Maudits soient les artistes

Quand j'étais gamine, ce vide me fascinait et m'horrifiait à la fois. Je me demandais dans quel état finirait mon corps si je chutais, je m'amusais à y jeter des figurines ou des poupées et à compter le temps qu'il leur fallait pour s'écraser en bas. Une fois, j'ai même failli assommer la femme de ménage.
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Roman - Noir

Maudits soient les artistes

Guerre - Trafic - Artistique MAJ jeudi 19 janvier 2017

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18,5 €

Maurice Gouiran
Paris : Jigal, janvier 2016
230 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 979-10-92016-67-3
Coll. "Polar"

Héritage dégénéré

S'il fallait en croire la Bible, c'est la pomme et la soif de connaissance qui sont à l'origine de toutes les misères du monde. Peut-être pourrait-on également citer la cupidité sous toutes ses formes. Dans ce nouveau roman de Maurice Gouiran le roman, on croisera Hitler et Goering qui veut posséder toutes les plus importantes œuvres artistiques de l'Europe, leurs adjoints qui entendent prendre leur part de cette beauté au passage, leurs descendants qui les thésaurisent et ceux qui aimeraient s'en emparer. La cupidité, c'est aussi les petits truands de Marseille qui n'hésitent pas à liquider pour voler, reconstruisant sans le savoir les célèbres "chauffeurs" des siècles derniers. Un qui ne joue pas dans cette cour des grands, c'est Clovis Narigou, qui préfère s'occuper de ses chèvres, boire tranquillement et s'offrir une nouvelle jeunesse dans les bras d'une jeune femme flic. Mais un besoin urgent d'argent le fait accepter des piges, et le voilà à s'occuper d'une enquête d'investigation autour du camp de réfugiés de Rieucros, en Lozère, qui a accueilli durant la Seconde Guerre mondiale, dans des conditions précaires, les opposants ou les victimes du régime nazi. C'est en rédigeant sa série d'articles qu'il découvre entre autres le problème des œuvres d'art confisquées par les Allemands. Tout pourrait cependant être calme mais entre des petits travaux à financer pour sa chèvrerie, des visiteurs bien envahissants venus squatter chez lui, il a un peu de mal. Surtout, il découvre que Valentine Bertignac, une vieille femme qu'il recherchait pour un témoignage sur les camps, vient d'être victime avec son mari d'une bande de sauvages qui les ont torturé avant de les tuer sans motif apparent. En poussant ses investigations, Clovis Narigou découvre d'autres affaires similaires qui tournent autour de la spoliation des œuvres d'art pendant la Seconde Guerre mondiale, ce cet art dit dégénéré qui attisait quand même bien des convoitises.
Évidement les différentes intrigues vont se recouper, mais Maurice Gouiran a du métier et il sait amener patiemment ce mélange des histoires, entre tragédie et humour. Une tragédie car c'est un roman noir qui joue avec les lâchetés et les vilenies de chacun (à suivre ceux qui se cachent derrière la bande de chauffeurs ou la façon dont les héritiers savent fermer les yeux sur les escroqueries familiales qui les enrichissent) et de l'humour car son personnage récurrent de Clovis Narigou, un peu retiré du monde, regarde narquoisement l'humanité s'agiter (on prendra comme exemple la façon dont il dissèque les invités de son fils qui squattent chez lui ou la manière dont il essaie de régler sa vie amoureuse. Le romancier utilise une documentation intelligente sur un pan peu connu de l'histoire (même si le film Monuments Men de George Clooney a un peu défloré l'ensemble), et le décalage entre les scènes plus polars et nerveuses et celles du registre plus familial se soutiennent l'une l'autre comme le corps et les arcs-boutants d'une église.
Quand l'auteur s'octroie une intrigue classique, mais bien menée, des personnages bien dessinés et que l'on a envie de connaître, bref qu'il sait faire son "métier" d'honnête artisan qui veut intéresser le lecteur sans galvauder son talent, on en arrive à Maudits soient les artistes. Maurice Gouiran continue, avec son personnage central toujours aussi attirant, à enchaîner les bons textes sans faute de goût.

Citation

Sami avait fréquenté à Marseille des tas de petits malfrats septuagénaires que la grande époque de la French Connection n'avait pas enrichis et qui vivaient chichement, à crédit, nantis de leurs seuls souvenirs fantasmés. En revanche, aucun d'entre eux n'avait été retrouvé les pieds cramés et le crâne défoncé à grands cous de pique-feu.

Rédacteur: Laurent Greusard jeudi 19 janvier 2017
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