Froid devant !

Je le pensais. Je me sentais liée à elle, d'une certaine manière, comme si nos vies s'étaient croisées et entremêlées, même si elle m'était étrangère. Parce qu'elle était sortie de nulle part et risquait de disparaitre, à moins qu'on essaie de comprendre ce qui s'était passé.
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Roman - Thriller

Froid devant !

Drogue - Corruption - Urbain MAJ mercredi 06 janvier 2016

Note accordée au livre: 3 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20 €

Jean-Michel Cosnuau
Préface d'Emmanuel Carrère
Paris : Robert Laffont, octobre 2015
316 p. ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-221-14497-8

Itinéraire d'un enfant gâté par la vie

Commençons par le commencement : ceci n'est pas un roman - et l'on se prend à rêver de ce que la masse d'informations et de situations décrites dans cet ouvrage pourraient donner, une fois utilisées dans un cadre romanesque -, mais les souvenirs qui définissent la trajectoire d'un homme. Cet homme, c'est JeanMichel Cosnuau. Un homme qui s'inquiète sans doute d'un vie étriquée et qui vit à la fin du XXe siècle. Il ne peut donc pas se réfugier dans les grandes plaines de l'Ouest américain aussi regarde-t-il plus du côté de la Russie qui, après des décennies de chape de plomb communite, s'ouvre à la modernité capitaliste. Comme cette modernité passe aussi par d'immenses fortunes prêtes à être dilapidées, par un goût du luxe tapageur, l'auteur se dirige vers ce qui peut sembler comme une bonne idée : ouvrir des discothèques et autres lieux festifs à Moscou.
Cela donne lieu à de savoureuses descriptions. Tout d'abord, à partir d'une friche industrielle, comment transformer un ancien entrepôt en boite de nuit où tout le monde va se précipiter. Un vague concept, une unité de décoration plus ou moins kitsch pour donner une couleur et c'est parti. Le plus dur est de se procurer des matériaux pour "embellir" la boite, des ouvriers suffisamment compétents, sobres et présents pour boucler dans les délais. Ensuite il faut recruter du personnel qui sait faire tourner l'entreprise sans trop confondre ses poches et celles de la boite et sans trop frapper les clients. Enfin, il faut disposer d'un bon "toit", c'est-à-dire d'une protection qui sait vous défendre, protéger votre territoire et vous faire avoir les bons documents.
Jean-Michel Cosnuau a souvent un bon toit et le récit décrit à un moment une équipe de policiers qui tentent de lui soutirer de l'argent. Plusieurs nuits, ils reviennent en force et ennuient l'ensemble des personnels et des clients jusqu'à ce que l'auteur se lasse. Mais lorsqu'il fait appel à son toit, les policiers ont la surprise de découvrir que leur unité est dissoute par le ministère ! Comme quoi, avoir des amis hauts placés peut être intéressant... Jean-Michel Cosnuau fut un acteur de ces années-là. Il ne connaît pas tous les rouages et ses descriptions se réduisent à ce qu'il peut en savoir. Il ne faudrait pas voir dans ce livre une description minutieuse des mécanismes de la corruption, des rouages de l'économie russe. C'est le récit vivant d'un homme qui a une vie plus grande que la vie : il s'enivre constamment, on lui propose de splendides jeunes femmes, il brasse de l'argent qu'il dépense aussi rapidement qu'il le gagne. Ponctué de considérations géo-politiques sur l'âme russe ou sur la justesse des vues de Vladimir Poutine, et de détails sur la vie médicale - vu ce qu'il absorbe en alcool et en drogue, il y a là quand même une sorte de justice divine.
Sorte de journal intime, Froid devant ! est le témoignage intéressant et sensible d'un homme du siècle qui a vécu avec ses propres principes (certains diraient sans aucun principe), regardant avec détachement, cynisme parfois, et un œil amusé, une humanité folle. Un homme qui se convertit même à l'orthodoxie, qui semble attiré par une sorte de rédemption et qui lit de la philosophie tout en détruisant son foie.

Citation

Un jour, une bande de petits bandits locaux vint le racketter. Il sortit sur le perron, une mitrailleuse Poulimiot portée à bout de bras, et vida son chargeur de 650 balles au-dessus des voitures des voyous. Plus personne ne revint l'importuner.

Rédacteur: Laurent Greusard mercredi 06 janvier 2016
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