Vol au-dessus d'un nid de ripoux

Certains meurtres ressemblent à des histoires qui n'en finissent pas. Mais ce ne sont pas les plus nombreux. La plupart des meurtres se résolvent sans imagination, par la lecture consciencieuse des agendas téléphoniques, par le croisement des auditions, dont les incohérences sont débusquées à la pointe du stylo avant d'être creusées jusqu'à l'os, jusqu'aux larmes et jusqu'aux aveux. La plupart des meurtres sont aussi faciles à résoudre que des rébus dont la solution nécessite d'être patient et c'est tout.
Claire Raphaël - Les Militantes
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Éclipse totale
Harry Hole a été exclus de la police, ce qui ne l'empêche pas de couler des jours heureux, bouteille ...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

mardi 19 mars

Contenu

Essai - Policier

Vol au-dessus d'un nid de ripoux

Corruption - Procédure - Faits divers MAJ vendredi 29 mars 2013

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20 €

Frédéric Ploquin
Paris : Fayard, février 2013
368 p. ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-2136-7238-0
Coll. "Document"

Police de Marseille : le côté obscur

Habitué des recueils thématiques (Parrains et Caïds, Ils se sont fait la belle en Livre de Poche), le journaliste d'investigation du magazine Marianne s'intéresse cette fois à une affaire qui est au cœur de l'actualité : celle d'une Brigade anti-criminalité Marseillaise, dont certains membres sont soupçonnés de corruption, trafic de drogue et complicité d'assassinat.
Voilà un travail de lecture rapide, dont le titre aurait pu être : Quand les policiers se transforment en voyous. Perquisitions secrètes, micmac marseillais, huit-clos entre hommes de pouvoir ou collègues véreux : les trois cent soixante pages de l'essai de Frédéric Ploquin s'enfilent aussi vite qu'un gilet pare-balles avant une intervention en cité.
L'auteur a choisi de raconter son enquête, qui s'étend d'août 2011 à décembre 2012, de façon chronologique, sous forme de mini-chapitres. Avec en guise de respiration pour le lecteur, un meurtre à la "kalach'" tous les quinze jours. Deux personnages principaux se dégagent de l'ensemble grâce à leur "alliance" qui permit de faire tomber les "ripoux" : Alain Gardère, préfet de police proche de Nicolas Sarkozy, envoyé en urgence à Marseille pour tenter d'endiguer le phénomène des règlements de comptes et de la délinquance de rue, et Sébastien Bernardo, surnommé "Zorro", flic de la Bac Nord, mis au placard car ne voulant pas "croquer" avec ses collègues. Les révélations du second, associées à l'esprit "M. Propre" du premier, ont permis d'ouvrir une enquête sur des faits qui, selon les Marseillais, duraient depuis les années 1990.
Pour accuser, il faut des preuves. Dans son livre, Frédéric Ploquin publie presque intégralement les conversations entre flics, dans les voitures de la Bac Nord. C'est la clé de voûte de l'enquête donnée par des micros placés dans les véhicules de fonction. Loin d'être très littéraires (insultes à toutes les lignes), elles ont l'avantage de montrer que les pratiques délictueuses de certains fonctionnaires étaient devenues des habitudes, et que les policiers agissaient en groupes, se découpant la carte du trafic de drogue comme on se découpe un gâteau.
Outre l'aspect factuel, accablant, l'auteur de Vol au-dessus d'un nid de ripoux n'oublie pas de se pencher sur le volet social et psychologique de ces dérives : des quartiers abandonnés par l'État où des réseaux de dealers armés jusqu'aux dents font la loi, et dans lesquels on lâche de jeunes flics trentenaires payés au smic, salivants devant des sacoches chargées de billets à chaque "flag" (dix mille euros de recette moyenne pour un bon réseau en une seule journée).
Si, entre ministères et tribunaux, on s'accorde pour étouffer l'affaire dans les prochains mois, le livre de Frédéric Ploquin restera comme un brûlot où on peut lire noir sur blanc que certains policiers marseillais ont franchi la ligne jaune. Et même pire ! Reste l'avenir.
La dernière page tournée, le lecteur va suivre l'évolution de l'enquête dans les médias.
Jusqu'au procès, qui pourrait bien aboutir à un non-lieu...

NdR - Texte co-écrit avec Michel Amelin.

Citation

On est la BAC. T'es pas content, c'est pareil. Ou tu donnes, ou on te met un rouleau dans la poche et on te fait tomber.

Rédacteur: Hugo Amelin jeudi 28 mars 2013
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page