu le même jour lors d'une attaque ou un policier fut tué. Est-ce lui ? Une exhumation s'impose mais la justice freine des quatre fers...

On citera aussi "La disparue de l'Île Saint-Louis" : Bénédicte Vincens, gardienne à Beaubourg, folle de photographie et peut-être folle tout court, disparaît mystérieusement lors de l'incendie de son appartement. On la recherche. Un an plus tard, apprenant que la disparue était fascinée par son travail, la photographe Sophie Calle, met en scène une installation artistique à Beaubourg, à partir du lieu de travail de Bénédicte et de négatifs de ses photos à moitié brûlés trouvés dans son appartement. Autre prolongement culturel : celui du "Dépeceur de la Gare de Perpignan". Y-a-t-il un rapport avec un certain tableau de Dali qui considérait la gare de Perpignan comme le centre du monde et qui a peint, un jour, une femme "dépecée" ?

Ces éléments d'intrigues intellectuels ne doivent pas nous faire oublier le drame que peuvent vivre les proches de ces victimes, torturés par l'espoir et la désolation et qui, jamais, ne trouvent de réponses à leurs questions. Toutes les histoires racontées ici sont exemplaires et poignantes. De la milliardaire française Suzie Mostberger massacrée dans sa villa de l'île Moustique à la demi-douzaine de jeunes filles "retrouvées mortes, massacrées avec une sauvagerie à faire dresser les cheveux sur la tête" dans le triangle bourguignon Beaune, Mâcon, Montceau-les-Mines, "ce sont plus de six cents affaires en cours que nous devons suivre et qui ne sont pas résolues sur les vingt dernières années", dit un général de la gendarmerie.

Avec les précautions d'usage, dans son épilogue, Cyril Guinet, vante les mérites du fichier de recherche ADN qui a permis d'élucider longtemps après des affaires restées sans réponse (à partir du moment où les indices sous scellés ont été conservés dans de bonnes conditions). Il attire même l'attention sur un nouveau prolongement à partir de l'affaire Élodie Kulik. Il avait été impossible de relier l'ADN trouvé dans un préservatif près du corps à un nom du fichier. Les gendarmes utilisèrent alors "une recherche en parentalité" et découvrirent un ADN "parent", celui du père du coupable !

Citation

On a purement et simplement voulu cacher la victime d'un crime d'État dans leur caveau de famille.

Rédacteur: Michel Amelin lundi 21 mai 2012
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