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samedi 12 octobre

Contenu

Roman - Noir

Le Monde à l'endroit

Ethnologique MAJ dimanche 02 septembre 2012

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 19,5 €

Ron Rash
The World Made Straight - 2006
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Isabelle Reinharez
Paris : Le Seuil, août 2012
288 p. ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-02-108174-9
Coll. "Cadre vert"

Cannabis repetita

Avec Le Monde à l'endroit, le romancier américain Ron Rash confirme qu'il est à la fois un excellent conteur et un témoin du cauchemar américain. Le Monde à l'endroit, c'est l'envers de l'Amérique à travers les yeux de Travis Shelton, jeune gaillard de dix-sept ans, qui va n'avoir de cesse d'être tourmenté et de tourmenter trois figures paternelles. Un livre d'homme écrit par un homme, aurait-on envie de dire, d'autant que les trois femmes de cette histoire n'ont que très peu le droit à la parole.

Shelton Laurel, petite bourgade des Appalaches. Le père de Travis Shelton, homme fier et butté, y cultive du tabac. Travis, lui, préfère les grands espaces, les virées en voiture cabossée et alcool à profusion avec ses copains, la pêche à la truite au pied de Divide Mountain. C'est justement en allant pêcher qu'il découvre un champ de cannabis. Vite fait bien fait, il récupère des pieds qu'il s'empresse d'aller vendre à Leonard, un lettré devenu paria, vendeur de drogues douces et d'alcool dur. Il a la mauvaise idée de récidiver une et deux fois. La deuxième fois sera de trop. Un piège métallique se referme sur sa cheville. C'est alors la longue attente qui voit arriver Toomey et son frère, les cultivateurs de l'ombre. Bestial, Toomey le dépose à l'hôpital non sans lui avoir coupé le tendon d'Achille histoire de. C'est là qu'il rencontre Lori qui va devenir sa petite amie. En conflit ouvert avec son père, Travis quitte le domicile familial pour le taudis de Leonard, qui vit avec Dena, archétype de la junkie : voleuse, moribonde, défoncée et prostituée. Tout arrivant trop vite, c'est aussi à ce moment que Lori l'incite à reprendre les études aidée en cela par Leonard. Ce que Travis fait non sans avoir l'impression que d'autres prennent en main sa destinée. Mais c'est aussi avec Leonard et ses livres, qu'il découvre l'histoire tragique qui s'est déroulée sur cette terre qui est chère à Ron Rash pendant la guerre de Sécession. Cette terre chargée d'histoire, gorgée du sang des innocents, et qu'il va souiller du sang de ses personnages les plus odieux. Car l'histoire rattrape toujours les personnages de Ron Rash, et Travis sera rattrapé par ses idéaux, ses envies de bien et mal faire et surtout par les frères Toomey.

La trame de ce roman noir très simple est rendue complexe par les descriptions des personnalités de ses protagonistes. Travis Shelton, jeune exacerbé et incompris, porte alors le poids de la terre et de ses tourments sur ses maigres épaules tout en refusant l'aide de ceux qui lui portent une attention - attention refusée par ses parents. C'est un être bourré de paradoxe qui va peu à peu détruire tout ce qu'il s'est construit au nom de son indépendance. Comme si la déconstruction chaotique était une solution à la tentative d'harmonisation uniforme prônée par une société américaine qui pourtant a assis sa suprématie sur ce qui faisait sa force : l'unité dans la différence (moyennant quelques idées nauséeuses et quelques massacres).


On en parle : Carnet de la Noir'Rôde n°47 |La Tête en noir n°158

Citation

Désolé d'y être allé au couteau sur ton pied, mais faut qu'on soye certains que t'oublies pas qu'y a un prix à payer quand on vole. M'est avis que tu t'en tires bien. Y a des coins en ce bas monde où que c'est la main qu'on t'aurait coupée.

Rédacteur: Julien Védrenne mercredi 29 août 2012
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