Exil

Je ne peux pas fournir de pronostic médical en béton à partir du viseur d'une carabine. Tout ce que je peux faire, c'est la toucher avec une .308 et la rayer de mon agenda en cas d'enterrement.
Thomas Perry - Silence
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Éclipse totale
Harry Hole a été exclus de la police, ce qui ne l'empêche pas de couler des jours heureux, bouteille ...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

vendredi 29 mars

Contenu

Roman - Noir

Exil

Scientifique - Complot MAJ mardi 14 juin 2016

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18,5 €

Frédéric Jaccaud
Paris : Gallimard, mars 2016
320 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-07-017880-3
Coll. "Série noire"

Machines dures ou molles

Derrière la réalité que nous connaissons, il y en a d'autres, encore plus complexes et que nous ne maîtrisons pas. Le monde moderne avec sa passion de l'informatique a multiplié les codes et ces derniers prolifèrent dans le monde, le rendant encore plus inintelligible. Le narrateur de cette histoire a commencé sa carrière dans l'informatique. Il sait bidouiller mais s'est fait prendre la main dans le sac. Viré, il s'est reconverti comme chauffeur pour escort-girls. Mais les escort-girls sont parfois des filles étranges. Le roman se déroule au début des années 1980, au moment où les États-Unis se lancent dans la "guerre des étoiles", celle de Ronald Reagan, où l'informatique devient une obsession, où la Silicon Valley se crée et ambitionne déjà de dominer et de contrôler le monde. Ce n'est pas un hasard si le narrateur lit de la S.-F. et surtout deux auteurs qui sont en train de se passer le flambeau initié par W. S. Burroughs. Au sommet de son art, mais mourant sans le savoir, P.-K. Dick achève de se poser des questions sur la réalité, sur les faux semblants, sur la paranoïa du monde. Face à lui, William Gibson entame une œuvre qui renouvelle ce problème de la réalité en les triturant dans des intrigues liées aux nouvelles technologies, comme dans Neuromancer. C'est autour de ces thématiques que va se construire ce nouveau roman du Suisse Frédéric Jaccaud.
Si la première partie se déroule dans une Amérique urbaine, la suite de l'intrigue nous plonge dans les zones calmes et tranquilles de la campagne. Calmes ? Tranquilles ? Un peu la manière dont tout est calme et paisible aux abords de Twin Peaks. Le narrateur (qui n'a pas de nom) se trouve entre des groupes secrets qui hantent le pays depuis la nuit des temps, des agents secrets et des docteurs fous qui tentent de créer de nouveaux systèmes de contrôle de la population. Il existe pourtant des occupations plus saines comme frapper un étranger - même s'il est devenu votre collègue -, ou tenter de manipuler la réalité depuis un laboratoire clandestin caché dans une scierie (ou presque). Le final révèlera des solutions en même temps qu'il ouvrira de nouvelles perspectives. À l'instar de ce que l'on trouve chez Burroughs, Dick ou dans les épisodes de séries télé ou le cinéma de David Lynch, Exil raconte comment notre soif de décrire la réalité, y compris en la décodant de manière informatique, ne sert à rien, car comme avec un oignon, il y a toujours une autre peau, comme un complot en cache un autre qui sert juste à masquer une organisation secrète. Tout le talent de Frédéric Jaccaud consiste à décrire ces réalités non comme des chimères mais par un style qui en rend chaque élément concret, physique - de l'odeur d'une banquette de voiture dans la nuit de la métropole au choc d'un petit gravier sur une dent, lorsqu'un personnage tombe au sol -, alors que son intrigue touche aux limites mêmes de la réalité. D'ailleurs, ce que vit le narrateur est-il réel ou juste un piège tendu pour lui faire avouer autre chose ?
Roman noir captivant, thriller métaphysique à la Maurice G. Dantec, mais qui en évite les grandiloquences pour en décrire l'os sous la chair, Exil confirme comment en quelques romans Frédéric Jaccaud s'est imposé dans le monde du polar.

Citation

Nous allons mettre un terme à cette mascarade. Rien contre vous personnellement, croyez-le à présent. Contrainte de temps.

Rédacteur: Laurent Greusard mardi 14 juin 2016
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page