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vendredi 29 mars

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Essai - Espionnage

Tarnac, magasin général

Politique - Procédure - Faits divers MAJ vendredi 25 mai 2012

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20 €

David Dufresne
Paris : Calmann-Lévy, mars 2012
408 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-7021-4212-7

Terroriste en Corrèze, la nuit des crochets...

Une enquête. Trois ans d'enquête même. Depuis les plus hautes sphères de l'État sarkozien jusqu'aux plus navrants voisinages corréziens. Une enquête telle que les journalistes n'ont plus l'habitude de les pratiquer ailleurs que dans l'édition... Un vrai crève-cœur... Une enquête dont ressort surtout l'édifiante débilité de la machine policière de l'État français ! L'histoire d'un fiasco pathétique ! Celui d'une bande de gamins cajolant au plus haut sommet de l'État un pouvoir incapable. Une lamentable affaire d'État, on n'en finirait pas de se repaître de ce genre d'adjectif : minable, piteux, déplorable, tant ce que l'on découvre est ahurissant. Et inquiétant.

On le devinait avec l'affaire Merah, bricolée à la va comme je te pousse, mais là, sur plus de quatre cents pages, cela dépasse les bornes. Pas un haut fonctionnaire pour rattraper l'autre, une ministre, MAM pour ne pas la citer, appointant aux délires de l'énervé du château, selon les bons mots de la DCRI, et un squale ayant l'oreille du président se rengorgeant comme un pitre et scénarisant toute honte bue de prétendues opérations de déstabilisation de l'État pour tenter de sauver son patron... L'enquête fait peur au final : c'est ça, les services secrets de la France ? Cette bande d'abrutis qui fiche à la petite semaine, bricole au jour le jour et s'enivre de formules stéréotypées ? C'est ça, l'État du renseignement en France ?

Les faits... Le 8 novembre 2008, un grand désordre embête la SNCF. Le réseau est out. Les incidents se multiplient sur tout le territoire, pannes en cascades, malveillances démultipliées... Des actes malveillants donc, dont acte. Sauf que... l'enquête révèle que de tels actes, la SNCF en subit quatre mille chaque année ! Le problème, c'est que ce 8 novembre 2008, cela fait d'un coup beaucoup et que la SNCF ne sait pas quoi dire à ses usagers, ni à son patron, ni au Ministre des transports, ni au premier Ministre, ni au Président in fine, tandis que le mécontentement gronde de toute part... Alors ça tombe bien la malveillance. On tire d'autant plus sur la corde que MAM a un coupable sous le coude : Coupat. Un gauchiste que l'on surveille depuis un petit moment, et pas qu'un peu : micros, filatures, tout le grand jeu depuis que Nicolas veut son affaire terroriste. Ça change en outre des "islamos", comme disent les agents de la DCRI. On tient là un terroriste corrézien bien de chez nous, qui sent le fromage de chèvre et le saucisson.

L'affaire est stupide. D'un bout à l'autre de l'enquête, c'est ce qui suinte d'une besogne d'État ridicule. Enfin, le serait si, encore une fois, on ne voyait pas se profiler derrière la totale déroute de nos services secrets... Coupat était dans le collimateur parce qu'il avait peut-être (admirez la précision) rédigé un brûlot anti-républicain : L'Insurrection qui vient. Enfin, rien n'est prouvé. Mais on le soupçonne. C'est déjà ça. Et puis il a voyagé. Au Canada. Aux États-Unis. Animé une revue militante. Et créé cette communauté post-hippie en Corrèze, dont les membres ne possèdent aucun téléphone portable... Avouez, il y a de quoi s'en méfier, non ? Alors pas de doute : c'est lui qui a posé les crochets sur les fils du TGV pour faire disjoncter la ligne à haute tension. Sauf qu'on ne peut pas le prouver. Et, grotesque de l'accusation (faut ce qui faut), Coupat était suivi ce soir-là par une dizaine de voitures de police banalisées, en pleine cambrousse, tout près du lieu du crime, et que ces incapables l'ont perdu de vue quelques dizaines de minutes, juste le temps de courir poser ses crochets affirment-ils – enfin, sans doute, même si au niveau du minutage, la reconstitution laisse apparaître l'incongruité de l'hypothèse. Il était quand même bien dans le coin, non ?

On croit rêver... Cela rappelle Merah, fiché par les services de la DCRI, mais qui peut tranquillement se balader en scooter, tuer, re-tuer, et tuer encore, en échappant, avec son scooter, à la vigilance de toutes les polices de France... Incapables de mener une filature jusqu'au bout, les flics français... Ils ont dû sécher en masse les cours sur les filatures, à l'école de police... Coupat, lui, on ne l'a pas liquidé. Voilà le vrai tort de l'affaire de Tarnac. Parce que les PV d'audition permettent de réaliser brutalement tout le côté "charlot" de l'affaire. Il n'y a pas d'autres mots. Toute la flicaille française au chevet d'une communauté post-baba cool implantée en Corrèze, mais aucun résultat probant. Si : un chevrier baptisé chef de la branche militaire parce qu'il est un peu plus costaud que les autres et qu'il joue au foot au village voisin... Un montage minable, à la juste image du quinquennat Sarkozy. Une affaire mesquine, abusive, imbécile. Il n'y a qu'à lire les PV d'audition pour s'en convaincre. C'est littéralement ahurissant. Tarnac ? Des emmerdeurs. Auquel s'est ajouté un coup tordu de la République. Les agents de la DCRI l'avouent volontiers aujourd'hui. Le petit agité voulait des résultats, alors ils ont levé des marginaux. Coupat, forcément rédacteur anonyme du libelle L'Insurrection qui vient. Le livre le plus lu par les forces françaises du renseignement ! Des dizaines d'agents, stabilo en main, surlignant avec application... Ils analysèrent même doctement la structure du livre, en sept chapitres, comme L'Enfer de Dante. C'est pas une preuve, ça ?

Tout le reste à l'avenant. Guéant, Squarcini, Bauer possédant sans doute la plus grosse bibliothèque de littérature ultra gauchiste en France. Et une débauche de moyens pour cartographier un petit village corrézien, poser partout des caméras de surveillance, envoyer des militaires se planquer dans les fourrés, coller des micros sous le ventre des brebis... Les juges ? Pas mieux éclairés dans cette affaire. Il n'y a qu'à lire les PV d'audition ! C'est ahurissant et cela donne des boutons, comme la fixette de MAM sur le terrorisme, à la remorque de l'énervé du bocal élyséen. Enfin... l'ex. MAM improvisant jour après jour et faisant de l'improvisation sa règle de conduite. On a vu où ça l'a menée...

Et Pierre Tessier révélant in fine que l'extrême droite proche du Président avait construit cette histoire avec pas grand-chose. Une enquête forte, qui donne le vertige en somme, quand tant d'imbécillité est déployée au plus haut sommet de l'État. Une enquête que l'on ne peut résumer non plus à ce seul constat : un vrai travail de journaliste, oui, sidérant même sur les collusions entre la profession et les cercles du pouvoir, au-delà de la mise en cause du fonctionnement de la police française. Besoin d'un sérieux coup de balai... Et l'auteur de balayer devant sa propre porte. Laissant peut-être encore ça et là des questions en suspend sur la nécessité de la tâche, et ses difficultés...

Citation

J'étais devant mon bol de céréales. des Chocapic, je m'en souviens.

Rédacteur: Joël Jégouzo jeudi 24 mai 2012
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